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L’ELOGE DE LA RESPIRATION IDIOTE. Pour la Révolution psychanalytique.

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Daniel DEMEY

mercredi 30 juin 2010

L’ELOGE DE LA RESPIRATION IDIOTE

Pour la Révolution psychanalytique

 

1 Gigi : portrait inspiré d’un jeune homme

Gigi est un jeune adulte de 34 ans. Le soir, avant de s’endormir, il fume des joints dans sa chambre, seul mais parfois avec un copain de rencontre.

D’origine espagnole, il a les cheveux gominés en arrière, le visage émacié et les sourcils profonds donnent à ses yeux un regard plus sombre encore.

Il pourrait être un personnage de BD. Il semble froid et hautain malgré un petit sourire en coin.

C’est le type de bonhomme que la justice déteste pour la dégaine qu’il affiche.

Actuellement, enfin jusqu’à son arrestation, il travaillait comme ouvrier dans une entreprise de propreté en horaire décalé, de 18H00 à 24 H00. Le reste de ses journées, il le passe à faire des petits boulots en noir dans le quartier. Il est connu par le bouche à oreilles. Ses prix sont compétitifs. Il fait des travaux de peintures, de placements et de recouvrements de sol, d’installations de chauffage… Et il fait les courses pour sa mère avec qui il vit.

Son père est décédé après une longue maladie, d’épuisement sans doute d’avoir trop travaillé et trop fumé.

Il n’a pas de compte en banque à son nom. L’argent qu’il gagne, il le reverse à sa mère qui paye la maison.

C’est lui qui détient la carte de banque. Elle lui fait confiance et il n’abuse pas dans les dépenses personnelles.

Il a connu la prison il y a quelques années, 4 mois… pour un cambriolage. Il dira qu’à l'époque, il a essayé de gagner sa vie comme ça et qu’il a commis des actes de délinquances,des vols,  mais depuis qu’il s’est fait choper et incarcérer, c’est fini. Il doit s’occuper de sa vieille mère.

En gage de son innocence, cette fois-ci, il jure par sa mère. Elle vient le voir à la prison car elle sait qu'il n'a rien à voir avec l'agression pour vol qui l'amène ici. La fois précédente, elle ne s'était jamais déplacée, elle le savait coupable et avait honte de ce fils qui tournait mal. Pour ces gens-là, ce que fait la mère, ce qu'elle pense c'est un peu sacré. Cela l'avait fait réfléchir. Le père de famille était peut-être mort, mais symboliquement, la voix d'un père n'était pas morte. Elle lui revenait par le réel de cette femme, son acte de silence et  sa décision de ne pas rendre visite à son fils pendant cette détention.

Lui-même prétend avoir éprouvé vis-à-vis d'elle et de la famille une certaine honte.

Après sa sortie de prison, il cherche du travail et en trouve,  la nuit, à l’extérieur. Ramassage et triage des poubelles dans la grande ville où il habite. Pour ne pas avoir froid, dès l'automne, il met deux pantalons, deux chemises, deux vestes.

Ce soir-là, il revient de chez un copain à l’autre bout de la commune.

Un type dont il ne connaît que le prénom…enfin, il pense que c’est son prénom, car c’est comme cela qu’il se fait appeler. Il connait la maison où habite ce type, mais n’en connaît pas le numéro. Autre repérage que celui des nomenclatures écrites. Mais, dit-il, c’est presque en face du commissariat de Laeken, 50 m plus bas… Il voit très bien la maison. C’est là qu’il a passé la soirée. Ils ont bu un verre, fumé un joint, regardé des films, écouté de la musique.

Vers 0H30 il a pris le chemin du retour.

Dans sa poche, il a 190 euros, somme qu’il trimbale depuis 2,3 jours car il souhaite acheter de nouvelles pompes. Il me montre celles qu’il porte… dont la semelle est élimée et sur le point d’être percée. Une grosse somme, lui dis-je, quand même, alors qu'il a une carte de banque.

Il n'a pas d'explications... ça le regarde.

