samedi 03 janvier 2009
Résolution de soutien à l'appel public des Psychanalystes et Psychothérapeutes britanniques concernant la situation de la Psychothérapie et de la Psychanalyse en Grande-Bretagne
Participants à textura, un groupe psychanalytique orienté par Freud et Lacan à Köln (Cologne, Allemagne), nous sommes très préoccupés d'apprendre que la pratique de la psychanalyse pourrait bientôt devenir impossible en Grande-Bretagne du fait que la plupart des pratiques psychanalytiques seraient rendues illégales. Il s'agit des standardisations actuellement envisagées de la psychothérapie, dans laquelle le législateur britannique inclut aussi la clinique psychanalytique et sa pratique dans la cure analytique. Le Health Professions Council britannique a reçu pour mission d'établir des standards nationaux pour toute activité psychothérapique. A cet effet ont déjà été élaborées plus de 450 règlementations qui s'appliqueraient à toute thérapie psychanalytique. Feraient partie de ces prescriptions, qui se verraient imposées à chaque psychanalyste mais aussi à chaque thérapeute, des règlements qui fixeraient presque tous les aspects du cadre, de la pratique et du style du travail psychanalytique et psychothérapique. Elles concerneraient, par exemple, le moment, où une intervention devrait être posée, des instructions sur l'expression de « sentiments appropriés », jusqu'au but recherché par ce processus. La fin d'une cure psychanalytique comme de diverses psychothérapies ne serait donc conditionnée ni par la parole de ceux qui s'adressent à un psychanalyste ou à un psychothérapeute, ni par l'orientation de celui-ci, ni par la singularité de l'accomplissement de chaque travail. L'espace à protéger du travail analytique et psychothérapique serait ainsi détruit et rendu impossible. Comme nous avons pu le savoir, la grande majorité des psychanalystes praticiens ainsi que des psychothérapeutes en Grande-Bretagne - malgré leurs différences théoriques - s'accordent sur le fait qu'une telle intervention est inacceptable pour tous ceux qui pratiquent la psychanalyse en tant qu'analysant ou analyste, et qu'en outre différentes formes de psychothérapie deviendraient impossibles du fait de ne pas être « standardisables ».
Orientés par Lacan, nous sommes convaincus que cette régulation de la psychanalyse et de la psychothérapie qui est poussée à l' extrême en Grande-Bretagne, mais qui existe dans toute l'Europe, contredit fondamentalement non seulement la théorie et la pratique des découvertes Freudiennes, dont principalement l'inconscient, mais aussi les travaux d'autres psychanalystes qui -chacun à sa façon- ont poursuivi la cause de Freud et ses questions. La lecture par Lacan de l'ouvre de Freud et ses apports à la pratique et la théorie de la psychanalyse nous montre le chemin à suivre. Cette orientation comprend également ce que Lacan a lui-même toujours prôné : la considération et l'interrogation des écrits et de la pratique des collègues appartenant à d'autres courants. En Grande-Bretagne, nommons parmi eux principalement Mélanie Klein, Winfred Bion, Donald Winnicott et Michael Balint. Nous recevons ces ordonnances britanniques si menaçantes également comme une attaque destructrice envers la tradition psychanalytique et sa transmission.
Nous rappelons que la formation du psychanalyste comprend de grandes exigences quant à la qualité de ce travail. En font partie une très longue expérience personnelle de la cure psychanalytique, la lecture des textes fondateurs de la psychanalyse, la participation à des séminaires et groupes de travail, ainsi que la supervision et l'analyse de contrôle. Comme il ne s'agit pas -en ce qui concerne la psychanalyse- d'une technique « standardisable », mais d'une éthique toujours ouverte à ceux qui viennent avec leur souffrance singulière à la cure par la parole, la psychanalyse ne peut être transmise qu'à travers des cheminements de formation qui durent des années et qui ne sont pas réglables par l'Etat. Ceci implique également, que les psychanalystes sont constamment appelés depuis Freud à questionner leur travail, à échanger de façon critique avec leurs collègues, à reprendre toujours à nouveau leur propre analyse ou à retourner en supervision. L'évaluation requise du travail psychanalytique existe bel et bien depuis son début dans une forme propre et souvent particulièrement intense. Lacan tout particulièrement, mais aussi Freud, ont en outre toujours incité les psychanalystes à analyser de façon critique la mesure du savoir de leur temps.
La transmission de l'expérience particulière de la psychanalyse est soumise à des conditions spécifiques. En font partie sa temporalité propre ainsi que la nécessité de concepts qui tiennent compte du fait qu'il s'agit en psychanalyse finalement de quelque chose d'indisponible. Ceci échappe à la logique de notre société marquée par le néo-libéralisme. La psychanalyse examine et explore le lien social entre les humains, ainsi que les formes dominantes de la science en questionnant leurs formes de discours et leur rapport au subjectif dans le sens du singulier.
