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Dans quel monde on vit!

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Joseph Rouzel

samedi 24 août 2002

Dans quel monde on vit? Freud nous le rappelle dans "Malaise dans la civilisation" : l'homme est un loup pour l'homme.

Sur le plan socio-économique le développement effréné du capitalisme, a peu a peu laminé les formes traditionnelles de vivre ensemble. Ce qui gagne la planète et ses habitants obéit à cette logique implacable : tout est transformable en marchandise et spectacle. Tout et y compris l'être humain, le corps humain, qui comme chacun sait abrite l'âme, est marchandable: on vole un morceau de corps à un enfant de Bogota pour le refiler à un richard d'Europe. Le spectacle a travers la télé a peu à peu envahi nos modes de communications. Pourvu que ça fasse de l'audience!
Sur le plan subjectif ce qu'on constate, c'est une course effrénée à la jouissance. Ce qu'on appelle pudiquement le bonheur n'est qu'une tentative de jouir sans entrave. Les maître-mots de notre société sont : toujours plus et tout tout de suite. Ce qui va à l'encontre de toute forme d'éducation, que Freud résumait ainsi: il s'agit dans l'éducation d'apprendre à faire le sacrifice de la pulsion pour vivre avec les autres. Autrement dit de la pulsion au désir, tel est le chemin de tout processus éducatif. Cette course au bonheur solitaire, où chacun est renvoyé à sa propre jouissance, est d'autant moins freinée au niveau social, que c'est le fer de lance de la société capitaliste. La jouissance organise le marché. L'horreur économique que dénonce Viviane Forrester, est d'abord cette tentative de notre société d'ériger la course au bonheur comme organisateur social. Et que le plus fort gagne! Malheureusement ça marche mal, et la course au bonheur, l'injonction capitaliste à jouir toujours plus, lorsqu'elle n'est pas régulée par l'État et les lois , produit le pire. Il y a ceux qui jouissent et ceux qui sont privé de tout. Tout ou rien, entre les deux, les classes moyennes, comme on dit, font tourner la machine, et se contentent des miettes. C'est ce que nous rappelle cette histoire juive. Lorsque Moïse est descendu du Sinaï avec les tables de la loi, il a trouvé son peuple en train d'adorer le veau d'or. Il s'est fâche tout rouge, a jeté par terre les tables de la loi, qui se sont brisées en mille morceaux. On raconte que les hébreux ont alors ramassé les morceaux. Le deuxième commandement qui dit qu'il ne faut pas voler, s'est trouvé séparé en deux: un morceau où était inscrit "ne pas "et on dit que ce sont les pauvres qui l'ont ramassé et l'autre "voler" ce sont le riches qui ont hérité de ce morceau de commandement.
Dans notre société pas besoin d'être grand clerc pour voir que ça va mal. Cette société qui est la notre, hyper riche, produit les pires des inégalités. L'exemple type c'est que régulièrement on apprend qu'une grosse entreprise va dégraisser je ne sais combien de milliers de travailleurs, et que dans la foulée ses actions en bourse s'envolent joyeusement.


Qu'est ce qui s'est passé pour qu'on en arrive là?
Jusque là nos société loin d'être parfaites tenaient sur quelques principes.
La religion, dont le nom signifie le lien social, religare c'est relier, la religion avec Dieu le père. Dieu est mort comme dit Nietzsche, le problème c'est qu'on a tué aussi le père qu'il supportait. Dieu est mort entre autre au moment de la révolution française, quand on a coupé la tête au Roi, qui représentait Dieu sur la terre. A la place on a inventé le lieu vide du commandement dans lequel viennent se loger des présidents élus par le peuple. Notre société tient depuis 200 ans sur cette invention démocratique et ces trois mots: liberté, égalité, fraternité. Trois mots qui commencent sérieusement à chanceler. Bref pour tenir ensemble une société il faut deux choses: un principe incarné, une fonction paternelle; et des principes qui font lien. On ne va pas pleurer sur la chute royale, mais on peut se demander si passant de la religion à la science, et de la royauté à la démocratie, on n'a pas jeté le bébé avec l'eau du bain. Ce qui tenait nos sociétés dites évoluées c'est en effet une certaine représentation de l'autorité, ce qu'on peut repérer en psychanalyse comme l'essence de la fonction paternelle. Qu'on en ait mis à bas les figures les plus répressives du père tout puissant ou du père fouettard est plutôt une bonne chose

