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Guérir ou désirer?

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Guérir ou désirer?
Petits propos de psychanalyse vivante
Encre Marine
31/12/2006

Petit ensemble de lettres, d’articles, de réflexions... cet essai a du style, un style, celui d’un homme libre ! Libre de sa pensée et de son écriture !

Il ne fait que ce qu’il veut, il va où il veut et comme il veut Ignacio Gàrate Martinez ! Il nous livre “autant de petits propos lâchés au vent pour dire, encore, l’insensé d’une psychanalyse toujours vivante en moi”...” ; et il nous y entraîne malgré nous mais aussi drainant notre adhésion pleine et entière.

Ca nous fait, certes, un ouvrage qui part dans tous les sens ... en apparence ... en tous cas ; et qui heurte mon sens obsessionnel de la nécessaire orientation d’une construction littéraire...

Mais c’est, de ce fait, bien trompeur, car au milieu de ce désordre apparent, émerge du sens et un fond qui, sans en avoir l’air, traite de l’essentiel quant à la psychanalyse et à sa situation actuelle.

Que fait-elle ? Où va-t-elle ? Que devient-elle dans cet aujourd’hui dont l’avenir n’est pas rose ...

Gàrate Martinez prend à bras le corps la question de la différence entre psychanalyse et psychothérapie, qui n’est pas des moindres quand ce terme de psychothérapie recouvre désormais tant le projet institutionnel que le soin pharmacologique afférent ...

Qu’est-ce que guérir ? Est-ce le but du soin ? Au sens où on l’entend habituellement ? Freud le pointait soigneusement : “Vous le savez peut-être, je n’ai jamais été un enthousiaste de la thérapie” (6° conférence)

Comment prendre garde à ce que ce ne soit pas le futur de la psychanalyse : un devenir de compromis et de concessions bien éloigné de l’éthique freudienne ou lacanienne ; un avenir où délinquants et pervers et psychotiques pourraient bien être génétiquement fichés et modifiés ... dans une société qui se voile la face en pensant l’exclusion comme une sécurité.

Soigner n’est pas toujours guérir. On peut aussi guérir sans être soigné. Si dans une analyse la guérison vient “de surcroît” qu’est-ce qui s’est alors passé et qu’est-ce qui a changé ? Il y a des effets, des effets dont on peut rendre compte. Comment cela opère-t-il ? A nulle autre pareille, cette spécificité se veut la teneur de la psychanalyse. Il est impensable de s’en éloigner et de sacrifier sur l’autel du résultat et des statistiques, l’hétérogénéité absolue d’une pratique unique. La psychanalyse va devoir continuer à se battre et même à se battre pour exister et c’est loin d’être un pari gagné !

Désirer qu’est-ce à dire ?

Qu’est-ce que ça implique d’être psychanalyste, donc de “faire l’offre de la psychanalyse” dans ce monde fondé sur la prédominance de la consommation et où les DSM et les institutions se font les mamelles du formatage du sujet ? Et ce psychanalyste, qu’elle est sa place dans la cité hormis celle de s’affilier à des écoles où se comptent les coups et les dissensions sous le manteau d’un besoin de reconnaissance individualiste ?

Comment peut-on transmettre dans, et hors l’université, une théorie qui ne peut que s’appuyer sur une pratique clinique chaque jour remise sur le métier : Lacan (RSI leçon du 10 Décembre 1974) soulignait la cohésion incontournable de cette conjugaison : “... l’analyste pour avoir des effets et l’analyste qui, ces effets, les théorise”

Tout cela devrait-il être uniformisé par une instance ordinale, dans le registre actuel de folie législative ? Gare... Que restera-t-il alors d’une fonction qui, seule, s’intéresse au sujet et à son désir ?

Et d’ailleurs, qu’est que désirer ? Est-ce une guérison ?

Guérit-on parce que l’on désire, ou désire-t-on parce que l’on guérit ? Ou plutôt, ne désirerait-on pas parce que se rencontre un autre qui, précisément, ne désire rien... mais qui se singularise d’un désir : celui de l’analyste ? Mais bon, je m’égare...

La psychanalyse se fonde sur le sujet, sur sa rectification subjective, sur ce qu’il y a d’unique, d’original, de particulier, de libre en chacun. La santé mentale n’est pas le diagnostic de l’incurable ; elle se doit de n’être qu’une ouverture de possibles ; c’est le respect de la diversité, de la pluralité qui maintient cet espace de fondation.

D’où la nécessité absolue de toujours veiller au grain pour que persiste une position de castration faisant limite à la jouissance et autorisant qu’un manque fasse le lit du désir.

Voilà les questions et quelques amorces de réponses qui agitent I. Gàrate Martinez. Culture et profondeur de la réflexion président à son discours ; s’y ajoute une pincée de poésie car après tout, il faut se faire un peu poète pour attester des points de rencontre du réel auxquels on a eu à faire, points d’articulation d’une analyse où l’inconnu devient savoir : savoir d’une mémoire oubliée qui surprend indéfiniment d’aborder les littoraux inexplorés, ces bords qui font frontière et permettent d’accéder à la subjectivation de sa propre mort.

Il s’agit bien là d’une PAROLE EN ACTE, d’une parole libre d’oser, comme le propose le titre de cette collection, en harmonie avec le propos.

Florence Plon

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