« Moi, je suis un type tranquille… je fume mon joint avant d’aller dormir, je fais mes petits boulots la journée et quand il y a du travail, je bosse jusqu’à minuit. J’ai pas d’histoire. J’ai 34 ans, j’ai fait mon temps… »

Gigi, ce soir-là rentre chez lui. Il rentre à pied, plus de métro à cette heure là. Une belle petite trotte. Il s’apprête à traverser la place communale. Une bande de jeunes la quitte en plein rafus et manque au passage, de le bousculer. Il poursuit son chemin. Il a fait quelques pas seulement quand deux personnes ivres s’abattent littéralement sur lui, le prenant pour un des agresseurs qui viennent de les délester d’une belle somme d’argent. L’un deux l’attrape par la veste et brandit la main  transformée avec ses clés en coup de poing américain. II le frappe à la tempe. Gigi ne comprend rien à ce qui lui arrive, il se dégage. Dans sa poche, il a un cutter Stanley avec lequel on découpe les tapis de sol en vynil… il en a placé un l’avant veille chez un type du quartier. Il aime assez se promener avec quelque chose qui parfois est considérer comme une arme blanche : petit canif, ce cutter ... Il me dit que c'est une habitude depuis toujours. Là-bas en Espagne, dans les montagnes d'où il est originaire, tout le monde a son couteau de poche.

« En plus, j'aime tailler de petits bouts de bois » dit-il. Il est connu de la police qui l'a déjà contrôlé et pris avec des armes blanches. Il assume, n’en démord pas. Il continue d’en porter, malgré l’interdiction.

L’autre type qui vient de l'agresser est saoûl. Il veut encore en découdre. Gigi en se dégageant s'est saisi de son cutter et fait balaie l'espace avec son bras armé. Il touche l'autre au visage qui hurle et se tient la figure. Il saigne. Du coup la bagarre s’arrête et Gigi quitte la place sur le champ.

En s'engageant dans une rue qui y donne accès il croise deux policiers sur son trottoir. Il se rend compte qu’il a encore le cutter en main. « Merde, ça craint! »… il essaie de le dissimuler le long du corps et fait mine de traverser la rue. Les policiers viennent de recevoir un appel : « Une agression vient d’avoir lieu sur la place communale ».

Il l’interpellent, n’ont pas besoin de le fouiller. Gigi dépose le cutter à ses pieds. Il est jeté au sol, frappé, menotté dans le dos et emmené au poste.

Ensuite, ce sera le bureau du juge d’instruction. On ne l’écoute pas… c’est lui... il a un couteau en main et 190 euros en poche… Malgré que les victimes parlent d’une bande de jeunes, c’est lui qu’on colle… « Vol avec violence en bande, la nuit avec véhicule… » car la bande se serait jetée dans une voiture.

Il proteste : « J’ai été agressé par deux types, des Albanais, sans que je sache pourquoi… ils étaient saoûls… moi, je ne m’attaquerais jamais à des Albanais, ils sont  bien trop dangereux. Ils ont la vengeance facile… c’est suicidaire ».

La somme d’argent dans sa poche ne correspond pas à ce que déclarent les victimes…trop peu mais beaucoup tout de même.

C’est du tout cuit pour lui…

Lors d’une extraction, un enquêteur le laisse parler et il lui dit : « On va t’aider, d’accord, c’est pas toi pour le vol peut-être bien, mais tu dois nous aider aussi alors… d’accord ? »  -Et le gars de répondre : « D’accord ! »

 

 

2 Commentaires et analyse

Chacun pour soi. Navigation à vue pour se tirer d'affaire.

Voilà donc un modèle d’intégration. Comment s’y prendre pour casser de l’homme et comment le rendre maîtrisable ; tout un processus de domestication dans l’ écrasement du réel de chacun.

Ici, c’est le personnage, dans les traits qui l’ont mis au monde et portés avec la « dérive » des populations jusqu’à venir vivre chez nous.

Ici, c’est le type, dans son étrange étrangeté d’être, et d’ailleurs, dans sa « bêtise » propre de respirer comme il le fait presque depuis qu’il est né : les cheveux gominés à l’Espagnole, le visage émacié et le regard en couteau  qui vous défie d’un seul coup d'oeil, vous règle votre sort en tirant sur sa cigarette.

