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Un voyage, le déplacement en supervision. (Monographie)

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Réjane YVOL

lundi 19 juin 2023

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Monographie pour la certification de superviseur d’équipes de travailleurs sociaux.

Année : 2022-2023,

XXXIII ème promotion.

Un voyage,

le déplacement en supervision.

Réjane YVOL

Institut Européen Psychanalyse et Travail Social,

Montpellier.

Alberto Giacometti, L’objet invisible ou les mains tenants le vide , 1934.

Bronze (1961).

Sommaire

L’histoire et son énigme p. 1

1. De l’espace laissé vide p. 4

La vacuité initiale - Ś ū nyat ā   p. 4

Le manque comme espace intérieur p. 4

Toujours p. 6

L’acte du superviseur p. 8

2. Il y a quelque chose p. 10

Quelque chose sinon rien p. 10

De vouloir le bien à ne rien vouloir, il en tombe quelque chose p. 11

L’espace de la supervision p. 14

3. Qui se déplace ? p. 17

Désir et déplacement p. 17

Vi(e)-de déplacement p. 18

Déplacements et ouvertures en supervision   p. 19

Pour conclure   p. 21

L’histoire et son énigme.

La première fois que j’ai participé à une séance de supervision, c’était lors d’un de mes stages de master en psychologie clinique. Avec l’équipe nous étions sortis des murs de l’institution et avions traversé la ville en tramway pour rejoindre les anciens locaux de Psychasoc. Ensemble nous nous étions déplacés physiquement pour aller voir ailleurs, pour questionner sur une autre scène ce que nous vivions au dedans avec ceux que nous accompagnions, les fameux « usagers » ; les hommes et les femmes, les fous, les non dupes qui nous questionnent tant. J’avais fini par raconter une histoire selon les principes de l’instance clinique en trois temps. Bien qu’assez angoissée au moment de prendre la parole, je me décidais de parler de mon lien à Laurent. J’ai d’abord eu le sentiment d'être écoutée lors du premier temps. Puis dans le second temps, au travers des retours faits par les collègues, j’entendais autrement mon histoire. Enfin, j'avais fini par sentir un déplacement dans mon rapport avec Laurent, lors du dernier temps d’échange libre. Je me sentais plus légère, moins encombrée et peut être plus libre de pouvoir le rencontrer à l’endroit de sa subjectivité ; tout en sachant tout de même que « les voix du seigneur sont impénétrables ». J’en avais gardé l’idée que la supervision, l’analyse de la pratique permet un déplacement, de changer son regard. C’est depuis comme cela que j’en parle sans trop savoir de quel déplacement il s’agit.

Qu’est-ce qui s’était déplacé en moi dans ce temps de supervision ?

Treize ans plus tard, je décide de m’inscrire à la formation « superviseur d’équipes en travail social » proposée par Psychasoc . Comme j’habite aujourd’hui à une petite heure de Montpellier, pour m’éviter la route, j’organise ma semaine de formation entre retours à la maison et nuits sur le canapé d’amis montpelliérains. Je prépare donc, en plus de mes affaires pour la formation, un sac d’affaires de rechanges. Petite, j’ai longtemps préparé un sac d’affaires, pas pour un déplacement professionnel mais pour un déplacement familial. Lors de leur divorce, mes parents avaient décidé que je vivrais un jour chez l’un- un jour chez l’autre, afin de respecter ce qu’ils avaient pensé comme un rapport d’égalité. Cette illusion de totale équité venait, me semble t-il, tenter d’effacer la perte inhérente à toute séparation. Déplacée ainsi d’une maison à l’autre, les événements et émotions faisant, je m'étais également déplacée imaginairement d’une place à une autre. Piégée par ma propre jouissance, je venais là moi aussi tenter d'annuler la morsure symbolique et me maintenir tant bien que mal dans un Œdipe sans castration.

À la majorité, j’ai préparé mon sac pour prendre mon envol, en direction de l’université et des routes du monde. J'attrapais enfin ma liberté. Pour autant, malgré la joie du départ, le moment de préparer mon sac a toujours été une source de tension. J’ai peur d’en oublier, je m’agace sans trop savoir pourquoi, je me crispe, il y a quelque chose qui coince et pourtant je m’y prends des jours à l’avance. J’ai d’ailleurs toujours été étonné par les personnes qui préparent leur sac au dernier moment. Je me souviens encore de ce français rencontré en Inde qui voyageait sans chaussure et avec un petit sac à dos contenant seulement un cahier, un stylo, un tee-shirt et un caleçon, l'essentiel selon lui.

En analyse, j’avais fait un rêve où j’errais dans des rues avec mon sac de voyage vide sur le dos. Soudain je réalise qu’à l'intérieur de mon gros sac il y a un bébé. Je m’inquiète alors que le sac soit vide et que le bébé ne soit pas calé. Bougé par le mouvement du sac alors que je marche il pourrait se faire mal. Je finis par monter des escaliers en colimaçon, inquiète de transporter ce petit bébé dans ce gros sac tout vide. Dans le rêve, le vide de mon sac est inquiétant. J’ai d'ailleurs à plusieurs reprises, avant un grand voyage, rêvé que j’oubliais telle ou telle chose qui m’apparaissait fondamentale, essentielle. Dans l’après-coup je pense que par ces objets je tentais de maitriser l’angoisse que je pouvais ressentir avant le grand saut en pays lointain.

En poussant la porte de la formation, j’attendais d’une certaine manière à trouver des billes, me créer une boite à outils du superviseur, remplir un peu mon sac à savoir pour me rassurer. J’ai au fil des semaines saisi que c’est plutôt à partir du vide, de la coupure incorporée, que je pourrais tenir cette place de superviseur.

Enfant, il y avait sur une étagère du salon chez mon père une toute petite statuette en bois qu’il avait ramenée d’Afrique de l’ouest. Ses départs en Afrique faisaient énigme pour moi car ils semblaient l’animer d’une force vivante là où moi j’échouais à le réanimer. Est-ce cette énigme qui a par la suite motivé mes voyages ?

Lors d’un de ses retours, il avait ramené cette petite statuette qui représentait le visage d’un homme sans corps. Celui-ci avait dans la bouche un autre petit bout de bois qui en bouchait le trou et qui était accroché à son cou par une ficelle. Tant bien que le bout de bois faisait partie intégrante de la statuette qu’il soit dans la bouche ou pendant de son cou. Mon père m’avait expliquée qu’on mettait le bâton dans la bouche quand on n’était pas heureux et qu’on pouvait l’enlever quand le bonheur revenait. A l’époque je n’avais compris la logique. Pour moi ça aurait dû être l’inverse, bouche bouchée serait égale à bonheur et bouche trouée à malheur. Cette statuette m'agaçait car en plus de ne pas suivre ma logique, elle me confirmait mon ressenti c’est-à-dire que mon père n’était pas heureux. Et pire que tout, elle appuyait douloureusement à l’endroit de mon échec, à savoir que je n’y pouvais rien. Ce n’est que plus tard, dans l’après-coup, que je la trouvais salvatrice.

