institut européen psychanalyse et travail social  
   N° de déclaration: 91.34.04490.34   
Lettre info

Partage Facebook
Partagez votre amour pour psychasoc avec vos amis !

REZO Travail Social
Connexion au REZO Travail Social

Musique
Lecteur de musique

Livres numériques

Kiosque > fiche livre

Liens fraternels et handicap

Suggérer à un ami Version PDF Version imprimable Réagir au texte

Liens fraternels et handicap
De l'enfance à l'age adulte: souffrances et ressources
Erès
30/04/2010

Régine Scelles, Liens fraternels et handicap, Toulouse Erès 2010, 280 p., 25 €

On le sait, le sujet n’est pas handicapé ! Mais les relations et les échanges humains si ! C’est le tribut à payer au langage et à son malentendu. Aussi peut- on apprécier l’effort de l’auteur pour mettre en mots le remaniement des relations entre les membres d’une famille lorsque naît un enfant dit « handicapé ». Et ce, en portant l’éclairage sur les frères et sœurs, les enfants de la fratrie, auxquels on s’intéresse en effet insuffisamment, tant le faisceau des aides et attentions est centré sur le petit malade. Et il s’agit bien de mettre en mots pour pouvoir donner les mots.

Ces frères et sœurs n’ont pas forcément accès à une parole aidante et constructive. Les parents sont enfermés dans leurs soucis et remises en cause de leur image narcissique et de celle de l’enfant idéal dont il leur faut faire le deuil. Les amis et proches se sont éloignés plus vite que prévu… et les personnels soignants, ou sociaux, galèrent pour reconfigurer au mieux une intégration médicale, sociale, scolaire à ces enfants autres, ces enfants qui sont «  différents ».

Cette différence va faire point de butée pour la fratrie dont le premier choc passe indiscutablement par le regard. Le leur d’abord, sur ce frère ou cette sœur, puis la rencontre avec le regard des autres, des proches, des camarades de classe et des personnels scolaires, etc. Et c’est là que les choses se gâtent : le regard a fort à faire dans nos sociétés ; il est par définition raciste, ségrégationniste, rejetant pour celui qui n’est pas comme les autres, dans la norme, transparent.

Du regard de l’autre, on passe au regard sur l’autre, puis au regard sur soi…

Les enfants de la fratrie vont souffrir, dans leur chair, de la présence de ce corps blessé à côté d’eux : honte, gêne, rejet, et culpabilité se transforment en compassion et sollicitude envahissante, ou même surinvestissement.

Et leur avenir sera grevé par les effets collatéraux de cette naissance : angoisses de mort et inquiétudes génétiques.

En l’absence de mots, les enfants, dans quelque domaine que cela soit, se font des histoires, leurs histoires, et greffent leurs explications, leurs peurs, et leurs réponses, pas toujours adéquates. Alors se développent de manière anarchique, des sentiments de jalousie, de concurrence, de haine, d‘identification, d’agressivité, de sadisme, d’amour fusionnel...

Paradoxalement, quand on est « normal », on ne monopolise pas l’amour de ses parents, ni l’attention des adultes. La place d’enfant, de fils ou de fille, de frère ou de sœur, d’aimé ou de laissé pour compte… devient un enjeu de tous les instants.

Pour que cette chance d’être « normal » ne soit pas trop lourde à porter, ils vont avoir besoin de sortir de leur difficulté à dire, et devoir apprendre à communiquer avec celui qui souffre parfois moins qu’eux.

D’où l’intérêt que l’on s’inquiète systématiquement de leurs comportements et modes de fonctionnements. Se murer dans les non-dits, les silences, les réponses tronquées, sous prétexte que la vérité fait souffrir, sème le désastre. Les enfants peuvent tout entendre et sont solides pour peu qu’on les respecte et maintienne à leur place de « petit sujet corrélé à l’enfance [1]». Il faut pouvoir les écouter et partager avec eux, car ils ne sont jamais trop petits pour comprendre, et s’avèrent, le plus souvent riches de solutions à apporter.

Il s’agit pour eux de pouvoir exister « à côté », et aussi, pour eux mêmes ; d’être ce qu’ils sont et pas seulement en fonction de l’autre, celui-là que les parents surprotègent. Même quand « on n’a rien », on n’est pas rien. Dans pareil contexte, ils peuvent ne plus s’y retrouver, ne plus avoir de statut et en chercher un, dans une errance infinie. Si l’on sait l’entendre, leur parole est toujours juste, ouverte, curieuse ; d’où l’importance de tout leur dire, tout de suite, des décisions à prendre ou prises, à l’aggravation de l’état de santé, en passant par l’hypothèse du décès, quand il se profile… Faire tomber les tabous apporte un souffle nouveau dans les relations et installe l’habitude du respect du désir de la personne handicapée.

Cela doit venir des parents, mais aussi, d’un professionnel ayant le recul et l’expérience voulue. Médiatiser les choses et faire circuler une parole, leur permettra de s’impliquer sans se faire dévaster. S’impliquer mais justement pas trop, pour pouvoir, une fois adultes, à la mort des parents, devenir responsables quant aux décisions à prendre.

Fratries en deuil, fratries en souffrance, on ne pense pas assez à eux ; la prise en compte, par l’auteur, du soin à apporter au lien fraternel, démontre combien  un suivi peut être indispensable pour que d’un ravage, l’on puisse faire un enrichissement.

Cinq millions tout de même, en France, de personnes affligées de handicaps moteurs ou mentaux, déficits auditifs ou visuels…

 Florence Plon

[1] M.J Sauret

Commentaires

rss  | xhtml

Copyright © par PSYCHASOC
n° de déclaration : 91.34.04490.34

— site web réalisé par Easy Forma