Mais le problème c'est que le coeur de la fonction paternelle est battue en brèche. Cette fonction est dans l'espace social et l'espace psychique fonction le principe de l'humanisation. C'est en s'appuyant sur ce principe que les éducateurs naturels que sont les parents ou les éducateurs spéciaux qui les remplacent parfois sur ce plan, transmettent la régulation de la jouissance imposée à chaque sujet soumis à la loi de la parole et du langage.
La fonction paternelle c'est ce qui organise une société et donne une place à chacun. C'est pourquoi le premier acte d'un père c'est d'inter-dire l'inceste, c'est à dire de séparer le corps de la mère et celui de l'enfant, de les séparer par une parole. L'interdit c'est le dire qu'un père pose entre mère et enfant pour que chacun puisse vivre. C'est ce qui de distinguer soi des autres, les hommes des femmes, le père de la mère, de distinguer les générations, donc d'organiser le monde etc. Comment ça se transmet cette fonction civilisatrice? D'abord par la mère, c'est la mère qui transmet la loi du père, au sens où dans sa relation à l'enfant elle introduit du tiers, c'est à dire qu'elle se réfère elle-même à un autre que soi. Le père est donc d'abord présent dans la parole de la mère comme symbole. C'est aussi une femme qui fait que l'homme qu'elle aime peut devenir père. C'est pas donné d'être père. ça procède d'un acte de nomination: une femme dit à un homme:" tu es le père de l'enfant que je porte". Encore faut-il que cet homme en question assume cette place de père . Parce que rien ne le lui prouve qu'il est le père, si ce n'est que sa femme le lui dit. Le droit romain avait bien compris cette dimension de la paternité fondée sur une incertitude en énonçant: mater certissima; pater semper incertus. (de la mère on en est absolument sur; mais le père lui demeure toujours incertain)
Pour résumer : la paternité est un acte de parole et un acte de foi. Ce que transmet la fonction paternelle, c'est deux choses essentielles à l'être humain: la loi et le désir. L'une ne va pas sans l'autre. C'est parce que la mère est interdite à tout enfant que le désir peut chercher son chemin ailleurs, sans évidemment jamais le trouver. Comme nous le rappelle la chanson de Brel, dans 'L'homme de la Manche: "Chercher l'inaccessible étoile". La force de vie, l'énergie à aller toujours de l'avant, c'est dans cette fonction paternelle qu'elle s'enracine. C'est parce que nous sommes poussés en avant par ce qui nous manque, sans que nous puissions jamais le combler , que nous vivons. Or dans notre société pour la première fois depuis qu'il y a des hommes sur terre, cette fonction a été atteinte. En gros depuis le XVII siècle le développement de la science nous a appris à faire plus confiance à la raison raisonnante et au savoir des savants qu'aux paroles que nous pouvons échanger. C'est ce que peut nous apprendre l'histoire arrivée à Yves Montand après sa mort. On sait que sa dépouille a été pour y chercher des traces d'ADN prouvant scientifiquement sa paternité à l'endroit d'Aurore.
Or il n'est jamais bon de déterrer des cadavres, après ils peuvent venir vous chatouiller les pieds la nuit. C'est d'ailleurs pour ça que dans notre culture on met de grosses pierres dessus pour qu'ils restent sous la terre. Les morts avec les morts; les vivants avec les vivants.
Mais l'histoire de Montand nous révèle surtout à quel point nous sommes parvenus de désorganisation sociale: le père comme je viens de le décrire dans sa fonction d'humanisation, c'est du pipi de chat. Celui qui pourrait dire qui est le vrai père, ce serait désormais l'expert de la science. Le droit de la filiation a d'ailleurs ouvert la porte à ce type de vérification génétique. Or le résultat est là gravissime dans ses conséquences. On confond le père et le géniteur. Le père ne relève plus d'une parole de confiance , d'un acte de foi entre un homme et une femme, c'est la science qui prétend dire la vérité. Conclusion : le père on pourrait s'en passer. La porte est ouverte aux manipulations génétiques et aux clonages en tous genres. Ces avancées de la science sont soutenues par une conception "bouchère" de la reproduction de l'humanité, comme l'affirme haut et fort l'anthropologue du droit Pierre Legendre. Se reproduire alors pour les humains ne consisterait plus à mettre au monde et à éduquer des êtres parlants, mais à produire de la viande et à l'élever. De la viande évoluée recyclable dans tous les rouages de la société capitaliste et marchande. La boucle serait bouclée: nous n'aurions plus à faire qu'à du bétail humain, et plus à des sujets parlants qui n'arrêtent pas de mettre des grains de sable dans la machine.