Il n’a quasiment que cela pour vivre, et sa respiration est bête, totalement idiote, comme la fumée qu’il souffle et le mégot qu’il éjecte d’un pincement du pouce et de l’index.

Avant de tourner le dos, il cracherait par terre. C’est le relent d’une tradition, d'une vanité issue des ancêtres, d'un dégoût pour la difficulté, pour le poids que c’est de vivre depuis des siècles, dans cette injustice d'être au monde en le sachant, en plus dans cette fichue région de mines et de montagnes austères. Les bergers, comme les mineurs, chaque matin, ont ce raclement de gorge qu'ils concluent d'un crachat par terre.

Ce dernier geste  trace le personnage ; c'est une sorte de rituel d'expurgation qui rappelle mais pour en prendre illusoirement la mesure, combien pour ramener du pain, le sol est dur sur cette planète avec les hommes.

Ce geste, comme un point d'orgue à la figure que ces hommes donnent, est celui d'une fierté, une marque de défi au monde et à la création qui les a faits si petit, si injustement, des êtres parlants. « Oh! Qu'il est loin  le temps de cette jouissance animale, sans compte à rendre, qu'il est loin ce temps où l'on était rien qu'un corps dans son instant. »

« Et puis merde, si l'on vit avec cette perte, transformée en dette, depuis des millénaires, ce n'est pas pour autant qu'on ne puisse un peu maudire le monde et puis râler, ou le prendre un peu de haut...mais en silence, en silence de paroles qui ne servent à rien.

Il y a une résignation à cette condition terrestre ; mais au fond, et on le sait, ces râleries, cette fière arrogance, c'est du semblant, on reste petit et on le sait, c'est notre façon d' aimer la vie avec enfance.

La preuve, c'est qu'on vénère les femmes... surtout les mères. »

Le réel dont ces gens se supportent, qui fait leur symptôme social, c’est ça qui insupporte l’Etat de la société capitaliste, et livre les effets de son discours sur la réalité.

Ce n’est pas ces petites gens, ces populations d'indigence, de restes de leur ancienne formes, qui vont mal ou qui sont à côté de leurs pompes, c’est l’Etat, dans son discours capitaliste clos, adossé à celui de la science, et ses sbires, que ces symptômes insupportent.

C’est ce réel vivant irréductible, sans concession, sans explication, sans justification, sans preuve, sans savoir de la norme, sans culture de ses règles, sans respect pour elles et sans culpabilité de les transgresser, qui fait obstacle et affront pour « l’ordre citoyen », de la marchandise et de l'efficacité, car ce réel, ce vivant est le « trop » de vie qui ne convient pas au système de sa reproduction.

Ces formes de vie attachées à ces populations sont des stigmates de réel, de jouissance inconsciente venue du temps d'un autre père que celui du Père jouisseur de l'accaparation violente et sans fin, contemporain de la marchandise.

Elles encombrent et viennent gripper, comme du poil à gratter, le déroulement des affaires propres de la prévision gestionnaire du commerce.

Ces petites gens, alors, se débrouillent et bricolent leur petite (sur)vie dans les marges qu’ils habitent, qu’ils habitent toutes de leurs inventions au quotidien, avec ce qui leur reste de corps, de jouissance – travail au noir, fraude au chômage, à la domiciliation,  complicité dans l’alcool, le shit, voire de petits coups de délinquance, où ils se constituent en bandes d’ententes…

Et cela  les met sur le flanc, dans le collimateur de la haine citoyenne, dans le viseur du nettoyage plus propre, avec sa légitimité parlementaire, qui vote les lois contre « l’insécurité », des lois qui promettent la tolérance zéro, l’exclusion du chômage pour les fainéants, et le travail forcé dans la précarité ou si vraiment ça continue à vivre aussi idiotement, à la rééducation dans les nouvelles prisons…

Toute cette population de la marge est dérangeante par le simple fait qu’elle respire « idiotement », « naturellement », inconsciemment, sans se poser de questions, sinon de jouir de ça, de cet héritage venu de leurs ancêtres lointains. Ils le font avec une certaine fierté, et arrogance, dans un emballage de formes neuves, comme le feraient des indiens dans la ville, avec leur arc et leur carquois, un pagne et les pieds nus, toujours à côté de ce qu’on attendrait d’eux.

