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Ferenczi, précurseur des psychothérapies humanistes

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Serge Ginger

dimanche 17 août 2008

Avant Perls, Rogers et le courant humaniste, il souligna l’importance du corps et de l’émotion et il prôna la « technique active », l’expéri­mentation vécue dans l’ici et maintenant de la séance, l’approche globale et polysémique, l’implication affective humaniste, voire « maternante » du psychothérapeute, notamment auprès des cas lourds borderlines — que Freud refusait en analyse.
Il apparaît ainsi comme l’un des précurseurs des psychothérapies humanistes, et notamment de la Gestalt-thérapie. Ses idées semblent avoir été transmises à Perls à travers plusieurs de ses superviseurs, directement analysés par Ferenczi.

Ferenczi, le précurseur

Ce colloque international réunit des psychanalystes et des psychothérapeutes de diverses obédiences et de plusieurs pays. Nous cherchons ainsi à souligner les apports mutuels de ces disciplines et surtout leur riche potentiel de créativité , depuis près d’un siècle.
Au moment même où vient de paraître en France Le Livre noir de la Psychanalyse 1 , dénonçant — de manière très tendancieuse — ses faiblesses historiques, il me paraît particulièrement opportun de souligner la richesse de ses apports culturels et thérapeutiques et le foisonnement permanent de ses nombreuses branches.
Je m’intéresserai aujourd’hui à Sandor Ferenczi , trop longtemps méconnu en France, et donc nous verrons combien il a contribué à semer les graines des futures approches dites humanistes .
J’avais moi-même longuement baigné dans la mouvance psychanalytique freudienne traditionnelle pendant 20 ans (de 1950 à 1970), avant de rencontrer la Gestalt-thérapie, et dès mon premier ouvrage sur la Gestalt-thérapie 2 , publié en 1987, je consacrais déjà près de 15 pages à Sandor Ferenczi — que je n’avais pas hésité à baptiser à l’époque « le grand père de la Gestalt ».
Depuis une quinzaine d’années, j’ai pu lire un certain nombre d’ouvrages complémentaires de Ferenczi et sur Ferenczi, ainsi qu’une partie de l’abondante correspondance qu’il a entretenue avec Freud, avec Groddeck, avec Rank, et plusieurs autres 3 . Mon opinion n’a fait que se renforcer, et je voudrais donc, dans cette brève communication, souligner en quoi Ferenczi m’apparaît, de plus en plus, comme un des précurseurs de notre approche , bien que son influence sur Perls n’ait pas été directe — comme celles de Reich ou de Karen Horney.
Freud a entretenu avec Ferenczi une correspondance intime, quasi permanente pendant 25 ans (1 236 lettres), le considérant comme son fils spirituel 4 , son « Grand Vizir 5 secret », son dauphin et unique successeur potentiel. Il disait de lui qu’il était « le frère aîné sans reproches », que ses contributions cliniques étaient de « l’or pur », « qu’il a fait de tous les analystes, ses élèves ». Wladimir Granov 6 va plus loin et déclare que « Ferenczi est bien celui qui a fait la psychanalyse ». Michael Balint, de son côté, estime que « Ferenczi avait au moins 25 ans d’avance sur les théorisations de son époque », et en effet, je constate pour ma part, que 25 ans avant Perls, le promoteur officiel de la Gestalt, il avait déjà posé les jalons de la future Gestalt-thérapie !
Comme lui, il était un génie, avec de nombreux traits borderline , « n’acceptant ni limites, ni contraintes, prêt à toutes les expériences » (Sabourin, 1985).
Je ne vais pas retracer ici l’ensemble de sa biographie — que chacun peut trouver détaillée dans les innombrables études consacrées à l’histoire de la psychanalyse.
Je me contenterai de rappeler quelques éléments — qui me semblent directement liés à mon propos — par exemple, son intérêt soutenu et militant pour :
• le corps , l’intonation, les gestes, mimiques et postures non conscientes ;
• les émotions et leurs manifestations psychosomatiques (« bio-analyse », 1923, ancêtre de la psychosomatique) ;
• le concept d’introjection (1912) ;
• le présent de la vie de ses patients et l’ici et maintenant de la séance ;
• le contre-transfert de l’analyste (1900, 1908) et le partage de son propre ressenti avec son patient (1918, 1924) ;
• la relation authentique, égalitaire, entre patient et thérapeute (« analyse mutuelle », 1924) ;
l’analyse du futur analyste 7 (qu’il a baptisée « la 2 e règle fondamentale ») 8 et la supervision ;
• la sympathie chaleureuse vis à vis des patients (« technique d’affection maternelle », 1932) ;
• l’ouverture de la psychothérapie à des cas lourds , profondément régressés, borderlines ou psychotiques ;
• la reconnaissance des droits des homosexuels (1905) ;
• l’ouverture de la psychanalyse aux non-médecins analyse profane », 1926) ;
• la « technique active », 1926, avec recours éventuel à des injonctions paradoxales (« prescription du symptôme » pour l’amplifier jusqu’à l’absurde) ;
• « l’élasticité technique » (1920, 1927), avec méfiance face à toute théorie rigide ou généra­lisée (qu’il qualifiait de « délire scientifique », 1932) ;
• l’importance des symboles et leur ontogenèse (1913) ;
• l ’expérimentation vécue du processus évoqué, dans l’ici et maintenant de la séance (1920).
Nous voyons que l’esprit de la Psychothérapie humaniste et tout spécialement de la Gestalt-thérapie n’était pas loin.
Rassurez-vous : je ne vais pas reprendre et détailler chacune de ces attitudes, mais en illustrer rapidement quelques-unes seulement.