Nous avons l'impression que la psychanalyse et la psychothérapie sont de plus en plus appelées à devenir les moyens d'un contrôle étatique ou social, voire même judiciaire. Il est par l'exemple déjà avéré qu'en Grande-Bretagne des citoyens soupçonnés de terrorisme doivent être saisis et « traités » dans des cabinets de psychanalystes, ce qui ferait office d'une rééducation.
Toutes ces évolutions méconnaissent qu'il ne s'agit pas en psychanalyse du statistiquement « normable », du rapidement saisissable et fixable, mais du singulier de la parole dans la rencontre entre l'analysant et l'analyste, qui a rapport à des règles de jeu « qui doivent puiser leur signification dans le contexte du plan de jeu » (Sigmund Freud : Zur Einleitung der Behandlung (1913), GW VIII, p.454). Ceci correspond à la cure analytique en tant que travail de culture et contredit l'idée du « citoyen transparent », de la création de normes pour tout et de la possibilité de contrôler les processus de socialisation. Dans cette mesure, nous ne considérons surtout pas les événements en Grande-Bretagne et dans d'autres pays d'Europe, l'Allemagne y comprise, dans le sens d'intérêts catégoriels proprement dits. Pour nous, l'essence de la psychanalyse que Freud a nommée « travail de culture » est entièrement en jeu. Il s'agit quant à cette essence de l'affirmation de la loi du désir humain face à un Autre compris comme un tout, de l' Autre de l'Etat et de son autorité. A travers la tentative d'une règlementation de la cure psychanalytique, la « normation » est par contre élevée au niveau de la « loi ».
Pour nous, en Allemagne, ainsi que pour nos collègues anglais, les Etats Généraux en France qui ont pu collecter plus de 15000 signatures en juillet 2008, représentent un espoir. Celles-ci s'adressent à l'Assemblée Nationale contre d'avantage de régulation des conditions requises pour une installation comme psychothérapeute et pour renforcer le poids de la psychanalyse. Ces « Etats Généraux » comprennent également des psychanalystes de courants théoriques différents.
Nous soutenons avec insistance par cette résolution, également dans le cadre de la solidarité avec le College for psychanalysts à Londres, ainsi qu'avec le Center for freudian and analytic research, les efforts de nos collègues anglais pour rendre intelligible aux administrations sanitaires et aux hommes politiques de leur pays la valeur d'une psychanalyse aussi peu réglementée que possible par l'Etat, et ceci également dans le sens de la tradition démocratique de la Grande-Bretagne qui donne une valeur particulière au citoyen émancipé. Nous parions par ailleurs sur le fait que le pays qui a accueilli Sigmund Freud lors de son émigration va rester fidèle à la tradition de cette hospitalité par rapport à la psychanalyse, ainsi que pour la transmission de l'ouvre de ceux qui en Grande-Bretagne ont repris la cause Freudienne et ont continué à la développer.
Ainsi, nous nous adressons à nos collègues de l'Assoziation für die Freudsche Psychoanalyse (Association pour la psychanalyse Freudienne), des archives Lacan à Brégence (Bregenz), de la Freud-Lacan-Gesellschaft (Association de psychanalyse, Berlin), du Psychoanalytisches Kolleg (Collège clinique psychanalytique), du Lehrhaus für Psychoanalyse (Ecole de psychanalyse) à Hambourg, du Kasseler Forum für Psychoanalyse (Forum de psychanalyse) à Kassel, pli à Munich, du Psychoanalytischer Salon Berlin ( Salon psychanalytique à Berlin), du Lacan Seminar à Zürich et du Neue Wiener Gruppe (Nouveau groupe de Vienne, Autriche), avec lesquels nous travaillons depuis de longues années.
Au-delà de ces associations (germanophones), cet appel et la demande de le signer s'adresse également aux autres cercles psychanalytiques, ainsi qu'à tous ceux qui accordent de la valeur à la cause Freudienne et à la psychanalyse en tant que travail de culture.
Nous allons remettre cette liste de signatures à nos collègues anglais en février 2009 et la communiquer aux Etats Généraux en France dans le cadre de leur engagement « Sauvons la clinique ». Jusque-là, nous vous invitons à joindre votre signature à cet appel en l'adressant à l'adresse mail de Michael Meyer zum Wischen, Psychanalyste à Köln, Allemagne :
Traduction par Gabrielle Devallet-Gimpel (Toulouse)
Les auteurs:
Klaus Findl, bildender Künstler, Köln
Miriam Goretzki-Wagner, Coach, Bonn
Andreas Hammer, Dipl.-Psych., Köln
Fotini Ladaki-Schmidt, Dipl.-Psych., psychoanalytische Praxis, Köln
Béatrice Ludwig, Linguistin, Köln
Jean-Baptiste Mariaux, PhD., Köln
Dr. med. Michael Meyer zum Wischen, psychoanalytische Praxis, Köln
Karin Schlechter, bildende Künstlerin, Köln
Les signataires:
Karin Adler, Psychoanalytikerin, Paris
Eckhard Bär, Psychoanalytiker, Sozialarbeiter, Suchtherapeut, Kassel
Ute Bergmann-Näher, Ärztin, psychoanalytische Praxis, Rottenburg / Tübingen
Michel Borsotto, Psychoanalytiker, Coaraze Andréa Bryan, bildende Künstlerin, Köln
Cristina Burckas, Lic. Psych., psychoanalytische Praxis, Freiburg
Christine Chagneaud, Psychologin, Psychoanalytikerin, Albi
Patrick Coadou, Employé mairie, Villeneuve Les Bouloc, Psychopathologie clinique université du Mirail, Toulouse.