Cette respiration simple et idiote, cette existence choisie par eux,  a ses nécessités, elle requiert bien évidemment des conditions minimales de respect, d’avoir, de se loger, de se nourrir, de liberté, de mouvement qui ne rencontrent pas les nécessités et le développement de cette société.

Le monde par eux, n’a pas fini d’être un espace colonial virtuel de terres à  coloniser, à s’approprier et à exploiter. Ces populations sont donc l’enjeu de manoeuvres d’approche du discours capitaliste pour les rendre à la merci de ses prérogatives.

Ce ne sont pas ces gens avec ce qui leur reste de respiration idiote qu’il faut « soigner », « punir », « rééduquer »… c’est la propagande insidieuse qu’il faut punir, qu’il faut bannir ;

propagande qui s’empare de ces autres petites gens dans leur revendication d’intérêts privés et de métiers, de sécurité, de corporations, de propriété - les policiers, les gardiens de prison, les chauffeurs de bus, les stewards, les éducateurs, les enseignants même, et qui fait d’eux une armée de colonisateurs…

Car ils sont issus des mêmes quartiers, vivent dans les mêmes building, ont la même origine de cette respiration idiote, la chance ou la malchance d’avoir trouvé un travail, d’être né ailleurs. Pourtant, très souvent, ce petit déplacement qui les a placés dans une autre opportunité de chance ou de malchance (c’est à voir), fait qu’ils en deviennent transformés.

Avez-vous remarqué comment ces agents de surveillance dans les transports en communs, ces agents de « sécurité » privés, de gardiennage etc... ressemblent derrière le masque de leur zèle, à ces bougres qui ne paient pas le tram et font la manche là où ils ne peuvent pas, à ces manants qui traînent dans les rues et dans les parcs publics? Avez-vous remarqué combien ils sont l’autre versant de la pièce qu’ils étaient encore hier ?

Mais ce léger changement de position entraîne tout un renversement.

De victime d’une exclusion sociale, de ferment de l’errance bidouilleuse,  ils passent sur l’autre versant, deviennent les gardiens d’un ordre, d’une respectabilité qui leur donne maintenant le « droit » d’habiter la haine et le ressentiment pour ce qu’ils étaient la veille, cette condition galeuse de la société.

Ils sont si proches de ça qu’ils le touchent, s’en souviennent par leur chair, par leurs amitiés d’enfance et puis d’adolescence, même par leurs premières histoires d’amour.

Et cette proximité, loin de garantir chez eux une compassion, un entendement, les laisse au contraire sans pitié, dans l’orgueil de celui ou de celle qui a échappé à cette misère, et qui aurait héroïquement pu échapper à l’horreur que constituait la cible qu’ils étaient pour le discours capitaliste.

Ainsi, le gibier devient chasseur et un chasseur adroit, zélé, puisque maintenant, lui, il a été éduqué, formé, il a appris la norme, s’est fait docile à la règle et a reçu du galon. Cela fait une belle troupe, la société   narcynique 1   des galonnés, des petits chefs où toutes les occasions, toutes les promotions font le larron.

Mais ce passage du chien errant au chien de garde s’accompagne d’un retour de la haine, de la férocité qui couvre le prix de ce à quoi le nouveau colon a été contraint de renoncer pour l’obtention de ce statut.  Et ce prix est énorme, il n’a pas de prix. C’est la plus  cuisante des pertes.

Perte d’un peu ou de beaucoup de son insouciance, de cette respiration « bête et naturelle », ( naturelle de bête ) sans objet, sans raison, sans effort pourrait-on dire, paresseuse et sans visée de performance ou d’objectif à atteindre.