Les conséquences dans notre société sont terribles. On touche au statut de la parole. A quoi bon échanger entre humains par la parole, si la science dit la vérité. La parole ne vaut plus rien. Seul compte la voix des experts. On touche à ce que le père (qui est incarné par tout humain en position d'autorité, c'est à dire chacun d'entre nous finalement) a pour fonction de transmettre: la loi, et l'impossible. Ce qu'en psychanalyse on nomme castration. L'être humain est limité par deux points de butée: la loi et la mort. Avec la science on laisse croire qu'il n'est plus rien d'impossible, que tout est possible, et que tout est permis. J'ai même lu dans Le Monde que des scientifiques annonçaient que la mort allait être vaincue, ce n'est qu'une question de temps et de moyens. Enfin on touche, en faisant sauter la valeur fondatrice de la parole et l'impossible qui nous limite, aux capacités de choisir de tout sujet. Car pour choisir, il faut pouvoir s'affronter à la loi et assumer face aux autres son désir dans une parole qui n'appartient qu'à soi.

On peut décliner les conséquences sociales de cette chute du père. La loi tient de moins en moins, ce qui la remplace, car la loi, il y en a toujours une, c'est la loi de la jungle, ce qu'on appelle la loi du marché. Résultat, le marché mondial est livré aux mains de maffias, qui vendent sans vergogne tout ce qui se présente. C'est comme ça par exemple que les Serbes reçoivent des armes, contre de l'argent qui leur vient du trafic de la drogue. Si la loi qui organise la vie ensemble ne tient plus, la parole de chacun ne vaut plus rien non plus. En politique, dans l'organisation du travail, un peu partout on fait les choses sans consulter, dans le dos des gens, sans aucun respect de la parole. Les chefs savent, voila ce qu'a produit la science. Pas besoin de demander l'avis à qui que ce soit. ça produit une désaffection de la parole: tous plantés devant la télé, on recueille la bonne parole, mais on n'a plus de discussion avec son voisin. Big Brother n'est pas loin. Et enfin, nos capacités à choisir à se battre pour dire son désir et être entendu se sont émoussées. On laisse pisser. Notre société se détraque de partout et nous ne bougeons guère. On nous fermé le bec avec des voitures, des pavillons, et un petit boulot peinard.
Les conséquences sur les jeunes sont dramatiques. Plus de respect de la parole, une incapacité à accepter les limites; une quasi impossibilité chez beaucoup à choisir sa vie. On attend juste d'être casé, d'être mis dans une case, bien rangé. Les jeunes ne font que reprendre le discours qui fait autorité. Puisque le père ne vaut plus rien, c'est l'autorité de la science et du capitalisme qui fait point de re-père. Autrement dit ce sont de bons enfants, ils obéissent à la voix du nouveau père, le père la science qui donne l'ordre de jouir (on appel ça consommer) le plus possible Plus vous jouissez plus les capitalistes s'engraissent. Rien ne doit faire obstacle à la jouissance des biens, même si le bien convoité c'est le bien ou le corps de l'autre. Récemment mon toubib s'est fait trancher le bras, parce qu'il voulait défendre sa voiture contre un jeune qui tentait de la fracturer. Ce jeune l'aurait tué s'il ne s'était pas protégé la tête avec son bras. Rien n'arrête ce genre de jeune, surtout pas la taule, qui est une usine à fabriquer des délinquants. La science en mettant sur le marché des produits de plus en plus puissants, pousse à ce sans limite. Par exemple l'extasy. C'est une grande découverte. C'est un produit qui bloque les neuro-transmetteurs de la douleur. Vous pouvez alors dépasser les limites corporelles. C'est comme ça que récemment un jeune dans une rave partie, ayant