Besoin de chaleur et d’amour parental

Sandor Ferenczi est né en Hongrie, en 1873 : il est donc de 17 ans le cadet de Freud, de 20 ans l’aîné de Perls et de 29 ans, celui de Rogers. Je retiens de son enfance et de son adolescence que son père est mort lorsqu’il avait 15 ans, tandis que sa mère a mis au monde 12 enfants… avant de sombrer dans une dépression profonde !
Les deux parents étaient engagés dans la vie intellectuelle, militante et politique (ils ont dirigé une imprimerie-librairie, et la mère était présidente de l’Union des Femmes juives de Budapest), mais ils étaient très réservés sur le plan affectif et sexuel : dans la famille, il n’y avait aucun contact physique et on ne parlait jamais du corps , du sexe, ni des émotions.
Tout au long de sa vie, Sandor sera obsédé par un besoin de tendresse et d’amour parental (Barande, 1972). Il sera à la recherche à la fois d’une reconnaissance paternelle et d’un contact maternant et chaleureux.
On retrouve chez un certain nombre de psychothérapeutes humanistes cette proximité chaleureuse et « maternante » — que l’on oppose parfois à la distance, froide et « paternelle » de l’approche psychanalytique traditionnelle.

Contre-transfert et polysémie

Dès 1900, huit ans avant sa première rencontre avec Freud, Ferenczi publie « Deux erreurs de diagnostic » où il évoque des « phénomènes psychologiques mal connus », qui ne sont autres que la perception du contre-transfert du thérapeute — lequel, plusieurs années plus tard, posera tant de problèmes à Freud.
« En psychanalyse classique, l’analyste était attentif à alimenter le transfert du patient (« névrose de transfert »), tout en s’efforçant de contrôler au maximum son contre-transfert. En Gestalt, à l’inverse, le thérapeute s’efforce de limiter le transfert du client, tout en étant attentif à exploiter délibérément son contre-transfert , notamment par une awareness permanente à son propre ressenti émotionnel et corporel, en écho au comportement verbal ou gestuel de son client. » (Ginger, 1987).
Ferenczi approfondira ce thème lors d’une conférence, en 1918, au Congrès de Budapest, sur « La maîtrise du contre-transfert », conférence qualifiée « d’or pur de la psychanalyse », par Freud.
La « 2e erreur » était de penser à une cause unique des troubles. Ce thème de la polysémie de tout symptôme ou comportement sera largement exploité par les Gestaltistes. Tout phénomène a des causes multiples — passées et futures — en interdépendance systémique, et seule une vision d’ensemble , permettra d’en soupçonner la richesse. C’est une loi fondamentale de la Gestalt- théorie que « le tout est différent de la somme de ses parties » : le contexte est aussi important que le texte.
Ferenczi écrit : « La technique de traduction a donc oublié, au profit de la traduction juste du détail , que le tout , c’est à dire la situation analytique du patient comme telle, possède également une signification, et même la plus importante : c’est toujours la situation d’ensemble qui donne la bonne interprétation de détail des parties traduites… » 9 .
Nous sommes encore en pleine Gestalt — où l’action ne peut être séparée de son champ.