J’ai longtemps détesté les dimanches, signe de la fin du week-end, temps plus stable, avant le retour du mouvement et de l’alternance. Nous sommes donc dimanche ce jour là, veille d’une semaine de formation. C’est la fin d'après midi et je prépare mon sac. Demain j’irai dormir, par choix, dans une autre maison. Dans une tension intérieure, je m’affaire et m’agace. Je m’inquiète d’oublier quelque chose, de ne pas penser à tout ce dont j’aurais besoin, doute des affaires que j’ai choisies, et finis par douter de tout. Je revis l’entre deux.

Lors du premier jour de formation, il nous est demandé de nous présenter. Je m'étonne à dire que cela me rappelle le chemin de l’école. Une autre personne de la formation me le rappellera plus tard dans la semaine. Ce retour après-coup et cette alternance retrouvée me font réaliser que ce qui me rappelle le chemin de l’école c’est surtout de me trimballer avec un sac en plus, un sac en trop. Un sac encombrant, qui contrairement au rêve antérieur, est plein à craquer. Malgré des années de préparation de sac, je continue de m’illusionner qu’en le remplissant, en y mettant un maximum, il ne manquerait peut être rien et que paradoxalement je me sentirais plus légère.

Prise dans l’émotion de ce dimanche en fin d'après midi, je finis par m'énerver envers mon mari. Temps d'arrêt. Suite à cet élan de colère mal dirigée, mal digérée, et au silence qui a suivi s'amorce une nouvelle lecture. Voilà qu’aujourd’hui je réalise que la charge émotionnelle vient d’ailleurs, d’un autre temps. Je pourrais remplir un énorme sac de voyage que je me sentirais toujours anxieuse. La portée émotionnelle semble se rattacher à son point d’ancrage, elle s’arrime, elle reprend sa place. Et c’est dans l’après-coup que s’ouvre une nouvelle question, celle de ma responsabilité. Est-ce que cette place entre deux fait symptôme pour moi ? Est-ce que je m’en soutiens? Ni là, ni là… nie là aussi. Nie la aussi celle que je suis profondément au risque de voir apparaître les ombres dangereuses de mon désir masqué.

Est-ce à partir d’un espace laissé vide que quelque chose peut se déplacer en supervision ?

Qu’est-ce donc que ce quelque chose qui se déplace ?

1. De l’espace laissé vide.

L a vacuité initiale- Ś ū nyat ā .

«  Trente rayons convergent au moyeu mais c’est le vide médian qui fait marcher le char.

On façonne l’argile pour en faire des vases, mais c’est du vide interne que dépend leur usage.

Une maison est percée de portes et de fenêtres,c’est encore le vide qui permet l’habitat.

L’Être donne des possibilités, c’est par le Non Être qu’on les utilise  ». 1

Śū nyat ā  est un terme sanscrit, difficile à définir, souvent traduit par «  vacuité  ». Terme dérivé du mot Sunya  qui signifie «  rien  », «  creux  », «  vide  » et auquel l’ajout du suffixe -tā  en donne la coloration d'expérience. On pourrait le traduire par l'expérience du vide, non pas en tant que néant, mais en tant qu’espace entre une chose et une autre, entre l’être et le non être, «  entre le silence et les volutes du discours  » 2 . Il ne définit donc pas l’absence de quelque chose mais l’espace laissé vide, qui loin de se refermer sur lui-même, ouvre le champ des possibles.

Ainsi, l’homme compose avec la vacuité. Entre l’être et le non être, il traverse le temps de son existence, cet espace délimité par deux points de butées du Réel que sont l'énigme de l’origine à jamais perdue, ces «  états qui précédent l’enfance. Quand on était sans souffle. Quand on était sans lumière  » 3  et l'énigme de la fin qui nous échappe. Après la mort, est-ce le néant?

De cette traversée, il tente d’y trouver du sens au travers du symbolique, par les mots et les histoires qu’il se raconte.

Le manque comme espace intérieur.

«  Je connais fort bien ce creux central autour duquel je tourne  » 4 .

Quel est donc ce point central, espace vide, point aveugle au creux de l’être autour duquel le « je » tourne ?

Au démarrage de sa vie, dans les premiers instants, l’ infans  vit dans une relation fusionnelle avec l’Autre, représenté par un autre qui s’occupe de lui, la mère ou son substitut. Dans une totale disponibilité, l’entourage du bébé s’assure qu’il ne manque de rien. Ce temps de symbiose nécessaire offre au nourrisson une forme de continuité avec l’état de complétude qu’il vivait in utero . À ce moment, sa nouvelle vie en tant que corps différencié est sous-tendue par le principe de plaisir. Ainsi, choyé et bien nourri, le bébé laisse aller son corps tout entier dans les bras maternels, bercé par le sentiment de plénitude.

Or, Lacan dit que l’homme naît deux fois, une fois en tant qu’être vivant et une fois en tant qu’être parlant. Car le petit d’homme  baigne dans un bain de langage qui lui pré-existe. Bien avant sa naissance il a été parlé, désiré ou pas, on lui a choisi un nom. Il est inscrit dans le désir des parents, dans le désir de l’Autre, dont il devra par la suite se séparer pour engager son propre désir dans la parole. Dans les soins prodigués, l’autre, qui s’occupe de lui, lui parle et tente de traduire ses besoins, articulant le champ pulsionnel à celui du langage. Ainsi peu à peu, dans son rapport à l’Autre, les cris du nourrisson s’instituent en demande. Mais voilà que cet autre qui entend l’appel répond à côté ou diffère la réponse, ouvrant dans ce ratage un espace entre le besoin et sa satisfaction immédiate ; et distille dans le même temps les prémisses du principe de réalité.

Cette entrée dans le langage marque et organise l’être du sujet autour d’une perte, celle de la jouissance primordiale du corps, et pousse en avant son désir de retrouver La chose- Das Ding , l’objet, qui pourrait le combler et qui reste inatteignable. Ainsi pris dans le champ de la parole et du langage, l’enfant naît comme « parlêtre ». En tant que sujet, il ne peut qu’être représenté et consentit à la perte car «  le mot n’est pas la chose  » 5 .

«On peut dire que le langage produit une négativation de jouissance, négativation parce que la parole implique une incomplétude, (…), ce que je dis n’est jamais tout à fait ce que je voudrais dire, ce que l’autre entend n’est jamais tout à fait ce que j’ai voulu dire, un manque persiste et ce manque n’est pas dû à la mauvaise volonté de l’un ou de l’autre, il est de structure». 6

 

Plus tard, sous l’effet de la castration, temps structurant pour le sujet, l’enfant comprend qu’il n’est lui même pas tout pour l’Autre. Le complexe de castration se fonde sur la réponse que les enfants se donnent quant à l'énigme de la différence des sexes. Il est étroitement lié au complexe d’Œdipe, et «  plus spécialement avec la fonction interdictrice et normative de celui-ci  » 7  .

Le mot inter-diction pointe bien que ça se passe dans l’inter-dit du désir maternel, en tant que le Nom-du-père en est la métaphore. Le complexe de castration est donc lié à la Loi symbolique qui oriente le désir vers un ailleurs, vers un autre objet, et scelle le pacte social dans l’inter-dit de la jouissance. Le sujet parlant accepte la perte de l’objet de sa jouissance en même temps qu’il a-borde cet espace laissé vide au travers de sa parole et de son désir et qu’il y gagne les fondations de sa future inscription sociale.

Ce manque, manque-à-être originel lié au manque-à-avoir du fait du complexe de castration, s’il n’est pas bouché comme dans la psychose ou comme pour la petite statuette en bois, me semble être ce point central autour duquel le jeu du désir et des sublimations de l’être vont pouvoir s’articuler.