Il a du  perdre la respiration idiote qui fait pourtant le réel du vivant de l’homme et avec elle, en sourdine d’elle, dans le plus profond de sa résonance, l’écho, qu’on peut entendre comme « l’écot », la contribution en héritage d’un père, la fameuse et fabuleuse dette qui fait l’objet de la transmissions ?

 Le lieu de la dérivation métaphorique, de la destination du désir de la mère. Et tout ça contre le toc, des objets plus de jouir de la monstruosité informe, tas de merde, du nouveau fétichisme d’un Dieu-Jouisseur.

A cela, à cette saine et bête respiration, qui fait le souffle long de l’existence, la vertu faite à l’homme par « Dieu », celle d’une dimension l’éternel,  à ce qui fait l’incongru et le particulier de la vie depuis le début des temps qui ont compté pour l’homme et avant même qu’il ne soit homme, dans ce qui vient du mystère des choses qui mèneront à l’homme 2 ,  à cela la société, non, disons plutôt l’Entreprise, aura échangé la pâle et insignifiante vertu du souffle court, de la précarité, de l’homme-emphysème, avec ses brols et ses tuyaux d’appoint, alimenté par des sondes de produits qui iront directement faire vibrer son corps, lui donneront ses jouissances  machinales pour un temps qui durera ce qu’il dure dans le régime des pertes et profits. Car c’est seulement ainsi qu’à cet homme entubé, il lui sera alloué une place au sein de l’ architectonie managériale de l’Entreprise, comme un Empire, le seul qui contre attaque.

C’est cette entame faite au lieu de son origine et de sa respiration, cette entame faite à son souffle qui le damne, et le condamne.

Car cet homme intégré, ce nouvel hommoncule, en devient un renégat, le nouveau fils adoptif de la haine,  du système d’ordre, de ce nouveau Père, qui lui promet ses neuves jouissances, après avoir vaincu et dénigré les capacités insignifiantes de l’ancien, du vieux père crachoteux, qui d’ailleurs a failli, tellement même qu’il en est mort.

Le nouveau Dieu promet ni plus ni moins un jour de se passer de la mort. Obstruction du Réel.

Ce fils de personne qui vaille la peine de soutenir la comparaison avec ce Père jouisseur neuf,  renie l’ancien dont il ne se voit plus que comme un malheureux bâtard, un résidu de merde (encore).

Le bâtard de toute une vie durant passée dans l’insouciance, avec la seule valeur de sa respiration idiote qui le menait,  sera, sans reprise de ce temps, de cette valeur inestimable, éconduit dans ce nouveau temps et cette nouvelle valeur d’immédiatement et de promesse de tout, dans une fureur contre l’ancienne.

Fureur contre ce qu’il aura pu avoir été si longtemps, si naïvement, un con de bâtard indigne, un con de mauvais fils d’un mauvais père, à la respiration idiote. 

Fureur entachée d’ordre, de discipline, dirigée contre toutes celles et ceux  qui n’auront pas fait preuve du même mérite que lui, lui qui aura su renoncer à ce mauvais père, à ce mauvais fils en lui pour se lier au nouveau Père, au tout Puissant de la gestion, de la technique, de la science qu’on nous promet.

Fureur et discipline adossées à celles d’une foule légitimée  par l’opinion, par le consentement issu d’un vote qui proscrit ce passé simple mais répugnant, si maladroit et trébuchant, taché de faiblesse, d’impuissance, de tares qui définissent le

 vieux père mort.

Car c’est en qualité de membre de toute cette foule acquise au droit et par le droit à l’infâmie de lois qui condamnent cette source humaine de la respiration idiote , que seront désignées les nouvelles cibles, celles qui manifestement, par leur incrédulité, leur obstination à ne pas vouloir ni voir, ni entendre, n’ont pas fait preuve d’abnégation, d’ esprit de sacrifice auxquels eux  se sont si « vertueusement » pliés.

Ainsi va la société –non, l’Entreprise- dans son mouvement de foule bête et opiniâtre, comme une masse droite en brandissant sa haine comme une guérison. 

Et ainsi va l’Entreprise à céder sur son désir, sur son réel, et sur le nom de son vieux père infirme.