Le corps, les émotions, l’expérimentation en séance, la « technique active »

En 1920, au Congrès de La Haye, Ferenczi relate comment il a enjoint à une pianiste croate de chanter en séance , laissant libre cours à ses gestes spontanés , ce qui lui a permis une prise de conscience de son désir de plaire ; après quoi, il lui a proposé de jouer au piano, lui offrant ainsi de revivre son angoisse dans l’ici et maintenant de la séance. Il encourage donc le patient à développer ses symptômes ( amplification gestaltiste) et à les exploiter, au lieu de les ignorer.
De même, il interdit le coït à un impuissant ( prescription du symptôme ) : ainsi, son angoisse n’est plus dans l’impuissance, mais dans la crainte de ne pouvoir contrôler son désir !
Il souligne que « l’élasticité des techniques », adaptées à chaque cas, devrait raccourcir la durée des cures.
Tout cela me semble préfigurer la philosophie de la Gestalt-thérapie — qui valorise le droit à la différence et l’originalité irréductible de chaque être humain.
Dans son ouvrage écrit en 1923, en collaboration avec Otto Rank, « Perspectives de la psychanalyse », il critique sans égards les psychanalystes qui « se cramponnent avec beaucoup trop de rigidité à des règles techniques dépassées […] avec un fanatisme de l’interprétation ».
Voici quelques passages que j’ai relevés dans ce livre, passages qui auraient fort bien pu être écrits par Fritz Perls :
• « Tant de choses dans l’analyse dépendent de petits détails, de faits apparemment anodins : comme l’intonation, les gestes, la mimique ».
• « Les analystes ont négligé le présent du patient, outre son passé et son avenir ».
• « On a été conduits à une exclusion assez artificielle de toute humanité ».
• Il est temps d’élaborer une « thérapie des normaux ».
• « Comprendre n’est pas guérir ».
• « Les difficultés techniques ont surgi d’un trop grand savoir de l’analyste ».
• « Le savoir ne suffit pas : il faut une expérience vécue du processus ».
• Il importe de « revivre les traumatismes, à travers une expérience vécue , les ressentir, les expérimenter, et non pas les expliquer ».
• Il faut « remplacer les processus intellectuels par des facteurs vécus affectivement. »
Dans « Neo-catharsis » (1929), Ferenczi écrit :
• « Les fragments du passé sont revécus, avec l’analyste comme pont entre le patient et la réalité ».
• « Certes, Freud a raison de nous enseigner que l’analyse remporte une victoire lorsqu’elle réussit à remplacer l’agir par la remémoration ; mais je pense qu’il y a également avantage à susciter un matériel agi important, qui peut ensuite être transformé en remémoration ».

