PERSONNE Gwenaëlle Aubry Mercure de France 2009 15 € 159 p.
Prix Femina
Dans cette période où la psychiatrie perd pied, et devant la montée en puissance de la psychose face à la déroute sociale et à la perte du lien familial et social, voici un petit ouvrage explosif.
Il traite de la rencontre avec un psychotique, un psychotique qui n’est pas n’importe qui mais bien un père, le père de l’auteur, oui, son propre père.
Un père qui n’est pas père, qui ne peut l’être, un père qui vous manque à jamais pour ce qu’il n’a pu être et qui vous marque au fer rouge de son absence dans sa présence.
Un père qui donne le change, un père qui fait semblant tout le temps et vit comme s’il était… alors qu’il n’est pas.
Un père psychiatrisé et hospitalisé par intermittences, ce qui conduit au diagnostic de maniaco dépressif ; un psychotique comme tous ceux sur lesquels la médecine butte, hormis à les léthargiser : fantômes aspirés dans des grandeurs aussi démesurées que leurs déchéances, murés dans des donjons inaccessibles, infiniment pathétiques dans leurs violences et leurs fragilités.
Poignant, renversant, ce constat, forgé à l’émotion, de la descente aux enfers de ces sujets en proie aux délires et à la conscience, éphémère, de leur différence. Plongée vertigineuse dans la tragédie de ceux qui s’enlisent dans leur gouffre intérieur. Les proches, décontenancés, assistent, impuissants, au drame de cette perdition.
Dans cette ambiance chaotique où les repères sont malmenés, leurs enfants passent leur énergie à vouloir aider, sauver, soigner ; ils se font le « Samu familial », toujours vain, dont l’échec les propulse, à vie, dans la culpabilité ou encore, mais c’est bien la même chose, dans l’envie de soigner…ou d’écrire. Le fardeau reste pourtant pesant…
Une écriture ciselée pour décrire les effets dévastateurs de la folie sur des parcours d’enfances meurtries par l’incompréhension, l’étrangeté, l’angoisse, les peurs et l’incohérence.
Rarement les mots ont été aussi vibrants pour nommer cette fracture ouverte d’avoir irrémédiablement croisé le chemin de ceux-là qui, la tête dans les étoiles… s’accrochent à leur lithium.
Un livre qui fait vaciller : il a reçu le Fémina : enfin un prix bien décerné !
Florence Plon
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