Car au final, il manque toujours quelque chose chez le sujet, ce qui à la fois est source de souffrance et déclencheur de sa dynamique désirante ; «  un seul être vous manque et tout est dépeuplé  » 8 .

De ce manque, la logique capitaliste en a fait son fond de commerce, soutenant l’illusion que par l’avoir l’homme serait comblé, alors que le manque est de structure. On a beau remplir nos sacs d’affaires, nos maisons d’objets, nos téléphones de photos, il y a toujours un reste insaisissable, une sensation de vide au creux de l’être qui persiste et qui fait que ça laisse à désirer.

Toujours...

L’un des enseignements de la petite statuette africaine, au-delà du fait qu’on ne fait pas le bonheur des uns et des autres, ce qui est déjà un grand enseignement en soi, est que justement le bonheur advient par l'acceptation du manque. L’espace vide de la bouche n’étant plus bouchée, les mots peuvent enfin sortir et le désir s’y articuler. «  C’est plein de disputes un bonheur  » 9 . Et voilà que les mots se déplacent de l’un à l’autre, on se parle, on se rate et on recommence encore et en corps avec nos bouches ouvertes et nos corps frémissants à essayer de se dire et de se comprendre.

Combien d’années m’aura-t-il fallu pour comprendre que de remplir à craquer un sac n’efface en rien le vide initial qui le constitue ? Que le masquer d’illusions n’efface pas la peur de manquer?

Dans la logique du Tao, nous pourrions continuer l’idée en disant que c’est du vide que le sac tire son existence. Ainsi, à l’instar de la roue, du vase ou de la maison, c’est à partir du vide initial qu’il contient que le sac permet de déplacer un objet. Et pourtant...

Dans le premier jet de ce travail d’écriture, après lectures, temps de réflexions et grignotages intempestifs, je finis tant bien que mal à dégager deux parties du travail. Il me semble que j’aborde le vide constitutif du sujet parlant et l'instance clinique comme travail de séparation, réhabilitant de l’espace entre le conteur et la personne dont il parle alors qu’ils sont englués dans le transfert. Il me semble que d’une certaine manière je tente de trouver quelques réponses à la question. J’envoie par mail ce premier jet à notre responsable de formation Joseph Rouzel et prépare de nouveau mes affaires pour passer deux jours à l'extérieur de chez moi, dans une autre maison (tiens ?). J’espère trouver dans cet ailleurs un peu d’espace pour continuer d’avancer sur le chemin de la question car le temps passe et l'angoisse de ne pas finir à temps pointe son nez. J’avais en tête de voyager au travers des concepts de transfert et d’entre-deux. J’idéalisais qu’en arrivant je trouverais la réponse de Joseph et que celle-ci me motiverait davantage à m’engager dans «  la dernière ligne droite  » comme disait ma mère avant un examen. Je tentais de contrôler à minima la situation.

Arrivée dans cette autre maison, je déballe mes, encore trop nombreuses, affaires et je pars faire quelques courses pour ne « manquer de rien » pendant ces deux jours. Avant de me remettre au travail, j’ouvre ma boite mail et par chance les choses se déroulent comme je l'imaginais, il y a une réponse de Joseph. Quelle fut ma surprise de lire que de son point de vue les concepts initiaux n’étaient pas à minima définis. Qu’ils étaient çà et là dans le texte mais que dans un sens ça manquait de structure. Malgré les encouragements dans la fin de sa réponse, je me sentie désemparée et tentée avec difficulté de réorganiser mon texte . Il est vrai que je n’avais pas vraiment de chapitre défini mais (est ce là un point de résistance ?) je trouvais que dans le texte certaines grandes lignes se dégageaient. J’eus envie de laisser les choses en plan, fermer la baraque, merci au revoir, rentrer chez moi.

Qu’est-ce que je fous là ?

Mes proches me manquent et je n’arrive à rien. Tant pis…je vais faire autre chose. Mais quand même, ça insiste ! Mon désir est bien accroché. J’ai envie de le faire ce travail d’écriture, d’aller au bout, même si je sais que le bout n’est que le bout d’une fin. C’est sans fin l'histoire. J’ai finalement tourné, viré , lu des bouts de texte de Lacan, pris ma voiture pour aller acheter des cigarettes (alors que je ne fume plus), grignoter par ci par là, lu d’autres monographies pour pallier un peu l’angoisse ; peut être pour ne pas trop subir le vif du sujet : la coupure. Je crois que je devrais reprendre une tranche d’analyse...

L’acte du superviseur.

En tant que superviseur, il ne s’agit donc certainement pas de boucher les trous, ou pire de se faire soi-même bouche trou, mais bien de maintenir un espace vide où peut se déployer une pensée vivante. Mais comment le superviseur réhabilite et maintient-il l’espace vide ?

« Il faut à la fois être partie prenante dans le discours du patient (supporter le transfert et le partage qu’il implique ), assumer cette capture partielle et pouvoir s’en dégager pour en transmettre quelques traces qui opèrent  » 10 .

Le travail du superviseur démarre dès l’analyse de la demande. Ce temps nécessaire permet de définir l’objet de travail, en indiquer le cadre et permettre la mise en place de la dynamique transférentielle. Il pose les bases pour que ce temps à part, hors temps du quotidien, puisse faire ouvertures et ventilations pour les professionnels. Qu’il devienne un espace ouvert où la pensée puisse circuler et où chacun puisse s'engager subjectivement dans la création d’un savoir à plusieurs.

C’est en effet dès la demande, parfois même en amont, que le transfert s’engage avec le superviseur. On fait appel à telle ou telle personne, car on lui suppose un savoir. La demande s’adresse donc plus au Sujet Supposé Savoir qu’à la personne en elle-même. Elle s’adresse à celui ou celle auquel nous supposons un savoir sur l'énigme des métiers que Freud qualifie d’impossibles, c’est-à-dire éduquer, gouverner, soigner. Or, toute demande ne peut qu’être déçue car «  derrière la demande de tout objet, dans l’ombre portée du signifiant qui représente le sujet, se profile le manque irréductible de tout sujet  » 11 . En tant que superviseur, «  il s’agit donc de répondre à la demande pour soutenir le manque, pas pour prétendre le combler. Car le manque est le terreau sur lequel le désir s’humanise  » 12 .

Le superviseur endosse donc le costume, il tient la fonction mais ne s’y confond pas. Il assume d’être à cette place, tout en soutenant dans le transfert la place vide du Sujet Supposé Savoir. Il doit bien au démarrage assumer cette place car sinon on ne lui raconterait rien, à quoi bon. La personne qui raconte une histoire en supervision met en avant un manque, un point d’ignorance qu’elle peut souhaiter boucher d’un savoir. Si le superviseur se laisse aller au piège imaginaire de sa fonction, il pourrait être tenter de répondre, de proposer des solutions, voire de déverser son savoir théorique.

Or s’il reste prudent, humble dans son rapport à la perte, il peut soutenir cette place vide et permettre la relance du désir de savoir du coté du sujet et du groupe.