L’approche humaniste

Dans sa « conférence-testament » de 1932, « Confusion de langue entre les adultes et les enfants » , sous-titrée « Le langage de la tendresse et de la passion » — conférence qui fit scandale au Congrès de Wiesbaden — Ferenczi évoque « l’hypocrisie des psychanalystes qui restent froids et intellectualisants devant des patients en pleine crise ».
Dans son Journal clinique , en 1932, sous le titre « Qui est fou, nous ou les patients ? », il écrit :
• « Freud se réfugie dans une crispation théorique exagérée ».
• « Il n’analyse que les autres et pas lui-même ».
• Et Ferenczi ajoute : « Je dois me souvenir de certaines remarques que Freud a laissé tomber en ma présence » :
« Les patients, c’est de la racaille ; ils sont du matériel pour apprendre ».
« Nous ne pouvons les aider, de toute façon ».
« Je n’aime pas ces malades. Une intolérance surprenante qui fait de moi plutôt un mauvais psychiatre ».
« Il est bien possible qu’avec les patients, vous réussissiez mieux l’analyse que moi. Je n’y vois aucun inconvénient. Je suis saturé de l’analyse comme thérapie ».
« Les problèmes thérapeutiques ne m’intéressent pas beaucoup ».
Il avait d’ailleurs proposé à Freud — qui souffrait de problèmes cardiaques — de l’analyser : « Je trouve réellement tragique le fait que vous, qui avez donné la psychanalyse au monde, trouviez, en fait, si difficile de vous confier à quelqu’un. Si vos plaintes cardiaques continuent, je viendrai chez vous pour plusieurs mois et me mettrai à votre disposition, en tant qu’analyste – naturellement, si vous ne me mettez pas à la porte »… Mais Freud refusa (1926).
Ferenczi, lui, s’interroge :
« On en vient finalement à se demander s’il n’est pas naturel, et aussi opportun, d’être franchement un être humain doué d’émotions , tantôt capable d’empathie, tantôt ouvertement irrité ? Ce qui veut dire abandonner toute technique et se montrer sans fard ».
A force de prôner la self-disclosure (dévoilement de soi), chère à beaucoup de thérapeutes humanistes des années 70, Ferenczi, dans son souci d’honnêteté et de partage égalitaire, en vient à proposer, puis à expérimenter l’analyse mutuelle où il avoue à ses client(e)s ses fantasmes, ses faiblesses, ses hésitations et ses erreurs, dépassant de beaucoup l’implication contrôlée (Ginger, 1987) 10 gestaltiste.
Sexualité et homosexualité
Ferenczi se dévoue sans limites et cherche à répondre à la quête d’amour exacerbée de certaines de ses clientes borderlines : ainsi, il n’hésite pas à jouer la « tendre mère » (Freud, 1932) et se rend chez une cliente (Elisabeth Severn) deux fois par jour, pour des séances de 4 à 5 heures chacune, parfois même le soir ou la nuit, y compris pendant ses vacances… et souvent, gratuitement ! Il laisse la cliente l’embrasser aussi souvent qu’elle en a envie 11 !… (in Haynal, 1996).
Bien entendu, Freud condamne vivement ces pratiques, sa « fureur de guérir » et l’érotisation de ses relations — même si elles semblent à caractère apparemment « maternel ».
Il convient cependant de préciser, à sa décharge, que Ferenczi acceptait des clients gravement atteints, très régressés, borderlines ou psychotiques — que Freud refusait systématiquement… et lui adressait ! (Bourdin, 2000).
Notons qu’à cette époque, il n’était pas explicitement interdit à un(e) psychanalyste d’avoir des relations sexuelles avec un(e) patient(e). Malgré ses mises en garde, Freud lui-même avait admis : « Si l’analyste et sa patiente sont tous deux libres, il n’y a pas d’inconvénient à ce qu’ils convolent en justes noces » (Freud, Observations sur l’amour de transfert , 1915). De nombreuses liaisons se sont d’ailleurs développées chez la plupart des analystes des deux sexes. Le premier Code officiel de déontologie , instaurant l’obligation de l’abstinence sexuelle avec les patients date de … 1983 ! ( American Psychoanalytical Association ).
