jeudi 18 janvier 2007
ADSEA-IME VERT PRE
La Fabrik
22 BD Aguillon
13009 Marseille
04 91 75 92 50
imevplafabrik@yahoo.fr
Mr Agius : Directeur de l’IME
Katia Jeudy : Chef de Service
Lucie Tassone : Vers l’art Pré
Laurent Albertini : Coordination et FabrikàSon
CREATIVITE, RENCONTRES, EXPRESSIONS, EVENEMENTS
« Lors d'une journée au " Creahm Provence", avec un groupe d'adolescents de Vert Pré, Marc, jeune adolescent aux traits psychotiques, s'installe à l'atelier de sons, animé par Antoine Boulanger. Il y a des règles mais pas de contraintes. Il est dans son élément, suit le rythme, répond aux sollicitations musicales d'Antoine, rencontre l'autre, simplement, à travers la musique.
Ni doutes, ni appréhensions, face au micro, il improvise, la voix claire et posée. Antoine écoute, enregistre, mixe et lui renvoie du son. Il joue avec la voix de Marc, compose une mélodie.
Témoin de cette rencontre, je découvre Marc. J'aperçois un jeune homme passionné, à l'écoute, ouvert, prêt à la découverte. Il se fait plaisir. Il s'échappe de l'image qu'on a de lui, du jeune homme qui ne supporterait pas le changement, qui aurait toujours besoin de ses repères, d'être rassuré, contenu.
Son repère ce jour là, c'est le son, la musique. C'est ce qui crée ce lien unique et instantané entre lui et Antoine.
Marc s'est emparé d'une forme d'expression plus simple, une parole universelle, la musique…
Antoine n'attendait rien de lui. Il lui a offert un espace d'expression, un espace de rencontre, de découverte de soi… »
PROJET INITIAL :
CONSTATS
L'accentuation des troubles du comportement des enfants, adolescents et jeunes adultes accueillis sur Vert Pré, et l'accueil généralisé, de jeunes enfants psychotiques et autistes, nous obligent à repenser certains axes de la prise en charge proposée à l’IME Vert Pré, au sein de tous les services.
Force est de constater que le public accueilli en IME change. Les candidatures auxquelles nous avons à répondre aujourd’hui relevaient, il y a peu, d’hôpitaux de jour, de prises en charge en CMPP où la notion de soins demeurait l’axe essentiel.
Qu’allons nous proposer à ces jeunes enfants psychotiques, autistes ou souffrant de troubles de comportements importants ?
Les perspectives d’une insertion sociale, telle qu’on l’imaginait hier, sont modifiées et de nouvelles réponses de prises en charge éducatives et thérapeutiques sont à imaginer.
Les groupes éducatifs tant sur l’externat que sur l’internat sont réfléchis en fonction des âges et des potentialités des enfants et jeunes accueillis.
Les éducateurs ont des envies, des désirs, des projets qu'ils ne peuvent pas toujours pérenniser car ils ne correspondent pas aux besoins ou aux demandes de l’ensemble des enfants ou jeunes de leur groupe de référence.
Les enfants, adolescents et jeunes adultes effectuent des demandes, ont des envies, toutes différentes les unes des autres. Du théâtre, au rap, en passant par le dessin, la peinture, la musique, le Hip Hop, la couture, la danse, l’écriture, la vidéo…
Il existe sur l’IME, actuellement, des ateliers animés par des intervenants extérieurs :
· Un atelier théâtre sur le groupe des adolescentes (internat)
· Un atelier clown sur le groupe des jeunes filles (internat)
· Un atelier musique sur le groupe des jeunes garçons (internat)
· Un atelier musique sur le groupe des petits
· Un atelier cirque
· Versl’art pré, atelier animé par Lucie Tassone qui propose, à ce jour, des découvertes diverses, peinture, terre et sorties culturelles.
Ces ateliers d’expression offrent au groupe, avec la participation d’un intervenant proposant une technique, des découvertes, un temps différent en dehors des prises en charge proposées par les éducateurs.
De nouvelles demandes d’ateliers artistiques sont effectuées régulièrement, c'est pourquoi, il y a un intérêt réel à réfléchir à d'autres formes de travail et d'organisation autour d'ateliers d'expressions artistiques en tout genre.
Après l'énumération de ces constats et de ces difficultés, l'idée d'un espace d'expression en dehors des prises en charge habituelles et quotidiennes émerge.
« Quand le public admire les productions artistiques d’un patient ou d’une personne, l’exclusion du fait de son handicap social ou psychique et le regard se modifient. La création artistique est un puissant média face aux phénomènes de ségrégation et de rejet de la différence »
La création artistique permet d’aborder différents langages. Elle développe la possibilité d’échange, de communication et d’évolution.
La création artistique expose une manière d’être différent pour qu’un autre regard se pose sur la personne aussi bien celui des familles, des professionnels que celui de la société…
Il s’agit aussi d’offrir un espace de parole par l’intermédiaire de l’acte artistique sans souci de « normalisation ».
· Un espace où peuvent s'articuler autour des demandes des enfants et adolescents et des projets des éducateurs, des intervenants extérieurs, des outils divers d'expressions : théâtre, musique, danse, peinture, dessin, écriture.
· Un espace où l'on n'attend rien de l'autre, juste qu'il soit lui, qu'il s'exprime. Un espace où l’expression d’un symptôme ne sera pas forcément un obstacle.
Où l’expression d’une pathologie pourra être supportée sans chercher à la faire disparaître, peut-être à la rendre supportable…
· Un espace de libération des tensions intérieures dues aux exigences quotidiennes de la vie institutionnelle, jamais suffisamment évacuées.
· Un espace permettant une ouverture culturelle, avec la possibilité d'amener vers nous des personnalités du monde artistique : sculpture, rap, littérature…
· Un espace qui offre du temps pour sortir à deux ou à trois de Vert Pré pour visiter une exposition, aller voir un concert, un spectacle, rencontrer un autre public, être confronté dans un cadre ludique, au « social ».