À l’image de Socrate dans Le banquet , il soutient sa posture du kénôsis , invitant par son geste, le professionnel à soutenir son propre désir de savoir ; car «  ce n’est pas la beauté, ni l’ascèse, ni l’identification à Dieu que désire Alcibiade, mais cet objet unique, ce quelque chose qu’il a vu dans Socrate, et dont Socrate le détourne, parce que Socrate sait qu’il ne l’a pas » 13 .

Ainsi, lors d’une séance de supervision, le professionnel- sujet- suppose un savoir au superviseur à qui il s’adresse. Un savoir qui viendrait combler son manque, boucher les trous et effacer la perte constitutive de l’être parlant, soumis à la loi du symbolique. Le superviseur soutient sa fonction d’un entre-deux, entre une présence bien réelle, un engagement dans la relation transférentielle avec le professionnel et le groupe- il ne s’agit pas d’être de marbre ; et une forme de vacuité qu’il soutient au travers de sa posture, ses réponses, ses relances et par le dispositif qu’il porte. C’est dans cet espace ouvert, vivant, que vont pouvoir vibrer les cordes du désir, relançant chez le professionnel le désir de comprendre, de savoir, celui de se lever le matin et d’aller travailler, un peu plus disposé à se laisser surprendre par l’énigme de l’autre.

2. Il y a quelque chose.

Quelque chose sinon rien.

« Dis-moi quelque chose

Et tu m’aiderais à ne pas savoir

À  ne rien comprendre à la pluie

Aux nuages bas aux abeilles noires

Et aux cendres tombées

Oui ne rien savoir ou presque » 14

Le mot chose vient du latin causa qui signifie  « cause » et qui a pris en latin tardif le sens de  res, c’est-à-dire « chose » 15 . Ce déplacement étymologique, la chose, la cause, le rien ( rem , issu de res ) m’amène au concept lacanien d’objet petit ; objet cause du désir, la chose du désir que rien ne peut combler. Ainsi étymologiquement, le mot rien  renvoi à chose  ; ce qui me rappelle une phrase du Tao qui dit que «  si une chose existe son contraire aussi  ».

Le sujet divisé n’existe qu’à être représenté par un signifiant pour un autre signifiant. Ainsi pris dans le champ symbolique du langage, barré de sa jouissance primordiale, il y a un reste ( res -te), un objet perdu qu’il tente d’atteindre par le défilé des signifiants et qui ne cesse de chuter dans l'intervalle entre S1 et S2. Corrélé à la castration, l’objet a- l’objet cause du désir, pousse le sujet dans sa quête, que rien ni personne ne peut combler. Comme dans ce jeu du pousse-pousse où c’est à partir d’une pièce manquante que le joueur va pouvoir déplacer et organiser les cases de façon à voir apparaître l’image ou le mot. L’objet a est «  cette pièce manquante  » 16  qui permet au sujet d’articuler son désir dans son rapport au monde, aux autres et à lui-même. Il est «  unique pour chaque sujet en tant qu’il le divise, cause son désir, l’inscrit dans un fantasme, organise sa jouissance  » 17 . Il est certainement celui qui oriente nos choix, une partie de nos investissements et de nos actions.

De vouloir le bien à ne rien vouloir, il en tombe quelque chose.

Mon premier poste de psychologue je l’ai trouvé dans un Lieu de Vie et d'Accueil pour adultes autistes au cœur des Cévennes. J’y suis encore, cela fait dix ans. Cette histoire remonte au début de ma prise de poste. Elle questionne mon désir, celui qui a orienté mon choix de métier ; ainsi que mon fantasme, celui qui a soutenu ma proposition et sa mise en acte dans cette vignette clinique.

La scène démarre dans la réunion d’équipe hebdomadaire. Nous parlons de Zohra, jeune femme fluette, qui peut être submergée par une explosive violence. Mes collègues sont essoufflés par le quotidien difficile qu’ils partagent avec elle, particulièrement sur le temps de repas collectif qui semble cristalliser la tension chez Zohra mais aussi pour le groupe et pour les professionnels qui l’appréhendent.

En tant que psychologue, j'interviens sur le lieu de façon ponctuelle, dans une présence en pointillée autour des réunions d'équipe, des rencontres familles et d’une journée d’accompagnement mensuelle. Lors de ma première rencontre avec les parents de Zohra, quelques temps auparavant de cette réunion d’équipe, sa mère m’avait expliquée que l’allaitement avait été difficile. Elle l’avait arrêté brutalement alors que Zohra l'avait mordu. Son père continuait en disant que dans toutes les institutions dans lesquelles Zohra avait été prise en charge, les repas étaient compliqués. Bien qu’à son arrivée sur le Lieu de Vie, ils se passaient plutôt bien, c’est-à-dire sans tension palpable, ce temps de partage collectif est au fil des mois devenu difficile, voire impossible.

Face à cette difficulté dont fait part l’équipe et certainement motivée par un fantasme jusqu’alors inconscient d’être une bonne mère, bonne mère nourricière pour Zohra et bonne mère rassurante pour l’équipe, je propose de l’extraire du groupe pour que nous mangions toutes les deux dans une autre pièce. L’équipe accepte et la réunion se termine, il est midi. Je préviens Zohra et nous partons chacune avec notre assiette nous asseoir autour d’une table dans la lingerie.

Zohra semble assez tendue mais s’assied sans taper sur la table, ni crier. Elle se met cependant à engouffrer son repas, en enfournant goulument les aliments dans sa bouche qu’elle avale sans mâcher. Avec ma voix la plus douce (une bonne mère ça a une voix douce…), je lui demande une première fois, puis une deuxième fois de manger doucement. À ma troisième intervention, Zohra me saute dessus. J’ai l’impression qu’elle va me déchiqueter le visage. Je tente de la contenir physiquement, complètement effrayée par ce déchaînement de violence. Je sens que je ne fais pas le poids et je ne sais pas quoi faire. J’ai envie de sauver ma peau et de la laisser en plan mais dès que je m’éloigne c’est contre elle qu’elle dirige sa violence. Elle se met des coups et se griffe jusqu’au sang. Quand je me rapproche pour l’en empêcher elle m’attaque de nouveau et déchire mon gilet en lambeaux. Tout mon être est pétrifié. Au bout de quelques minutes, une collègue vient nous aider, arrêtant ce corps à corps intenable. Je m'effondre en pleurs.

Cette histoire remonte à une dizaine d’année. Je l’ai « mise au travail » dans plusieurs séances de supervision, lors d’une première séance individuelle, peu de temps après l'événement, ainsi que dans une supervision collective lors de l'instance clinique durant la formation. En la racontant, dans l’intervalle répétée entre S1 et S2, entre ce que j’en ai dit et ce qui m’a été retournée, là où ne cesse de chuter l’objet a , s’est éclairé dans l'après-coup mon fantasme resté jusqu’alors caché. Celui d’être une bonne mère et dont la force du désir peut s'avérer dangereuse pour la personne autiste. Cet éclairage m’a permis de me décaler de ce fantasme, ne plus en être aveuglé et retrouver une disponibilité, une ouverture à la singularité de Zohra.

Des années après cette première scène de repas, il y en a eu une autre où c’est Zohra qui est venue me chercher. Ce jour-là sur la route pour me rendre au boulot, je m’étonne à penser que je préférerais qu’elle ne soit pas sur les lieux, qu’elle soit prise en charge ailleurs, dans une autre structure.