Elle n’a rien à envier à une certaine époque de persécution, promise si elle ne s’ écarte pas très rapidement de ses guises, à l’engloutissement dans une répétition d’une plus grande horreur encore.

3 Conclusions

Psychanalyste dans la cité... voilà ma place face à cet homme à « la respiration idiote »,

auquel, je n’ai offert que mon sécrétariat d’ambulance, mon écoute de corps, afin de transcrire en lettre ce qu’il me rapporte, et de le pousser à tenir bon, rien que dans mon entendement, sur ce qui lui reste de réel pour dire comme il le peut ce qu’il en est de son innocence judiciaire, en partie, et de son innocence réelle, vraie celle-là, intouchable et remarquable, son innocence d'être et de  rester, comme emmanché à l'inconscient.

En prenant le parti d’un entendement de son réel qui était là, devant moi, massivement presque, dans le dire d’incompréhension, d’hébétude et de méfiance qu’il amenait au début, avec son corps, ses mimiques, ses tics, son histoire plongée dans les racines du temps, je l'ai vu néanmoins partir avec soulagement, franchir la porte du parloir où je le recevais, avec un grand sourire et il me semble, dans la poignée de mains, la force de respirer, encore plus fort et bêtement, un peu moins dupe, un peu plus armé donc, pour jouer le jeu en lisant un peu mieux ses cartes.

 Là, je me suis dit, ce type m'apporte la réponse à ce à quoi la psychanalyse peut encore prétendre pour ex-ister au déclin de sa forme peu engagée sur ce point, trop réservée, et circonspecte devant cette essence de réel de l'autre.

Il est temps, je crois de se poser la question du pourquoi elle ne s'affiche pas plus ouvertement

du côté de la révolution... de la Révolution psychanalytique pour interpeller le vivant, lui faire adresse d’un lieu non seulement de changement, d’une modification possible, mais aussi de son immanence, de son incontournable essence de réel à restaurer, en  faisant de ce réel, la visée, comme dit C.Soler,  par le bien dire. Seule façon d’en retrouver un bout, au corps de la lettre.

Et cela passe par une généalogie pour chacun, généalogie de l’homme jusqu’à dit-cerner sa respiration idiote. Celle qui reste, malgré tous les changements, tous les passages de générations en générations, toutes les figures que peut prendre la figuration humaine.

Ceci est l’oeuvre de la psychanalyse, dans son pouvoir de soutenir le symptôme, sa jouissance, comme lieu inébranlable pour retrouver le fil d'un père qui ne soit pas celui de la renégation capitaliste, mais d’une dignité retrouvée de ses origines,  de son fil-amant des générations entre elles.

Le champ lacanien, de la jouissance où elle est prise dans les discours, où elle s’origine dans lalangue, est à ouvrir à tous, et aux petites gens aussi, qui bon an mal an, continuent d'abord à vivre de ce qu'ils ne savent plus, qu'ils peuvent y retrouver leurs billes, et qu'en eux, profondément enfoui, et recouvert par l'effet des discours de promesses et de leurres des fétiches des plus-de jouir capitalistes, se love quelque part l’amour d’une jouissance placée sur le vivant de la respiration idiote, du souffle long, interrompu mai transmissible.

C'est ce réel qui est pourtant déjà au fait de l'amour et de la jouissance, partie liée à l’imaginaire et au symbolique dans la transmission généalogique, qu'il faut réarticuler dans nos espaces, en y mettant notre réel de corps et de lettres de psychanalystes, pour lui donner le champ de son élargissement dans la culture d’une fraternité partagée comme autant que nous sommes tous, les fils de lalangue, des êtres de langage, des frères de la dit-mension. 

Oui, je suis pour dire ce grand découvrement d'une « Révolution psychanalytique »

Daniel DEMEY

25 février 2010

1_C Soler –in l’angoisse di prolétaire généralisé j'ai appelé le régime du " narcynisme " par condensation entre narcissisme et cynisme... www.champlacanienfrance.net/IMG/pdf/csolercours.pdf

2- Le mystère du corps parlant, son origine dans ce qui anime les choses et le vivant au-delà de ce que nous pouvons en dire

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