· Cet espace peut aussi permettre de décloisonner les groupes d'internat et d’externat en imaginant une transversalité de fonctionnement.
Ceci en dehors des groupes de référence, qui sans espace où l'individu peut s'en détacher, peut devenir paralysant ou force d'inertie.
C’est aussi l'occasion d'avoir des histoires à raconter au groupe, à l'éducateur qui n'est pas venu, des moments uniques loin du collectif omniprésent pour des enfants vivant en institution.
· Les actions artistiques menées au sein de cet espace d’expression sont à inclure et à définir lors de l’élaboration du projet pédagogique éducatif thérapeutique individualisé.
Un cadre particulier pour penser les propositions de projets et d’ateliers :
-chaque projet s’appuie sur l’engagement d’un professionnel à mener un projet artistique dans un cadre défini.
-Un échange artistique avec une ouverture sur l’extérieur devra se mettre en place au cours du projet.
- Il devra être source de décloisonnement et de tranversalité tant au niveau des enfants de l’IME que des professionnels.
3 axes de fonctionnement :
Des ateliers différents sont mis en place pour répondre aux différents objectifs du projet :
1) Des ateliers permanents : ateliers répondant aux demandes d’enfants et de jeunes en offrant des essais d’ateliers lors de cycles, à des enfants et jeunes. Après un bilan avec les intervenants et le jeune, la décision d’un engagement sur la poursuite de l’atelier sera prise.
2) Des projets à court ou moyen terme : sous forme de stage à thème, de projets à durée déterminée sur l’année.
3) Des évènements de tous genres : créer des temps forts dans l’année, une exposition, une représentation, des évènements avec les familles, les partenaires, les institutions du secteur, les habitants du quartier…
Le local situé au 55 bd Aguillon permet de répondre à plusieurs axes de travail :
-C’est un lieu extérieur à l’IME Vert Pré. Il est situé à 5 minutes de l’IME
-C’est un espace offrant des possibilités d’ateliers multiples : grand espace central vaste et lumineux, 3 petites pièces à aménager suivant les ateliers.
-Un lieu où des manifestations pourront avoir lieu : expositions, présentation d’un travail à une école, rencontres multiples.
-Un espace avec une petite vitrine, imaginée en exposition permanente à imaginer ouverte et vivante, toujours en mouvement.
-Un appartement de 3 pièces situé au dessus permet aussi d’imaginer des échanges avec différents partenaires. Il s’agit dans le cadre d’une convention d’échange d’offrir cet espace en échange d’un spectacle, d’une représentation…
Présentation rapide de l’équipe :
Lucie Tassone : l’objectif pour cette année est de faire glisser tranquillement vers La Fabrik les ateliers de « Vers l’art pré » mis en place jusqu’ici.
Ce nouvel espace doit permettre de découvrir, avec les enfants et les adolescents, d’autres supports et d’effectuer des découvertes.
L’espace lumineux et spacieux dont pourront disposer les ateliers plastiques, sera un atout.
Les ateliers plastiques auront aussi pour mission d’organiser des expositions intra et extra muros, de mettre en mouvement et en valeur la vitrine qui donne sur la rue.
Nous travaillerons toujours en équipe dans le souci de coordonner au mieux notre action sur l’ensemble de l’année.
Laurent Albertini travaillera autour de différents axes : organisation générale, mise en place et suivi des travaux, tissage du réseau, soutien aux projets artistiques actuels et à venir.
Après cette première phase de lancement du projet…Il animera aussi des ateliers « Son » et « écriture »…
Katia Jeudy continuera l’action entreprise jusqu’ici, travaillera sur les projets actuels, organisera le cadre général de la prise en charge sur La Fabrik, animera les réunions d’équipe. Nous travaillerons ensemble sur la faisabilité des projets et l’intérêt éducatif et artistique.
Nos actions et nos réflexions seront toujours soumises à l’équipe de direction et au directeur Mr Agius.
OBJECTIFS OPERATIONNELS 2006/2007
Cette année le projet de La Fabrik va se concentrer sur trois axes:
Le premier axe sera divisé en deux parties qui devront se dérouler simultanément pour donner une cohérence au projet.
La première sera la mise en oeuvre des travaux nécessaires à la réfection du lieu.
La deuxième consiste à faire connaître le projet aux différents acteurs sociaux culturels de la ville et du même coup tisser un réseau qui sera indispensable et nécessaire au bon fonctionnement du lieu, et toujours dans un souci d'ouverture vers l'extérieur.
Le deuxième axe traitera la manière de penser le lieu et sa construction avec les enfants et les adultes de l'IME. Il consistera en un travail sur les représentations.
Cette phase, nous l'espérons, nous permettra de parler et de traiter de la symbolique de la transformation.
Pour finir ; le troisième axe est le travail « extra muros » de La Fabrik.
C'est à dire tout le travail déjà entrepris alors que le lieu n’existait pas. C’est le projet Batucassa, l'atelier "vert l'art prés", la venue d'artistes de la scène musicale marseillaise, du travail avec l'association « dreadlocks.13 », l'échange international avec l'institution espagnole de Mataró qui ont été un vrai moteur pour La Fabrik.
1) TRAVAUX DE REFECTION ET MONTAGE DE RESEAUX
Première étape :
Les travaux dans le lieu, travaux de réfection et d'aménagement :
Ces travaux seront menés par l’atelier bâtiment et feront partie intégrante de leur projet éducatif.
Les jeunes seront accompagnés de l’éducateur référent tout au long de l'ouvrage.
Une réunion préalable sera nécessaire pour évaluer, avec l'éducateur, l'ampleur et la durée des travaux ainsi que les tâches que nous devrons donner à sous traiter à une entreprise extérieure.
Il nous semble pertinent de faire participer les adolescents pris en charge à l'IME et de les impliquer directement dans le processus de construction de ce nouvel espace fait "par eux" et" pour eux".
Cette phase est très importante pour travailler la revalorisation et l'estime de soi.