C’est une journée de bureau pour moi, je ne suis donc pas à l’accompagnement dans le quotidien mais m’affaire à autre chose, dans une grande pièce de la maison qui fait office de bureau et de chambre de veille. Je mange cependant le midi sur le lieu et descends donc un peu avant le repas pour filer un coup de main. Au moment de mettre la table, ma collègue demande à Zohra si elle souhaite manger hors du groupe, tranquille avec elle. Celle-ci s'approche de nous et chuchote «  Réjane  ». Mon sang ne fait qu’un tour. Ma collègue demande si elle veut manger avec moi au bureau, Zohra répond positivement. J’accepte cette proposition mais, préférant manger dans un lieu ouvert, je propose l'extérieur. Il fait doux, ça sera très bien et honnêtement si je dois m’enfuir, ça sera plus simple. Assez inquiète de la façon dont pourrait se dérouler le repas je ne pipe pas mot. Chacune avec son assiette nous nous attablons et sans vraiment la regarder je lui rappelle à la volée qu’il est temps de manger, nous commençons. D'abord à l’affût du moindre signe de tension, je finis par me calmer et me mets à rêvasser en regardant le jardin. Je rêve à ce qu’elle pourrait faire, à la vie qu’elle pourrait avoir, à ce que nous pourrions faire ensemble et le repas se déroule ainsi, tranquillement. Une fois terminé, je m’étonne de constater que nous venons de partager un repas que j’ai trouvé agréable.

Des années sont passées entre la première scène avec la supervision qui a suivi et la seconde. Il me semble que dans cette intervalle s’est opéré en moi un déplacement dans ma façon d’aborder Zohra. Ce déplacement concerne mon désir, transformant celui de vouloir son bien en celui de ne rien lui vouloir, sous-tendue au démarrage, il faut bien l'avouer, par la peur et donc par celui qu’elle ne me veuille rien non plus ; pourtant je rêve d’elle régulièrement.

J’ai raconté cette seconde scène lors de l'instance clinique en formation. C’est dans l’après-coup, dans une autre scène, que j’ai réalisé que cela a créé un nouveau déplacement dans mon rapport à Zohra, celui de mes affects.

En effet, alors que ces crises régulières ont tendances à me crisper, voire m’angoisser, angoisse qui se loge dans mon corps, me donne envie de vomir et me fait perdre pieds, j’ai été surprise de la façon dont la tension de Zohra a résonné en moi ce jour-là.

Il est bientôt midi et comme à l’accoutumée, Zohra s’énerve. Dans l’espace commun, proche de la salle à manger, elle crie, cogne sur un meuble avec son poing fermé, disant «  veux pas manger  ». Un accompagnant l’envoie dans sa chambre. Assise sur son lit aux draps jaunes moutardes, elle continue de crier, se cogne la tête contre le mur et pleure sans qu’une larme ne sorte. Je m’approche jusqu'au pas de sa porte afin de veiller à ce qu’elle ne se blesse pas. Pour éviter qu’elle tape sa tête contre une surface dure, je lui dit de se coucher, mais ne lui demande rien d’autre. Très tendue, elle continue de crier mais se couche, tapant sa tête contre son coussin. Contrairement à d’habitude, je n’ai pas les boyaux tordus par la situation, je n’ai pas peur, ni envie de partir en courant, ni envie de l'arrêter à tout prix. Pour la première fois, je suis simplement là, à ses côtés, et j’entends au-delà de la violence son désarroi et à sa souffrance. Au bout d’un moment, elle finit par se calmer, pose sa tête sur son coussin et semble trouver du repos. Je ferme la porte, touchée autrement par sa personne, avec l’envie de mieux la connaître.

Au travers cette scène, je réalise que le déplacement quant à mon désir, qui a pris des années et qui a été reconnu lors de la supervision collective, a eu pour effet de créer un autre déplacement, celui de mes affects. Dans ma rencontre avec Zohra, j’étais d’abord empêtrée dans mes bonnes intentions. Puis terrifiée par sa réaction, j’étais restée figée avec la peur au ventre. Aveuglée par cette peur il m’était difficile, voire impossible, de pouvoir l’accompagner. J’étais empêchée de me tenir dans une présence à ses côtés, sans désir et sans peur.

Finalement, ces deux supervisions m’ont permis de réactualiser la question du «  Qu’est-ce que je fous là  ? », re-mobilisant mon désir d’y être sans ne rien lui vouloir et acceptant d’être surprise et enseignée par Zohra. C’est finalement dans ce moment au pas de porte, dans une clinique à son chevet, qu’il me semble que j’ai pu soutenir cette «  présence proche  », selon l’expression de F. Deligny, malgré sa souffrance et radicale altérité.

L’espace de la supervision.

Le mot espace vient du latin spatium  qui signifie «  arène, étendue, distance, durée  » 18 .

L’espace de la supervision est ce lieu de mise en scène de la scène. Une « arène » d’où le conteur peut revisiter, en tant que spectateur, la scène dont il était acteur. Cet espace de représentation permet une mise à distance, un décollage dans le transfert entre le conteur et la personne qu’il évoque; et au sein du conteur réhabilitant l’altérité en lui-même.

Au cours de la formation, il nous a été proposé d'expérimenter le dispositif de l’instance clinique structuré en trois temps. Trois temps au cours desquels chacun des membres du groupe est invité à prendre la parole, ainsi qu’à se taire pour « mieux écouter ». Le superviseur est le garant de ce cadre où peut se déployer librement l’histoire singulière en train de se raconter. Car dans la supervision, pratiquée avec comme soubassement les principes de la psychanalyse, c’est-à-dire en considérant, en autres, que «  le moi n’est pas maître dans sa demeure  » 19 , l’écoute et la parole sont les outils de la mise au travail.

Dans un premier temps, une personne volontaire est invitée à parler d’une situation problématique ou heureuse avec une personne accompagnée, évoquer quelque chose qui le travaille en somme. Bien que prenant la parole à partir de sa place de professionnel, le conteur, pris dans la rencontre toujours inédite entre lui et un autre, parle aussi de sa place de sujet. Car n’ayant pas préparé son discours à l’avance, il accepte que, par la spontanéité de sa parole, Ça se dise à son insu. D’une certaine manière que ce qui lui échappe parle pour lui.

Pendant ce temps, les autres participants écoutent sans intervenir. Ils sont attentifs à l'histoire racontée ainsi qu’à l’énonciation, à laquelle le superviseur prêtera particulièrement attention.

C’est-à-dire à ce qui se dit de façon plus cachée, au travers de «  la musique du discours  » 20  soit les répétitions, les silences, l’insistance d’un son, l’intonation. Ainsi qu’à ce qui se déploie dans la sphère non verbale, par l’attitude, les mimiques, la façon de bouger, etc. Car le désir inconscient insiste à vouloir se dire et se déplace, sous l’effet de la censure du Moi, sur les lapsus, les éléments de l’énonciation, les événements de corps.

Dans le deuxième temps de l'instance clinique, l’équipe se met au service du conteur et s’engage dans ce travail de mise en mots. A chacun son tour, chaque un des membres du groupe prend la parole pour dire son éprouvé à l’écoute de l’histoire. Dire ce par quoi il a été traversé dans une forme d’association libre avec ce qu’il a entendu. Dans ce deuxième temps, le conteur écoute sans pouvoir intervenir. Le superviseur, lui, dans une écoute à plusieurs niveaux, n'intervient que sur le cadre si cela est nécessaire. En tant qu’«  opérateur de division  » 21 , il assure qu’au sein du groupe chacun puisse soutenir sa parole singulière.