De même, pendant les premiers temps, le secret des entretiens était loin d’être garanti : ainsi Freud, Ferenczi (et les autres) se tenaient souvent au courant des confidences de leurs clients. C’était d’autant plus complexe qu’à cette époque, il était courant d’analyser sa propre femme, ses enfants, voire ses parents, ainsi que ses amants ou maîtresses. Une « transparence » très insécurisante s’était donc développée parmi les premiers disciples. On peut noter, au passage, un taux de suicide particulièrement élevé de 6 % parmi les 200 premiers analystes (dont : Eugénie Sokolnika, fondatrice de la Société Parisienne de Psychanalyse (SPP) et Clara Happel, l’une des analystes de Perls) 12 .
Quelques décennies plus tard, à l’occasion du premier développement des approches humanistes, on a assisté, à nouveau, à une libéralisation des règles, allant parfois jusqu’au laxisme.
Les relations des premiers fondateurs de la psychanalyse — tout comme de la Gestalt-thérapie — étaient marquées par une atmosphère d’homosexualité , généralement sublimée , mais souvent évoquée. Ainsi, Jung — victime pendant son enfance d’un abus sexuel par un homme qu’il vénérait — justifie, en partie, sa rupture avec Freud dans une lettre : « J’ai peur que vous trahissiez ma confiance… J’ai été échaudé. Je crains votre action sexuelle sur moi ».
Par la suite, Ferenczi — qui avait été, lui aussi, abusé par un homme 13 — analyse avec Freud son transfert homosexuel. On a beaucoup écrit sur « le ménage à trois » Freud, Jung, Ferenczi et Freud lui-même confie à Jones, en 1912, « son problème homosexuel non résolu ».
Freud avait souligné que les grands créateurs étaient souvent homosexuels.
Ferenczi, dès 1905, s’engage ouvertement dans un combat politique contre l’exclusion sociale des homosexuels et il estime que « n’étant pas voué à la reproduction, ce 3e sexe est destiné aux progrès de l’évolution humaine ». Il distingue deux types : d’une part, l’efféminé , d’autre part, le viril (comme Platon, Michel-Ange, Léonard de Vinci, Oscar Wilde), et il plaide pour le caractère inné de l’homosexualité. Il s’intéresse à la « biologie du plaisir » ( Thalassa ) et aux connexions neuropsychiques (1922).
Il est inutile de souligner ici le parallélisme avec l’action militante de Paul Goodman et avec le trio initial de la Gestalt-thérapie : Goodman, Perls, Isadore From…
L’analyse « profane »
Ferenczi a fermement soutenu Freud dans son combat permanent et parfois désespéré pour le développement d’une psychothérapie « profane », exercée par des non–médecins . Ainsi, lors d’un séjour aux USA, malgré la vive opposition de la Société psychanalytique de New York , il offre délibérément 25 soirées de séminaires aux « laïques » et 20 soirées aux médecins. Freud lui écrivait d’ailleurs : « Le développement interne de la psychanalyse, contrairement à mes intentions, s’éloigne partout de l’analyse pratiquée par les non-médecins, pour devenir une spécialité médicale, et je considère cela comme fatal pour son avenir ! ».
Ce problème est toujours d’actualité, dans plusieurs pays : pratique limitée aux médecins et aux psychologues 14 , et il menace aujourd’hui, à nouveau, l’avenir de la psychothérapie, en France et en Europe.
Ferenczi soutenait, avec raison, que ce qui importait n’était pas le diplôme d’origine, mais les dispositions naturelles et la formation spécifique, incluant obligatoirement une thérapie personnelle (« 2e règle fondamentale »), suivie d’une supervision .