Nous voulons aussi sanctionner la fin des travaux par un projet loisir ou culturel que les adolescents du groupe bâtiment choisiront avec leur éducateur, dans le but de les valoriser toujours dans une dynamique positive.
La deuxième étape consiste à tisser un réseau de partenaires extérieurs et à faire connaître le projet à un maximum d'acteurs associatifs et institutionnels.
Pour cela, un long travail de prises de contacts, de rendez vous, de rencontres, de défrichage du décor socioculturel marseillais est indispensable. Car une des vocations premières de La Fabrik est l'ouverture vers l'extérieur et donc vers les autres, par le biais de l'art sous toutes ses formes (musique, peinture, danse, théâtre).
En effet, ce travail nous permettra d'être le plus efficace possible lors de l'ouverture du lieu. Pour cela nous nous servirons de plusieurs outils de communication qui sont le projet résumé du lieu ainsi qu'une plaquette présentant La Fabrik de manière synthétique et explicite. Notre participation au forum du Handicap nous poussera également dans ce sens.
Aussi, il y a une dimension qui semble importante : le rôle moteur et fédérateur que doit avoir l'équipe de La Fabrik. Elle devra, chaque fois qu'un projet le demande, mettre en lien et en synergie toutes les forces qui serviront à le mener à bien (éducateurs, chefs de services, enfants, parents, associations, institutions...).
En effet, nous devons créer une unité dans la manière d'appréhender nos pratiques éducatives, et donc du même coup participer à une prise en charge globale et cohérente.
L'équipe de La Fabrik devra tenir un rôle de liant entre les différents services de l'IME et impulser une dynamique de travail et de réflexion autour de ce projet spécifique.
2) PENSER LA FABRIK ENSEMBLE : TRAVAIL SUR LES REPRESENTATIONS
Le deuxième axe sera le "penser ensemble le lieu", "élaborer notre propre espace de travail, de transformation".
Nous voulons travailler avec les enfants la notion de création, de transformation et de réparation à travers l'investissement et la construction de ce nouvel espace d'expression. Pour cela nous allons organiser des visites de La Fabrik avant, pendant, et à la fin des travaux avec tous les enfants, éducateurs, psychologues, psychomotriciennes, orthophonistes, infirmier, personnels techniques, femmes de services, école….
Nous irons par petit groupe visiter le lieu pendant une heure.
On prendra le temps de boire un thé et de s'asseoir pour faire sortir les idées et les représentations de chacun d'entre nous (adultes, enfants).
Notre idée est de montrer aux enfants, en partant de leurs représentations, que la transformation est possible, que le changement peut rendre quelque chose de « cassé», « sale », « austère » en un lieu "reconstruit" "propre" et "sécurisant".
C’est aussi une manière d’évoquer ensemble notre capacité à tous d’avoir une prise sur les choses : « il découle de mon action et de ma réflexion des résultats … » Cette partie du travail est un pilier et une étape majeure dans la mise en place du projet.
Nous voulons réfléchir ensemble adultes et enfants sur comment est le lieu maintenant? Est il beau? Est il moche? Que peut on en faire?....
Travailler sur les représentations est un axe majeur de cette phase d'élaboration. L'association « dreadlocks.13 » viendra filmer tout le processus de construction, afin de garder une trace concrète de cet investissement commun.
En parallèle, nous penserons aussi au fonctionnement et au contenu des différents ateliers de La Fabrik.
Nous attendons pour cela une participation des éducateurs pour détecter et nous aiguiller sur les désirs des jeunes de participer à des ateliers ou projets socio-éducatifs proposés par La Fabrik.
Nous imaginons investir le lieu en février mars 2007. Les ateliers pourront se dérouler sur place durant la semaine en temps d’externat, de soirées et de week end.
3) LA FABRIK HORS LES MURS.
Depuis plus d'un an, des actions ponctuelles se déroulent dans et hors l'IME :
L'atelier "vert l'art pré" (peinture, sculptures,art de la terre....), Concert de fin d'année 2005 (musiciens de raspigaous) , venue de JO CORBEAU pour une matinée conte musical, au moment des fêtes de noël, Carnaval de Marseille 2006 , échange avec une institution espagnole dans le cadre du projet Batucassa et défilé à la fête du plateau 2006, réalisation de film sur les différents événements par l'association "dreadlocks13", spectacle de cirque, spectacle de danse Africaine…
Pour 2006/2007 les principaux objectifs sont :
-Forum du Handicap
-Préparation du carnaval 2007 (répétition Batucassa, préparation des costumes, préparation du repas pour le jour de la manifestation.)
-Préparation de la fête de la Musique 2007 en Arles.
-Projet d'échange culturel avec "la fundació Maresme" pour un voyage à Mataró dans le cadre du travail entrepris avec l'association CAMAPA.
-Proposition de sorties culturelles aux différents services de l'IME (Théâtre, cirque, contes, concerts, expositions....)
-Mise en place de projets ponctuels en faveur des enfants et toujours par le biais de l'art (projet graph. atelier d'écriture .....)
-L'atelier "vers l'art pré" continu son travail entrepris depuis plus d’un an de découverte de l'art plastique, au travers d'activités proposées sur le groupe ou lors de sorties aux musées et autres lieux d'exposition.
-Réunion hebdomadaire pour baliser et construire petit à petit notre pratique dans ce nouvel espace que va être La Fabrik.
-Travaux de réfection et de réflexion autour de La Fabrik.
-Inauguration et mise en route du lieu.
-Festival en tous genre : démonstration, exposition, concert, théâtre, lecture…pour la fin de l’année.
Voici donc les principaux axes de travail qui se dérouleront tout au long de l’année 2006/2007.
Une évaluation et un bilan seront indispensables pour voir si nous sommes dans la bonne direction et quels sont les ajustements à faire ?
La participation de tous les acteurs institutionnels est indispensable et fortement impulsée par l'équipe de La Fabrik.
La Fabrik rédigera et tiendra un carnet de bord, à la disposition de tous, un peu comme le ferait le capitaine d'un bateau, à la découverte d'un nouveau monde.