Enfin, le troisième temps de l’instance clinique est un temps de conversation. C’est librement que chacun peut prendre la parole, le conteur, les membres du groupe, ainsi que le superviseur, pour continuer de tisser le fil de la réflexion. C’est aussi le « moment pour conclure », dernier temps des temps logiques de Lacan, où le conteur va pourvoir «  retrouver le quotidien, la personne sociale, le masque  » 22 . C’est en effet dans ce temps d’échange que des pistes de réflexions, des nouvelles ouvertures, des possibilités d’actions vont pouvoir émerger. Mais c’est aussi dans ce temps social partagé que le conteur va pouvoir reprendre ses esprits alors qu’il vient de faire l'expérience d’une mise à nu, d’un dévoilement de son intimité professionnelle.

Les retours après-coup sur son histoire, faits par d’autres qui entendent avec leurs altérités, donnent au conteur une autre lecture et créent en lui-même un décalage. Comme ce geste que l’on fait pour ouvrir un sac plastique, où en faisant glisser les doigts l’un sur l’autre on en décale les deux bords. Cet espace d’entre deux subjectivités est nécessaire pour ne pas coller, s'engluer dans les rouages du transfert. «  L’espace de supervision en permet le dénouage et éclaire la relation sur des chemins jusqu’ici obscurcis du fait du transfert  ». 23

C’est donc dans cet espace de prise de distance que le professionnel peut reconnaître ce qui lui appartient et ainsi dégagé de ce qui l’encombre, il peut s’engager dans ce travail d’élaboration à plusieurs pour tenter de comprendre ce que la personne accompagnée tente de faire entendre. «  Par l’effet de son propre transfert, (…), l’usager, (…), joue et rejoue avec le professionnel et sur lui ses comportements, des modes de relation habituels ; il lui adresse les questions non résolues qui l’encombrent, qui l’angoissent, qui le mettent à mal, en espérant une réponse autre que celle qu’il obtient d'habitude. (…) Ce que vit le professionnel lui permet d’entrevoir ce que cet autre met en scène au sein de la relation et ce qu’il tente de dire par son comportement  ». 24

De ce décalage, le professionnel peut aussi en faire un espace de symbolisation de ses affects. Il peut attraper par un bord le voile de son désir inconscient qui s’est emmêlé dans le transfert, car bien qu’ il ait appris à soutenir sa posture d’une neutralité bienveillante, il vient avec ce qui pousse son désir, avec son fantasme, sa part d'inconscient qui s’embrouille dans la relation à l’autre. En réhabilitant l’espace au sein de lui-même, il peut entrevoir cet «  autre scène  25  restée jusqu’alors cachée, considérer son fantasme et s’en décoller un minimum. Dans le transfert, «  nous avons toujours affaire à ce petit a qui, lui, n’est pas sur la scène , mais qui ne demande à chaque instant qu’à y monter pour introduire son discours dans celui qui continue à se tenir sur scène, fût-ce à y jeter le désordre, la pagaille, en disant Trêve de tragédie, comme aussi bien Trêve de comédie  » 26 . L’espace de la supervision n’est pas le lieu d’une analyse individuelle mais il permet, dans les effets d'après-coup, d’éclairer quelques points aveugles pour le professionnel.

Au travers de sa parole, le professionnel tente d’a-border ce quelque chose qui ne cesse de lui échapper, ce réel de la clinique qui fait trou dans le savoir. Le superviseur, par sa posture et le cadre qu’il porte, soutient le manque et offre un espace où le professionnel peut se déplacer pour regarder autrement cet autre en face de lui, retrouver le désir d’être à ses cotés et construire un savoir-faire ouvert qui ne s’érige pas en vérité.

3. Qui se déplace ?

Désir et déplacement.

D’après S. Freud, le déplacement ( Verschiebung ) constitue un des travail du rêve, qui, sous l’effet de la censure, fait que «  les éléments les plus importants du contenu latent sont représentés par des détails minimes  » 27 . Ainsi, la part cachée du rêve, en lien avec le désir inconscient, advient jusqu’à la conscience du rêveur mais sous une forme déguisée. «  L’accent psychique est transféré d’un élément important sur un autre, peu important, de sorte que le rêve reçoit un autre centre et apparaît étrange  » 28 .

Plus globalement, le déplacement est caractéristique des formations de l'inconscient et se définit par le « f ait que l’accent, l’interêt, l’intensité d’une représentation est susceptible de se détacher d’elle pour passer à d’autres représentations originellement peu intenses, reliées à la premières par une chaîne associative  » 29 . Il y a donc premièrement une perte de lien, une rupture, un détachement entre la représentation inconsciente et sa quantité d’affects. Puis, dans un second temps, la création d’un lien nouveau entre cette quantité d’affects et d’autres représentations peu importantes qui seront psychiquement sur-investies. De son côté, la représentation initiale est soumise au refoulement, elle reste inconsciente, tout en étant liée aux autres représentations au travers d’une chaîne associative. C’est pourquoi S. Freud nous enseigne que l'interprétation du rêve se fait à partir de la parole du patient rêveur, par l’association libre alors qu’il évoque les différents éléments du rêve, même ceux qui paraissent les plus anodins.

J. Lacan a rapproché le déplacement à la métonymie, qui vient du grec métônumia  et qui désigne l’«  emploi d’un mot pour un autre  » 30 . Il dit du désir qu’il est «  métonymie du manque-à-être  » 31 .

Dans la langue française, la métonymie est une figure de style qui permet de créer un raccourci dans le discours en remplaçant un terme par un autre avec lequel il entretient un lien logique sous-entendue. Pour comprendre la métonymie, il est donc nécessaire d’effectuer la connexion entre les deux termes.

Le désir, lui, vient du latin Desiderare et signifie «  souhaiter, regretter l’absence  » 32 . Desiderare est lui même formé de  sidus, terme en lien avec les astres que l’on peut voir dans le ciel qu’en se tournant vers le passé. Il y a donc au cœur du désir une perte, une absence, le manque d’un temps perdu, qui propulse le sujet à chercher dans le champ de l’Autre- lieu des signifiants, au travers de la demande, un objet qui pourrait le combler. Ainsi, en passant par la chaîne signifiante, le sujet inscrit son désir dans la parole. Au travers de sa demande, d’objet en objet, le Tout désiré se fragmente en parties ou métonymies. Car le désir tourne autour d’un vide central, autour d’un rien, de l’objet a , qui fait que la demande rate toujours sa cible.

Vi(e)-de déplacement.

Pour la monographie, il est question au démarrage de partir d’un événement vécu qui touche de près ou de loin à la supervision. Puis c’est en se laissant transporter dans l’écriture de l’histoire qu’apparaît dans l'après-coup une énigme. C’est autour de cette énigme que va se nouer le travail d’élaboration. En relisant l’histoire, dans l’après-coup de ce travail d'écriture, me sont plus clairement apparus les différents points qui touchent au vide et au déplacement.

D’abord le déplacement physique lors de la première supervision en tant que stagiaire et qui me montre les prémisses d’un déplacement subjectif comme effet de la supervision.