Une pollinisation croisée

Je ne prétends pas, à travers ces quelques réflexions, que Ferenczi, le précurseur ou le « grand père de la Gestalt-thérapie » ait directement 15 influencé Perls. On sait que ce dernier était avare de ses sources et j’ignore dans quelle mesure il avait effectivement une connaissance détaillée des écrits de Ferenczi. Dans son premier livre « Le Moi, la Faim et l’Agressivité », paru en Afrique du Sud en 1942 16 , Perls cite Freud 65 fois (essentiellement pour s’y opposer), Reich 17 fois, Karen Horney 5 fois, Rank 3 fois et Ferenczi… 2 fois seulement !
Quoi qu’il en soit, un grand nombre d’idées et d’hypothèses circulaient — explicitement ou implicitement — au sein de la communauté psychanalytique, au cours de ces années d’émergence d’un nouveau paradigme de pensée.
Il en est de même d’ailleurs, actuellement encore, parmi la communauté psychothérapeutique, et je me réjouis à l’idée que chaque semence enrichit le patrimoine commun, dans une pollinisation croisée, assurant la fécondité des jardins internationaux voisins et fleurissants de la psychanalyse et des psychothérapies humanistes.

Bibliographie (21 ouvrages principaux consultés)

• Barande Ilse (1972). Sandor Ferenczi , Paris, Petite Bibliothèque Payot.
• Borch-Jacobsen Mikkel (2001). in History of Psychiatry , vol. II, n° 41, mars 2001,
et in Ethnopsy, n° 3 (oct. 2001).
• Borch-Jacobsen Mikkel (2002). Folies à plusieurs, Paris, Les empêcheurs de penser en rond.
• Bourdin Dominique (2000). La psychanalyse, de Freud à aujourd’hui, Rosny, Bréal.
• Fages J. Baptiste (1991 ). Histoire de la psychanalyse après Freud, Toulouse, Privat.
• Ferenczi Sandor (1974). Psychanalyse III (1919-1926), Paris, Payot.
• Ferenczi Sandor (1982). Psychanalyse IV (1927-1933), Paris, Payot.
• Ferenczi Sandor (1985). Journal clinique (jan.-oct. 1932), Paris, Payot.
• Ferenczi Sandor et Rank Otto (1923) : Perspectives de la psychanalyse, Paris, Payot.
• Ferenczi-Groddeck ( 1982). Correspondance (1921-1933). Paris, Payot.
• Gay Peter (1988). Freud, a Life for Our Time, New York, Norton.
Trad. Freud, une vie , Paris, Hachette,1991.
• Ginger Serge et Anne (1987). La Gestalt, une thérapie du contact , Paris, H.& G, 7e éd. 2003.
• Ginger Serge (1995). La Gestalt : l’art du contact , Paris, Guide poche Marabout, 6e éd. 2003.
• Haynal André (1996). La psychanalyse : 100 ans déjà. Genève, Georg.
• Lorin Claude. Le jeune Ferenczi, Paris, Aubier.
• Meyer Catherine & 40 auteurs de 10 pays (2005). Le Livre noir de la psychanalyse . Paris, Arènes, 830 p.
• Meyer Richard (1992). Reich ou Ferenczi. Paris, Hommes et perspectives.
• Nasio J.D.(1994). Introduction aux œ uvres de Freud, Ferenczi, Groddeck, etc. (p. 89 –149).
• Rodrigué Emilio (1996). Freud, le siècle de la psychanalyse , Buenos-Aires.
• Roudinesco Elisabeth, Plon Michel (1997). Dictionnaire de la Psychanalyse , Paris, Fayard.
• Sabourin Pierre (1985). Ferenczi, Paladin et Grand Vizir secret, Paris, édit. universitaires.
• Tassel Jean-Max (communication à l’IFCC, Strasbourg, le 8 déc. 2001).

Pour plus de détails , voir Bibliographie de 14 pages d’œuvres et articles sur Ferenczi,
in Revue française de psychanalyse , N° spécial sur Ferenczi , PUF, 1995.

1 Meyer Catherine et 40 auteurs de 10 pays (2005). Le Livre noir de la psychanalyse . Paris, Arènes, 830 pages.

2 Ginger S. (1987 ). La Gestalt, une thérapie du contact. Paris, Hommes & Gr., 7e éd. 2003, (p. 105, 123-129, 284)

3 Certains documents des Archives de Freud , ne seront accessibles qu’en 2020, d’autres en 2113 seulement !

4 Il souhaitait même le voir épouser l’une de ses filles et l’appelait volontiers « mon cher fils ».

Ils ont effectué de nombreux déplacements et des séjours de vacances en commun, pendant plusieurs années, en Autriche, en France, en Italie…

5 Chez les Turcs, le « Grand Vizir » est le Premier Ministre.

6 Granov Wladimir (2001). The Future of the Œdipial Complext , St. Petersburg, East European Psychoanalytic institute.

7 A cette époque « héroïque », les analyses étaient souvent très courtes : quelques mois, quelques semaines, voire quelques jours… ou quelques heures ! Ferenczi avait bénéficié de deux fois 3 semaines d’analyse (quotidienne) par Freud, mais il avait par ailleurs, beaucoup partagé de son vécu et de ses rêves, durant leurs promenades de vacances et leurs échanges épistolaires. Rank, quant à lui, n’avait jamais bénéficié d’aucune analyse personnelle. Freud lui en a imposé quelques heures, sur le tard. Reich dirigea le séminaire de technique psychanalytique de l’Institut de formation des psychanalystes, dès l’âge de 27 ans (de 1924 à 1930), à la demande de Freud lui-même, bien avant d’avoir entamé une analyse lui-même.

8 La 1 re règle fondamentale était celle de l’association libre.

9 Perspectives de la psychanalyse , Congrès de La Haye, 1920.

10 « Tout ce que je dis, je le pense ou le ressens ; mais je ne dis pas tout ce que je pense ou ressens : uniquement ce qui me paraît utile au client , en ce moment » (Ginger, 1987).

11 Winnicott, de même, prenait éventuellement ses clientes dans les bras ou prolongeait une séance pendant 3 heures (Bourdin, 2000).

12 Voir Roudinesco et Plon (1977). Dictionnaire de la psychanalyse.

13 Puis par deux gouvernantes — ce qui avait développé chez lui « une haine des femmes ».

14 Votée notamment en Allemagne et en Italie et envisagée dans plusieurs autres pays, contrairement à la Déclaration de Strasbourg , contresignée aujourd’hui par 41 pays d’Europe, adhérant à l’European Association for Psychotherapy (EAP), qui représente 120 000 psychothérapeutes professionnels.

15 Mais plusieurs superviseurs de Perls (Landauer, Hitschmann, C. Thompson) avaient été analysés par Ferenczi.

16 et non en 1947 — comme on le voit trop souvent écrit aux USA.

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