L’interaction entre pratiques artistiques et techniques éducatives en tout genre, où chacun peut mettre « son grain de sel », où chacun peut trouver sa place,sera source de découverte, de partage, de rencontre, répondant au cadre d’une prise en charge visant l’épanouissement de la personne.
Cet espace permet un décloisonnement des unités ou services actuels et l’élaboration d’un espace commun.
La participation des enfants, adolescents et jeunes adultes accueillis à Vert Pré, dans toutes les phases de mise en place du projet, demeure un axe essentiel de fonctionnement.
L’ensemble des acteurs de ce projet, enfants, jeunes, professionnels, va se confronter à de nouvelles situations.
Cet espace d'expression artistique se veut un lieu d'expérimentation tant pour les personnes accueillies que pour les professionnels.
Il en découle un changement de perceptions et de regards sur et par les enfants, adolescents et jeunes adultes, s'appropriant cet espace.
C’est un espace de création ouvert sur le monde et permettant des rencontres encore impossibles…
« La plus essentielle des œuvres auxquelles à tout âge un homme s’attelle, c’est la réalisation de soi même. Lui offrir le cadre et les moyens de faire, à toutes les étapes de sa vie, et bien sûr le plus tôt possible, l’apprentissage de la prise de parole est l’œuvre la plus enrichissante aussi pour le travailleur social.
Il n’y a pas d’œuvre sans regard. Regard de celui qui ouvre sur le monde, les gens et les choses, regard sur lui-même. Regard aussi de celui qui regarde l’œuvre ou la mise en œuvre. Et notre responsabilité est grande de permettre à une œuvre de se développer ou de se tarir.» Bernard de Montaclair
Visites de la fabrik
Lundi 2 octobre 2006
lundi 2 octobre, visite dès 9h le matin avec le groupe bâtiment. Ce sont les adolescents qui vont travailler sur la réparation et la réfection de la fabrik.
C’est par demi groupe que les visites se déroulent. Ils étaient donc 4 ce matin à venir découvrir l'espace et du même coup, ils ont pu juger avec leur éducateur de l'ampleur des travaux à effectuer (Murs à démolir, réfection du sol, propreté et peinture de tout l’espace, .......)
J'ouvre la porte de la fabrik et déjà, comme me l’a dit un adolescent : « c'est L'état des lieux ».
"Regarde la fissure, il faut tout refaire!" et un autre de renchérir : « c'est quand qu’on commence ? Demain? », l'éducateur du groupe et moi même devront refréner leur ardeur car si on les écoute, nous attaquons les travaux dans la minute. Les sourires sont sur toutes les lèvres, la motivation est presque palpable, l’ambiance est électrique.
Il faut se poser, prendre du temps pour parler, discuter autour du lieu. Pour cela nous avons installé dans une des pièces de la fabrik, deux nattes et quelques coussins pour créer un espace confortable où l'excitation peu retomber et laisser place à l'échange autour d'un thé à la menthe.
Les garçons s'assoient en tailleur ou même s'allongent sur les nattes et prennent chacun un verre de thé, le calme revient, les esprits se calment.
L'éducateur : " alors les gars il y a du boulot !"
Les ados: " c'est de la bombe"
L’éducateur : " mais ça va être dur "
Les ados: "donne moi une masse, il faut casser le mur !"
" Cet après midi, on va acheter les bleus et les chaussures de sécurisées."
En effet, les enfants sont prêts en tout cas dans le discours à se "mettre au travail». Ils en sont même très impatients.
Les adolescents n"ont pas fait cas de l'état de saleté des lieux .Peut être est ce parce qu"ils étaient déjà venus avant les vacances .Leurs remarques étaient portées uniquement sur les travaux à effectuer .Ils ont apparemment bien saisi le « pourquoi » ils sont là et ce que l'on attend du travail avec eux pour cet année.
10 heures un autre groupe arrive c'est l'unité 1 (Cécile). Il est composé d'enfants de 7 à 10 ans. Pour cette visite, les enfants n’étaient que deux, le reste du groupe venant à 13 heures.
Une fois la porte poussée, ils rentrent sans se faire prier et filent dans la pièce principale. Ils courent, marchent, flânent dans la fabrik en occupant tout l'espace. Ils tapent des mains, des pieds, poussent des cris, "s'expriment" en toute liberté.
Comme pour les grands, la phase de visite terminée, nous allons nous asseoir sur les nattes pour déguster un thé ou un sirop de menthe.
Contrairement à leurs camarades de l'après midi, les deux enfants présents sont peu bavards malgré nos sollicitations.
Mais quelque chose m’a interpellé. Arrivés sur les nattes les deux petits qui sont par habitude très excités se sont posés, allongés dans le calme et se sont donnés le droit de faire une trêve et de rester paisibles.
A 13 heures, l’autre partie du groupe de Cécile vient visiter La Fabrik. Sur le chemin un enfant nous interpelle "qu'est ce que sait là bas?" "Qu’est ce qu'on va y faire?" Nous lui signifierons qu'une fois arrivé sur le lieu on répondra à toutes ses questions et que les visites sont aussi faites pour ça.
Nous arrivons devant la porte, les quatre enfants, leur éducatrice ainsi qu'une stagiaire. Un tour de clé et c'est l'invasion. Les bougres, ils courent, chantent, dansent "c'est trop beau", "j'adore","j'adore cet endroit".
Une fois les lieux visités nous pouvons nous allonger ou nous asseoir pour boire un sirop et discuter sur ce qu'ils viennent de voir. Nous leur expliquons rapidement quel est le but de ce lieu et quelles activités leur seront proposées. Et là les questions et les demandes fusent:
"Moi, je veux faire les travaux avec les grands" et un autre de dire " moi, de la peinture ou de la musique "
Le lieu ne laisse pas indifférent enfants et adultes, et les choses commencent à bouger petit à petit dans la tête et dans les actes.