Puis le déplacement imaginaire en tant qu’enfant, sous-tendu par le complexe d’Œdipe et le fantasme d’être à une autre place.

Ensuite ce que l’on trans-porte ainsi que ce que l’on perd lors de déplacements. C’est notamment ce qui peut se lire au travers de la difficulté à faire avec la perte, le vide, que ce soit dans le rêve avec l'inquiétude d’un bébé transporté dans un sac trop vide ; dans celui où j’oublie dans mon sac des choses importantes ; ou encore dans la réalité alors que préparer mon sac est une source de tension. Aussi, ma réaction infantile à la statuette africaine, comme objet métaphorique du manque, me semble être les effets d’une non-acceptation de ce manque, pourtant constitutif de l’être humain. Cette réaction pointe également mon refus de céder sur mon désir d’y arriver là où d’autres ont échoué, c’est-à-dire d’une certaine manière de combler les manquements. Ce que l’on retrouve dans l’exemple avec Zohra où ma proposition était sous-tendue par le fantasme inconscient d'être une bonne mère nourricière là où sa mère et les différentes équipes éducatives avaient échoué.

Enfin, dans la dernière partie de l'histoire, alors que je prépare mon sac pour la formation, je navigue en marée agitée, entre doutes, agacement et colère. En m’illusionnant d’un potentiel pouvoir sur le manque, je tente de penser à tout, de tout prévoir, pour ne rien oublier, pour l’éviter. Et forcement je m’agace car le Tout n’est ni prévisible, ni atteignable. Je demande alors à mon mari de m’aider à penser ce tout (à panser le manque) ; demande qu’il ne peut combler ce qui alimente ma frustration et ma colère.

Il me semble que d’une certaine manière, sur certains points, la formation fonctionne comme un travail de supervision. Les retours après-coups des collègues et la dynamique d'introspection dans laquelle elle nous lance permet une prise de recul, un déplacement du regard sur nous-même. Ainsi ce jour-là, en préparant mon sac et en me laissant submerger par cette colère mal dirigée, je réalise que la charge émotionnelle vient d’ailleurs. Je crois d’abord qu’elle me renvoie à un temps antérieur, celui de mon enfance où j’ai chaque jour préparé mon sac. Mais après ce travail d’écriture, il me semble qu’elle vient surtout d’un refus d’accepter le manque structurel, cet espace laissé vide. Aujourd’hui je comprends qu’il s’agit plutôt d'enlever le bout de bois de la bouche de la statuette africaine et d’accepter qu’il manquera toujours quelque chose dans mon sac. Accepter ainsi que l’Autre ( représenté par les autres ou au sein de moi-même) n’y peut rien, qu’un vide subsiste au creux de l’être. Les effets de ce travail d'écriture m’ont permis un déplacement quant au sens que je donne à ce qui m’affecte quand je prépare mon sac, relançant autrement mon désir d’y faire avec le manque, ne plus l’éviter mais apprendre à l’accueillir, et même à le soutenir en tenant la fonction de superviseur.

Déplacements et ouvertures en supervision.

«  Il revient sans doute au superviseur d'amener le groupe de travail jusqu’à cette dimension d'élaboration de la pratique, son déplacement incessant, ses prises dans des figures métonymiques, relançant toujours plus en avant son objet, mettent en scène un vide, une vacuité, un manque qui ne se referment pas. C’est ce qu’on peut faire de mieux dans une supervision que de soutenir ce déplacement sans fin du désir  »  33 .

La supervision en tant qu’espace de re-présentation permet au conteur de prendre de la distance. En racontant l’histoire, en s’engageant dans la chaîne signifiante, le professionnel ne cesse de laisser chuter son objet. «  Cette parole qui déplace les affects, en même temps les détache de leur gangue corporelle  » 34  produit des effets d’apaisement chez le professionnel. Elle lui permet de se décoller de ses sensations pour s’engager dans la construction de sens. Ainsi, dans ce travail à plusieurs, où la parole de chacun peut se déployer et s’entendre au-delà des mots, le sens initialement donné à la situation se transforme et se déplace le long de la chaîne signifiante. Par les différents retours donnés par les collègues durant le second temps de l'instance clinique, le conteur entend d’autres points de vus et peut lui-même se dé-placer pour voir autrement la situation.

Dans la supervision, la parole fonctionne comme tiers entre le professionnel conteur et la personne qu’il accompagne. Elle permet un décollage dans le nouage transférentiel parfois trop serré, étouffant ou trop lâche, entre ces deux personnes. Elle permet une séparation dans l’embrouille du transfert, dans l’embrouille de «  ce qui se transporte entre deux êtres et qui modifie les deux êtres  » 35 .

En analysant son propre transfert, le conteur va pouvoir sortir de la place imaginaire dans laquelle il s’est mis ou a mis l’autre. Ainsi dégagé de ses bonnes intentions, conscient de ce qui lui appartient subjectivement, il devient plus ouvert à la subjectivité de l’autre et peut faire de la place à son étrangeté. Aussi, ce temps d’élaboration collectif permet de construire à plusieurs un savoir pour comprendre un peu mieux, sans l'enfermer, la personne accompagnée. Dans le troisième temps de l’instance clinique peuvent s’élaborer quelques hypothèses qui vont faire ouvertures. Notamment en réfléchissant ensemble à ce que peut être la structure psychique de la personne accompagnée, cela va donner des pistes pour le maniement du transfert. Il ne s’agit donc pas de savoir pré-conçu, de protocole à appliquer après une évaluation standardisée, mais d’une construction à plusieurs, à partir de la parole de chaque un, d’un savoir-faire ouvert à la rencontre qui ré-actualise la question du désir chez le professionnel.

Au travers de sa posture, en s’assumant comme manquant, le superviseur offre un espace d'élaboration de la pratique qui ne cherche pas à trouver des solutions, à boucher les trous de ces métiers impossibles, mais plutôt à ouvrir le questionnement et soutenir la relance du désir chez les professionnels. En effet, dans ce temps à part du quotidien qu’est la supervision, se repose la question de F. Tosquelles «  qu’est-ce que je fous là  ? », invitant le professionnel à re-questionner son désir, le désir d’y être, engagé mais pas noyé, au côté de ce jeune difficile, cet autiste mutique... de toutes ces personnes en souffrance; y être sans (s)avoir préconçu, sans attente étouffante, et pouvoir maintenir vivant le désir de (re)connaitre la personne en tant que sujet singulier.

Dans ce voyage de la supervision qui ouvre les portes d’un possible déplacement subjectif pour le professionnel, l’équipe tient une fonction de contenant pour celui ou celle qui dévoile les tourbillons de ses prises transférentielles qui se sont nouées dans la relation à l’autre. L’équipe soutient le professionnel qui soutient la personne, elle lui offre un «  holding du holding  » 36 . Et le superviseur soutient cette ensemble et trouvera lui-même un espace pour mettre au travail son propre transfert engagé auprès de l’équipe ; et ainsi de suite dans une sorte de mise en abîme, de transfère des transferts.

Pour conclure.