Prof. Dr. Marcus Coelen, Institut für romanistische Philologie LMU München, Psychoanalytiker, München
Geneviève Condou, Klinische Psychologin, Toulouse
Gabrielle Devallet-Gimpel, Psychiaterin, Psychoanalytikerin, Blagnac
Harold Dielmann, Dipl.-Psych., psychoanalytische Praxis, Köln
Dr. U. Oudée Dünkelsbühler, Dozentin und Psychoanalytikerin, Hamburg
Dr. phil. Susanne Gottlob, Psychoanalytikerin, Hamburg
Marylène Guery, Dipl.-Psych., psychotherapeutisch-psychoanalytische Praxis, Köln
Annemarie Hamad, Psychoanalytikerin, Paris
Maire Jaanus, Professor of English and Comparative Literature, Barnard College/Columbia University, New York, NY
Franz Kaltenbeck, Psychoanalytiker in Paris und Lille, sowie in der medizinisch-psychologischen Abteilung der Haftanstalt Sequedin am Centre Hospitalier Régional Universitaire de Lille
Eva Kiefer, psychoanalytische Praxis, Salzburg
Bernhard Kreuz, Dipl.-Psych., psychoanalytische Praxis, Neckartenzlingen / Tübingen
Ursula Lefkowitz, Psychoanalytikerin, Rambouillet
Dr.med. Chrisian Kläui, Psychiater und Psychoanalytiker, Basel
Christian Kohner-Kahler, Bewährungshilfe, Universität Wien, FH Linz
Corinne Maier, Psychoanalytikerin, Brüssel
Barbara Meyer zum Wischen, Dipl.-Psych., psychotherapeutische Praxis, Köln
Dr.med. André Michels, Psychiater und Psychoanalytiker, Luxemburg und Paris
Catherine Moser-Fride, Dipl.-Psych., Paris IV Sorbonne, psychoanalytische Praxis, Elchingen (bei Ulm)
Andreas Gottfried Müller, Dip.-Psych., psychoanalytische Praxis, Bremen
Dr.med. Peter Müller, Arzt und Psychoanalytiker, Karlsruhe
Susanne Müller, Dipl.-Psych., Kunstwissenschaftlerin, Paris
Prof. Dr. Karl Josef Pazzini, Koordinator des Psychoanalytischen Kollegs; Universität Hamburg, Fakultät für Erziehungswissenschaft, Psychologie und Bewegungswissenschaft, Sektion 1, Bildungstheorie, Bildende Kunst, Hamburg
Univ.-Prof. Dr. August Ruhs, Universitätsklinik für Psychoanalyse und Psychotherapie, Wien
Avi Rybnicki, Psychoanalytiker, Tel Aviv
Pieretta Sakellariou, psychologue clinicienne, plasticienne, Toulouse
Marie-Jean Sauret, psychanalyste (APJL), professeur des universités, Toulouse Dr.med Georges Schmit, psychoanalytische und psychiatrische Praxis, Brüssel
Dr. phil Bernhard Schwaiger, Dipl.-Psych., psychologischer Psychotherapeut, Neustrelitz
Madlen Sell, Dipl.-Psych., Freiburg i. Br.
Véronique Sidoit, Psychoanalytikerin, Paris
Khadija Taoujni, Étudiante en psychothérapie, Paris
Laure Thibaudeau, Psychoanalytikerin, Paris
Dr. med. Michael Turnheim, Universitätsdozent, Psychiater, Psychoanalytiker, Wien, Paris
Dr. Johanna Vennemann-Bär, psychologische Psychotherapeutin, Psychoanalytikerin, Hann.-Münden, Rom
Rivka Warshahawsky, Psychoanalytikerin, Klinische Psychologin, Israel
Mai Wegener, psychoanalytische Praxis, Berlin
Dr. phil. Peter Widmer, psychoanalytische Praxis, Zürich
Mag. Dr. phil. Markus Zöchmeister, psychoanalytische Praxis, Salzburg
* Texte transmis par Oedipe.org
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