Mardi 3 Octobre
9 heures, première visite de la journée avec les filles de l’atelier lingerie. Comme pour les visites précédentes, les enfants sont très enthousiastes quant à l'idée qui leur est proposée de faire une friche artistique.
Les sourires sont de rigueur et les compliments sur le lieu sont légions. Nous sommes un peu étonnés de leur réaction, car nous aurions imaginé (nos représentations) que les enfants allaient dire que le lieux était froid, austère et sale. Pas du tout,"ils adorent, ils aiment" déjà La Fabrik dans son état actuel c'est a dire vide. Juste l'idée de savoir ce qu'il va s'y passer les ravit d'avance. Leur imaginaire travaille plein pot:
« Moi, je veux faire de la danse », « et moi de la poterie et de la musique. »
"Il est beau ton endroit" me dit une fille du groupe
"Mais tu sais ce n'est pas mon endroit, c’est l'endroit de tout le monde. C'est d'abord votre endroit à vous les enfants ainsi que de toutes les personnes qui travaillent sur l'IME."
Un sourire que je prendrai comme une affirmation à ce que je viens de dire.
Après les lieux apprivoisés, les filles viennent se poser pour déguster un thé. Les chaussures retirées, les corps peuvent répondre à l'invitation des nattes. Une qui s'allonge, une autre s'assoit, une autre met un coussin sous sa tête...
Le thé coule à flot ainsi que les compliments sur le lieu.
"C’est trop beau «,"j'aime, j’aime","j'adore cet endroit".
Les enfants ont l'air d'apprécier l'espace d'expression que nous leur offrons à investir.
10 heures, c'est avec le groupe transition de Jean Louis que nous poursuivrons les visites.
Même réaction que leurs camarades, des compliments sont proférés dès le seuil de la porte .Et plus ils s'enfoncent dans le local et plus leur conviction que ce lieu leur appartient se fait sentir.
Ce sentiment d'adhésion transparaît au travers de leur dire :
"C’est trop beau." " On pourrait y faire du théâtre " " moi de la musique." " On pourrait y construire un terrain de foot avec des musiciens autour."
"Moi ce soir, je dors ici ! "
Une pause autour d'un thé .Enfants et adultes se mettent à l'aise pour discuter à propos de La Fabrik.
Nous prenons ce temps pour leur expliquer ce qu'il va se passer dans la fabrik et pour qu'ils nous disent aussi comment ils imaginent le lieu. Nous leur proposons de faire la devanture en bois et cette idée est très bien reçue par leur groupe et l’éducateur autant que les enfants sont ravis.
13 heures, nous voilà partis pour une nouvelle visite avec l'atelier « floriculture ». La porte s'ouvre sur La Fabrik et les adolescents rentrent un par un sans trop d'excitation. Ils découvrent un nouvel espace qui s'offre à eux, un endroit qu'ils vont pouvoir investir. Ce qui les étonne, c'est l'impression de grandeur qu'offre la pièce principale de La Fabrik.
"C’est grand «, "c'est trop bien ici ! " "Et qu'est ce que c'était avant ?"
Après un tour du propriétaire dans la joie et la bonne humeur, nous décidons d'aller déguster un thé à la menthe sur les nattes qui nous appellent à la décontraction et au partage. Partage des idées, des émotions, des ressentis....
La discussion aidant, l'atelier « floriculture » s'est proposé pour s'occuper de la décoration florale de La Fabrik. Ce qui me parait être un très bon moyen de faire participer concrètement les adolescents au processus de construction de ce nouvel espace.
Est ce les nattes, les coussins, le thé, La Fabrik, qui créent cette synergie autour de ce projet?
14 heures c'est au tour de l'atelier restauration et environnement de venir visiter La Fabrik. Ce groupe et composé de pré adolescents voir d'adolescents. Ils rentrent de manière moins sauvage que les tout petits mais d'une façon moins posée que les plus grands.
Quand la porte s'ouvre ils sont comme aspirés par la pièce principale et commencent à occuper tout l'espace dans un tourbillon de gestes, de cris et d'exclamations :" c'est trop beau ici.», "c'est trop bon ", " c'est grand ici ! " et même un enfant me dit " tu sais Laurent il faut faire des travaux .Je peux venir les faire avec toi?"
Après ce premier contact avec les lieux, nous décidons d'aller boire le thé sur les nattes fédératrices .Tout le monde enlève les chaussures et s'installe à sa guise.
Les enfants sont pleins de compliments et d'envies. Ils donnent presque l'impression de se rendre compte (mieux que les adultes) de ce que va donner le lieu un fois fini.
Les visages rayonnent lorsque nous leur parlons des différents ateliers qui vont leur être proposés. Ils ressentent bien la place centrale qui est la leur dans ce projet.
Par ailleurs, cet atelier s’est également proposé de s’inscrire complètement dans le processus de fabrication du lieu et va s'atteler à réfléchir sur la décoration de cet espace et donc lui donner une âme.
Mercredi 4 Octobre
La première visite de la journée s'est déroulée avec le groupe « préparation à la sortie. » Ce sont des jeunes majeurs pour la plupart avec des problématiques très lourdes qui iront pour la grande majorité en foyer occupationnel. Aujourd’hui, l’association dreadlocks 13 est avec nous pour capturer dans leur camera ces tous premiers moments de rencontres et de découvertes de La Fabrik.
Les jeunes rentrent dans La Fabrik avec une curiosité et une envie de découvrir ce nouvel espace. Ils suivent tous le même chemin. Le couloir les amène dans la grande pièce principale où certains corps et esprits se libérent et occupent tout l'espace dans une frénésie de danse, de cris, et de rires.
la phase de familiarisation avec La Fabrik étant terminée nous pouvons nous installer sur les nattes pour prendre le thé. Un moment où les tensions retombent et où l'échange devient possible. Toujours les mêmes compliments autour de La Fabrik " c'est grand et c'est beau" , "moi j'aime,c'est bien".
J’ai l'impression qu'ils ne font pas attention à l'état actuel du lieu et qu'ils font, soit abstraction de la vétusté du local, soit qu’ils ont une force de projection extraordinaire et arrivent à se rendre compte et à ressentir de ce que va devenir le lieu.