Un peu avant d’arriver à la fin de ce travail, j’ai fait un rêve. Je suis seule dans une grande maison, celle de Joseph qu’il m’a prêtée pour que je puisse travailler l’écrit. C’est une maison plutôt vide, avec de hauts plafonds, de vastes pièces et peu de meubles. Rapidement dans le rêve, Joseph arrive en voiture pour venir me chercher et me ramener chez moi. Je mets longtemps à rassembler mes affaires et sur le pas de porte, au moment de partir, enfin prête avec mes chaussures au pieds et mon sac sur le dos, je réalise que j’oublie quelque chose, je ne sais plus quoi. J’enlève alors mes chaussures et retourne à l’intérieur de la maison récupérer l’objet oublié. La scène se répète à plusieurs reprises. À chaque fois que je m’apprête à sortir, je réalise que j’oublie quelque chose, et quand je retourne récupérer l’objet oublié, j’en perds un autre ; ainsi de suite dans un temps assez long que je commence à trouver dérangeant. La nuit tombe, il se fait tard, nous devons partir et je sens que Joseph s’impatiente. Je m’agace de toujours laisser tomber quelque chose quand je vais en récupérer une autre et je commence à me faire à l’idée qu’il va falloir que je parte sans le tout que j’ai ramené, que je vais devoir faire le choix d’accepter la perte pour pouvoir m’en aller.

Il me semble que ce rêve dévoile ce qui s’est joué en moi au cours de ce travail, ce déplacement qui s’est opéré subjectivement vis-à-vis du manque et de la perte. Il me semble représenter aussi la fonction du superviseur en tant qu’il propose un espace où le professionnel ne cesse de laisser tomber son objet, un espace où il peut revenir pour le chercher tout en en faisant toujours tomber un autre. Ainsi dans la répétition de cette mise en scène, le professionnel peut pressentir la perte à accepter, supporter de faire avec le manque pour composer autrement la partition de son désir.

Je ne savais pas où aller me mener cet écrit alors que je le commençais, un peu comme dans la supervision, comme lorsqu’on s’engage dans l’histoire que l’on se met à raconter. Je n’imaginais pas qu’il m'amènerait sur ce chemin du vide et de la perte, inscrivant l’élaboration de cette pratique dans une forme d’intimité. J’ai d’abord saisi les concepts au travers de leurs contours théoriques, je les ai compris intellectuellement, mais au fil de l’écriture c’est à même le corps que j’en ai saisi les fondements. Aujourd’hui, ce travail m’apparaît comme un voyage, un de ceux où n’ayant pas de point de chute, on se laisse porter, au gré du vent, des rencontres et de ce qui nous touche, on se laisse surprendre, déplacer, parfois dérailler par la rencontre avec l’inconnu. Ces voyages où l’on ne revient jamais exactement le même, de ceux qui nous transforment, où l’on y perd une part de soi en même temps que l’on y inscrit quelques traces qui opèrent sur le reste de notre vie.

Dans le travail social, si tant est qu’on ait un peu d’espace pour pouvoir penser, rêver et se laisser aller, il y a comme un air de voyage. On ne sait pas vraiment ce qu’on va trouver, qui on va rencontrer et l’on navigue en terre inconnue au milieu d’autres qui parlent rarement la même langue que la nôtre. Parfois, certainement pour vaincre la peur, on se blinde, de projets, d’actes éducatifs, de il faut- il faut pas, pour tenter de contrôler un peu la situation, ne pas trop se laisser surprendre, ne pas laisser le bateau naviguer au gré du vent au risque de rencontrer l'étrangeté de l’autre et d’en sentir l’écho à l'intérieur de soi. L’espace de la supervision, en tant qu’espace ouvert, me semble être ce lieu d’échos possible. En se laissant aller au risque de la parole, le professionnel peut ainsi entendre résonner le chant des subjectivités

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Monographie pour la certification de superviseur d’équipes de travailleurs sociaux.

Année : 2022-2023,

Un voyage,

le déplacement en supervision.

Résumé : La supervision crée des effets de déplacements subjectifs pour le professionnel. Par sa posture et le dispositif qu’il porte, le superviseur soutient le manque et offre un espace ouvert où

peut s’écrire le désir du professionnel, celui d’y être sans savoir, engagé dans le transfert sans en être aveuglé.

Mots clés : espace, manque, déplacement, désir.

Rejane YVOL

1  LAO-TSEU, Tao-tô king , Gallimard, 1967, p.22.

2  Enc yclopædia universalis, sur   www.universalis.fr

3  QUIGNARD Pascal, Tous les matins du monde , Gallimard, 1991, p.115.

4  BOUVIER Nicolas, Le vide et le plein , Gallimard, 2009, p.42.

5  FREUD Sigmund.

6  CORON Olivier, « La condition du sujet, c’est le manque », Conférence d’introduction à la psychanalyse,  2018, sur www.ali-rhonealpes.org

7  LAPLANCHE Jean et PONTALIS Jean-Bertrand, Vocabulaire de la psychanalyse , PUF, 2004, p.75.

8  DE LAMARTINE Alphonse.

9  ANOUILH Jean, Antigone , La table ronde, 2002, p.38.

10  SIBONY Daniel, Entre-deux l’origine en partage , Seuil, 1991, p.52

11  ROUZEL Joseph, La supervision d'équipes en travail social , Dunod, 2015, p.172

12  Ibid.

13  LACAN Jacques, Le transfert, Séminaire livre VIII , Seuil, 2001, p.194.

14  NAMUR Yves, Dis-moi quelque chose , Arfuyen, 2021, p.39.

15  BAUMGARTNER Emmanuèle et MENARD Philippe, Dictionnaire étymologique et historique de la langue française , Librairie générale française, 2007, p. 164.

16  LACAN Jacques, L’angoisse, Séminaire livre X , Seuil, 2004, p.161.

17  SCIARA Louis, « En quoi l’objet a  détermine-t-il la pratique clinique », La revue lacanienne  n°15, 2014.

18  BAUMGARTNER Emmanuèle. et MENARD Philippe, Dictionnaire étymologique et historique de la langue française , Librairie générale française, 2007, p. 294.

19  FREUD Sigmund.

20  Comme le nomme poétiquement Isabelle PIGNOLET DE FRESNES.

21  ROUZEL Joseph, La supervision d’équipe en travail social , DUNOD, 2015, p.XL

22  Ibid .

23  Ibid , p.56.

24  DUVAL HERAUDET Jeannine, L’analyse de la pratique, questionner les dispositifs , sur www.psychasoc.com

25  FREUD Sigmund.

26  LACAN Jacques, L’angoisse, Séminaire livre X , Seuil, 2004, p.164.

27  LAPLANCHE Jean et PONTALIS Jean-Bernard, Vocabulaire de la psychanalyse , PUF, 2004, p.118.

28  FREUD Sigmund, Introduction à la psychanalyse , Payot et Rivages, 2001, p.206.

29  LAPLANCHE Jean et PONTALIS Jean-Bernard, Vocabulaire de la psychanalyse , PUF, 2004, p.117.

30  Dictionnaire de l’académie française , sur www.dictionnaire-académie.fr

31  LACAN Jacques, « la direction de la cure et les principes de son pouvoir », sur http://ecole.lacanienne.net

32  BAUMGARTNER Emmanuèle et MENARD Philippe, Dictionnaire étymologique et historique de la langue française , Librairie générale française, 200, p.236.

33  ROUZEL Joseph, La supervision d’équipes en travail social , DUNOD, 2015, p.175.

34  Ibid , p.164.

35  LACAN Jacques.

36  ALLIONE Claude, La part du rêve dans les institutions , Encre marine, 2005, p.107.

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