consommé de l'extasy, est mort après avoir dansé une dizaine d'heures sans s'arrêter. Il est mort d'épuisement. Son corps vécu comme un instrument pour jouir sans entrave, n'a pas résisté. Le corps c'est fragile. On pourrait prendre beaucoup d'autres exemples. Le dopage des sportifs entre autres. C'est évidemment un pousse à la consommation de drogues. Pour être le meilleur, camez-vous et vous aurez la gloire. Voila les modèles que l'on propose à nos enfants. Alors que faut il faire? La situation est-elle désespérée? Je ne vois qu'une voie: restaurer le père et sa fonction dans notre société. Attention ça ne veut pas dire glisser dans une image rétrograde, comme le fait Chevènement en traitant certains jeunes de sauvageons, ou bien mettre nos espoirs dans une père fouettard style Le Pen. ça veut dire retrouver ces trois points fondamentaux que j'ai soulevés et qui sont touchés par notre culture: la parole, la transmission des limites et la capacité à faire des choix. Autrement dit face au discours de la science et du capitalisme nous n'avons à opposer que notre résistance dans la parole et dans nos actes au quotidien. Si nous faisions un peu plus attention à la valeur de la parole de chacun, nous saurions réinventer des modalités de vivre ensemble un peu plus vivables. Il faut arrêter de croire que la science puisse nous dire la vérité. La vérité ne sort que de la bouche de chacun d'entre nous. Il n'y a pas d'autre vérité. Peut-être pouvons nous aussi face à nos enfants tenir la loi, pas d'une façon débile, mais d'une façon qui nous engage et les prend au sérieux. Par exemple récemment dans les Hauts de Seine un proviseur a mis à la porte tout une classe de première qui se comportait de façon inadmissible avec une jeune enseignante. Il n'a accepté le retour au lycée de ces jeunes qu'après les avoir rencontré et signé un contrat avec chacun d'entre eux. Il les a pris au sérieux comme étant capables d'assumer et de tenir un engagement.

Autre chose , il faudrait aussi restaurer une représentation sociale pour les pères, un peu plus solide. Les emplois jeunes c'est bien, mais comment voulez-vous que des jeunes respectent leur père alors que notre société les a mis à la casse. Il faudrait inventer des emplois pour les pères, pour que la société les mette en valeur et les soutienne dans leur fonction d'autorité. A Strasbourg un groupe d'éducateurs travaille sur cette question. Ils ont fait des groupes de parole où les pères viennent se rassurer dans leur parole Du coup ils ont aussi monté un réseau de solidarité, ils s'entraident, font circuler les infos sur des emplois. Ils sont sortis de chez eux, où ils étaient scotchés depuis des lustres devant la télé une bière à la main, ils sortent et commencent à être fiers d'eux-mêmes. Leur position est alors mieux assurée face à leurs enfants. Ce n'est qu'en restaurant les pères dans leur dignité que les enfants pourront être éduqués. Cette tache est à la charge de tout citoyen, homme ou femme.

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Commentaires

LE MONDE DANS LE QU'ELLE ON VIE

Le monde dans lequelle on vie. Plus on avence dans le temps plus ils deviens horible, tout ce qui est bien ils enlèvent. Il faut s'avoir que dans l'univers on est des petits points. L'univers est divisé en deux c'est à dire l'esprit du bien et l'esprit du mal. L'esprit du bien qui est Ahura Mazda et l'esprit du mal qui est Ahriman. Le monde dans lequelle on vie n'aura plus déquilibre ce sera l'esprit du mal qui l'emporte sauf si on fait un équilibre, pour ça il faut changer les mentalité des gens. Le monde dans lequelle on vie me fait de plus en plus peur.

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