Éducatrices et jeunes repartent ravis de leur visite et demandent déjà quand ils pourront revenir. Je leur dis qu'ils y reviendront très vite et qu’il faut (jeunes et éducatrices) qu'ils réfléchissent et proposent des pistes pour faire avancer et construire le projet ensemble.
"Mais c'est trop sale", "c'est trop pourri!», "il faut tout nettoyer et repeindre !" Voila les réactions de l'atelier « collectivité. » En effet, dès le premier pas dans la Fabrik, c'est le constat qui tombe froid, direct, voire radical.
Ces jeunes se rendent compte de l'ampleur des travaux qu'il reste à faire avant l'ouverture du lieu et sont, ma foi, très lucides.
Mais après cinq minutes à flâner dans les lieux ils arrivent à voir l'intérêt de cet espace, ce qu"ils vont pouvoir y faire. Ceci transparaît à travers leurs questions qui commencent à résonner dans tout le local:"mais c'était quoi avant?», "c'est bien ici on va pouvoir faire plein de choses !" " C’est beau quand même !" " Il y a plein de travaux à faire mais ça va être trop bien."
L'odeur de la menthe commence à se répandre dans La Fabrik. Il est donc temps de se poser et de discuter sur ce qu'ils viennent de voir.
A travers leurs demandes, j'ai l'impression qu'ils ont eux aussi bien saisi ce que peut leur amener un lieu comme La Fabrik. Mais comme pour d'autres groupes, ce moment de partage des idées et des ressentis nous a conduit vers l'adhésion de cet atelier au processus de construction de La Fabrik. Ils vont en effet faire un travail autour de l'inauguration de La Fabrik. (Préparation du buffet et travail sur l'accueil et le service.)
Une fois de plus, La Fabrik fédère les idées, les projets, les hommes.
Jeudi 5 Octobre
Les visites d'aujourd'hui concernent le groupe des plus petits accueilli sur l'IME. En première heure c'est le groupe unité 1 de Nathalie et Sabine et en deuxième heure c'est au tour du groupe de Nathalie.
Sarah est présente pour filmer les pérégrinations ludiques des deux groupes pendant cette découverte des lieux.
Je vais chercher les petits sur leur groupe et en avant pour la visite de La Fabrik. Ils ne sont pas trop curieux et ne me posent pas de questions pendant le trajet.
La porte s'ouvre et c'est la ruée dans ce fameux couloir qui aspire les enfants pour les ressortir en flux continu dans la grande pièce. Et là, c'est l'éclate.
Ils courent partout, chantent, crient, tapent des mains, des pieds, certains touchent les murs d'autres dansent.
Les petits viennent tous s'installer sur les nattes et la discussion s'ouvre "moi j’aime, c’est grand, c'est bien" "ça me plait ici." " Je veux dormir ici ce soir."
Et quand nous leur demandons ce qu'ils aimeraient y faire ils nous répondent : "de la danse" "moi je veux dessiner" " moi je veux faire de la musique"
Les petits ont eux aussi bien saisi ce que peut leur proposer un tel espace.
Après ce moment de rencontre et d'échange dans le calme et la sérénité, il est temps de laisser la place au groupe de Nathalie.
10 heures, les petits de l'unité 1 arrivent devant La Fabrik. Les enfants empruntent le fameux couloir et se retrouvent en plein milieu du local et les corps se mettent en mouvement. ça court, ça danse, ça hurle dans tous les sens.
Après cinq minutes de découverte sauvage des lieux, un temps calme s'impose pour faire retomber l'excitation.
Je m'empare de la théière et là, comme par magie, une bonne partie des enfants m'entourent et m'aident à préparer le thé. A qui mettra la menthe, le sucre, " et moi je peux laver les verres".
Une fois le thé prêt à être servi, nous passons sur les nattes. La pression retombe et les enfants nous laissent écouter leurs envies .Et comme pour les autres groupes, les enfants ont très bien repéré la mission de La Fabrik : leur donner un espace d'expression, qui se veut tourné vers toutes les formes d'art. Et donc leurs demandes portent sur la peinture, la musique, la danse, le théâtre…
Vendredi 6 octobre
La première visite de la journée se fera avec le groupe de Claire et un instituteur venu avec sa classe.
Nous sommes donc une sacrée bande à emprunter le chemin qui nous conduit à La Fabrik. Les enfants sont très curieux et les questions arrivent à la pelle. « Et c’est où ? » « La Fabrik c’est loin » « C’est quoi ? »
Je leur dis de garder leurs questions pour plus tard car nous allons avoir l’occasion d’en parler autour d’un thé à la menthe.
Arrivé devant la porte, les enfants sont très pressés de rentrer dans le local. Je leur dis : « nous attendons les autres avant de rentrer. »
Une fois le reste du groupe devant la porte, nous pouvons y aller.
Le couloir joue toujours son rôle d’aspirateur et envoie les enfants directement dans la pièce centrale pour un balai anarchique.
Ils courent dans tous les sens, poussent des cris de joie, occupent tout l’espace. Ces enfants s’expriment de façon brutale et directe. Les corps déambulent, les voix voyages, les esprits se libèrent.
Quelques enfants préparent le thé avec moi et nous voilà tous installés sur les nattes pour revenir sur ce qu’ils ont vu.
Les retours que nous font les enfants sont toujours très positifs.
« C’est trop beau », « c’est grand, j’adore », « c’est bien »
Et quand nous leur demandons ce qu’ils pourraient y faire, là encore, ils m’étonnent :
« Moi je veux faire de la peinture » « moi de la musique, du rap » « moi je veux danser »
Ils ont vraiment bien intégré la mission de la fabrik : leur offrir un nouvel espace d’expression.
Le dernier groupe à venir visiter la fabrik est le groupe de Didier et Fanny, où se trouvent des jeunes aux problématiques très lourdes.
Après un trajet folklorique, nous arrivons devant la porte de la fabrik.
Comme la plupart d’entre eux ne parlent pas, les questions et commentaires n’ont pas été très nombreux pendant et après la visite.
Le fait de ne pas accéder à la parole, ne les empêche pas de communiquer ce qu’ils ressentent.
Le couloir les guide jusqu’à la pièce centrale où ils regardent le plafond, d’autres touchent les murs, certains le sol.
C’est une découverte tactile, les mains servent de media entre eux et l’espace qu’ils visitent.
Les mains sont des antennes et les visages des récepteurs qui à travers leurs sourires laissent à croire que l’endroit les ravit.
Après la visite, nous venons tous nous allonger sur les nattes pour déguster un thé à la menthe.
Je parle plus avec les éducateurs car les enfants ont du mal à communiquer par la parole. Je leur demande à tour de rôle s’ils ont apprécié le lieu et leur explique ce qui va se passer à La Fabrik.
Les sourires et les mains qui claquent sont autant significatif de leur approbation que s’ils me disaient : « c’est beau ! Ça me plait. »
ALBERTINI LAURENT
VISITE A LA FABRIK
Internat des jeunes filles
Lundi 9/10
16h30
Laurent vient nous chercher à l’internat. Nous partons ensemble à pieds, direction LA FABRIK. En chemin nous nous arrêtons dans une pâtisserie orientale pour acheter un assortiment de gâteaux pour le gouter. Nous en profitons pour demander de la menthe pour faire un thé. Nous faisons le tour du pâté de maison et nous arrivons enfin à LA FABRIK.
Laurent nous fait visiter les lieux, on monte même voir l’appartement au-dessus.
Ensuite nous avons enlevé nos chaussures pour nous installer sur les tapis du « petit salon de thé ». On s’assoie sur les petits coussins. Laurent nous sert le thé et nous partageons les petits gâteaux. Justine et Johanna ont envie de dormir là. Laurent nous explique ce qui va se passer à LA FABRIK quand les travaux seront terminés ; de la peinture, de la sculpture, des concerts… Elisa imagine déjà son futur atelier.
Quelques commentaires recueillis auprès des filles :
Justine « C’était bien, j’ai aimé le lieu. Il va y avoir des spectacles, une scène. Il va y avoir de la couture. Lucie fait un atelier sculpture ».
Emilie « C’était bien. Les tapis arabes. Les toilettes sont sales, le lavabo aussi il est sale. Il va y avoir des spectacles, de la peinture et de la couture. J’aimerai y aller pour la danse ».
Mélody « La FABRIK c’est bien, j’ai envie d’y re-aller faire de la couture ».
BERNARD Marielle
PENEL Elisa
Et les jeunes filles de l’internat.
Quand Vert pré rencontre Mataró
Rencontre avec une institution espagnole
Suite au travail entrepris avec l'association Camapa autour du projet Batucassa, le temps est enfin venu de recevoir les espagnols.
En effet le carnaval 2006 étant derrière nous, la prochaine étape du projet était basée sur deux axes. Le premier consistait à préparer le défilé de la fête du Plateau et le second était l’accueil des espagnols. Je pense que nous devons préciser que le groupe accueilli est un groupe d’adultes handicapés, qui pour la plupart travaillent.
Pour cela, il a fallu mobiliser les énergies et énormément de monde a répondu présent pour mener à bien le projet.
Nous tenons à remercier le groupe Collectivité qui a fait un énorme travail autour de la venue de nos invités en préparant à manger pour plus de 70 personnes. Ensuite un grand coup de chapeau à Lucie pour tous les préparatifs, aux filles de l'internat ainsi qu'aux éducateurs et parents présents lors de ce week end merveilleux et même parfois magique.
Après une journée harassante et plus de 3 heures d'attente (les enfants de la villa sont repartis assez déçus de ne pas avoir pu accueillir les espagnols); enfin les espagnols arrivent. Il est minuit.
Ils descendent du camion et là, a lieu le premier contact, des « bonjours » un peu gênés , protocolaires , il faut arriver à reconnaître qui est qui et dans le noir c'est d'autant plus difficile.
Une fois les sacs récupérés et une visite des lieux, surtout des chambres, ils viennent tous dans la salle à manger pour prendre une collation et là une tout autre ambiance se dégage , la convivialité prend place et les premiers sourires s'échangent.
Après avoir donné quelques consignes sur le fonctionnement pratique de la maison, nous laissons nos invités reprendre des forces pour la longue journée du lendemain.
Onze heures du matin les premiers enfants arrivent accompagnés de leurs parents. Un buffet pour plus de 70 personnes attend les convives ainsi qu'une bande de joyeux lurons tout de orange vêtu tapent à tu tête sur des tambours et autres percussions.
Après une répétition improvisée entre les jeunes de l'IME et les adultes de Mataró, nous regardons tous ensemble (les espagnols, les familles, les enfants, les éducateurs, les directeurs) le film du carnaval 2006.
Une fois le ventre bien rempli, nous prenons tous nos percussions pour partir dans les rues de la ville diffuser de l'énergie positive.
Une quarantaine de personnes qui jouent des percussions en même temps dans la rue ça fait du bruit et forcément la descente jusqu'au métro n'est pas passée inaperçue.
De nombreux d'habitants du quartier étaient à leur fenêtre, nous saluaient et nous encourageaient ; les automobilistes qui klaxonnaient aux rythmes des tambours, les gens rigolaient de joie en nous voyant passer...........Bref que du bonheur!
Après avoir enflammé le métro, nous arrivons devant le local de Camapa.
Il y avait une foule de gens impressionnante. Pour le défilé, nous étions plus de 120 percussionnistes (les espagnols, vert Pré, Mont Riant, Arles, Camapa) et trois échassiers ont également défilé avec nous.
Nous voilà partis pour le défilé sur le Cours Julien. Au début chaque centre avait une place bien définie dans le cortége mais très vite tout le monde s'est mélangé, pour jouer dans l'harmonie et l'échange.
La « chose » vraiment magique était le regard des gens extérieurs qui ne voyaient pas une bande d'handicapés mais des musiciens. Car sur notre passage les gens n'avaient pas de la pitié dans le regard mais de la joie, celle procurée par la musique. Des gens dansaient sur les rythmes proposés par la troupe dans un grand moment de communion avec le quartier. En effet lors de notre passage dans les différentes rues du cours julien, tous les commerçants étaient sortis de leurs boutiques les bras tendus vers le ciel, tapant des mains et des pieds, dansant. C'était la fête.
Après avoir bu un pot devant le local de Camapa, nous rentrons à l'IME en compagnie des espagnols et des enfants.
Une fois arrivés, d'autres moments magiques se sont produits.
Les espagnols ont récupéré une guitare, quelques enfants se sont attroupés autour d’eux et la musique fait le reste .Nous pouvons voir des enfants français chanter avec les espagnols. La musique chasse les différences et fait exploser les frontières.
D' autres enfants jouent au foot avec des résidents de Mataró, des passes , des coups de pieds , des éclats de rires sont échangés , partagés malgré les différences.
Après avoir pris du bon temps tous ensemble, les espagnols se préparent pour aller faire la fête au Cours Julien.
Le lendemain matin, nous venons dire au revoir à nos invités, que d’émotion !!!!
Un petit tour sur la corniche, suivi d’une visite de Notre Dame de la Garde et voilà, c’est fini. Il est temps pour eux de reprendre la route de Barcelone, les yeux remplis de larmes et la tête pleine de souvenirs.
Albertini lauren
« Ca se dit comment bonheur en espagnol ? »
La question m’est posée par une demoiselle qui n’a pas toujours pour habitude d’utiliser des mots doux.
Je suis en train de discuter avec une éducatrice espagnole et une jeune femme de Mataro, dans une espèce de charabia franco-espagnolo-anglais avec les mains, la tête qui bouge dans tous les sens.
La demoiselle pose une question « ça se dit comment bonheur en espagnol ? ».
Je cherche, j’essaye de mimer, à Anna (l’éducatrice), le bonheur, ce n’est pas facile…Elle comprend…
« Suerte, la suerte ! »
Je dis à la demoiselle « ça se dit suerte , el suerte, et pourquoi tu demandes ça »
La demoiselle me répond « j’sais pas » et elle s’en va…
La rencontre imaginée de ce week end est devenu réalité.
Vendredi soir à l’internat :
Emulation, l’équipe de week end est venue nous rejoindre sur l’internat des jeunes garçons et des adolescents, pour donner un coup de main pour les derniers petits détails : préparer les derniers tee shirt du défilé, préparer « una collacìon », décorer, mettre la table, chercher dans le dictionnaire des mots pour accueillir, tout ça sur fond d’une radio espagnole.
Nous dînons tous ensemble, l’ambiance est belle, ça rigole dans ce groupe pourtant si hétéroclite !
Mais comme on s’y attendait un peu, les espagnols tardent (question de culture)…Les jeunes du week end viendront les rencontrer le lendemain matin.
A minuit et des poussières, deux trafics sur le parking et la première rencontre s’opère…Quelques formalités : « nous sommes un peu en travaux, les douches et les toilettes c’est dehors ! ! ! Il faut fermer l’internat la nuit… »Après la Collation, des mots, un peu discrets, gênés, on se regarde, on s’observe et surtout avec la fatigue on pense qu’il faut garder des forces pour la longue et belle journée qui se prépare, si la météo est avec nous…
Samedi 8h30 :
J’attrape « la cociñera » au passage et nous allons préparer un petit déjeuner à nos hôtes. L’internat chante une drôle de langue, ça parle fort, ça bouge, ola que tal, el desayuno, ayuda…petit à petit, on se retrouve, on se réveille, caféo, leche, assucar…
Les rires, souvent dus aux incompréhensions, commencent à opérer…Quoi qu’il arrive, on essaye de s’écouter, on insiste et on trouve.
Le premier jeune arrive sur l’internat, il est 9 heures…Il se présente fièrement comme le chef de la batucassa. C’est Patrick qui lui a dit.
On lance les opérations pendant que les espagnols terminent de déjeuner…Le rythme est tranquille, aucun stress, tout se fait sereinement, malgré les tonnes de petits détails à gérer.
Petit à petit, éducateurs, adolescents, familles, enfants pointent le bout de leur nez à Vert Pré.
Il est 11 heures et la fête commence du coté des ateliers. Sur la petite place, on règle les instruments, on commence à se maquiller, à mettre les tees shirt, on picore.
L’éducatrice de l’atelier Collectivité a installé, avec son équipe dynamique et compétente, un buffet, aux saveurs diverses…Tapenade, cakes salés, tartes, petits gâteaux à la cannelle.
Nos invités se régalent et dégustent ensemble ce petit apéritif dînatoire dans la bonne humeur.
Les boums boums commencent à se faire entendre. Ils ne s’arrêteront que 5 ou 6 heures plus tard ! ! ! Un petit « buff » espagnol entraîne la troupe française.
Là, c’est le son, le rythme et la musique qui opèrent avec magie. Certains écoutent, d’autres se cachent un peu, il y a ceux qui dansent, ceux qui observent, ceux qui attendent.
On présente aux espagnols le film « les enfants verts » du carnaval 2006. Sarah pointera sa jolie figure discrètement et sortira tout doucement sa caméra pour encore une fois être « fabricatrice de souvenirs »…
Heureusement, il y en a qui rappelle qu’on doit quand même partir. On nous attend au cours julien où le reste de la troupe est déjà en place : Camapa, Mont Riant, Arles, les échassiers et échassières.
Un big Bang déferle sur le boulevard Sainte Marguerite Via le Métro Dromel. Une spéciale dédicace pour la RTM « ce soir, on vous met le feu ! ! ! »
Tout ça dans une belle harmonie. Même constat qu’au carnaval, on se suit, pas de reprise à faire, pas d’enfants qui s’échappe, pas de jeunes à la traîne, la troupe est unie et la symphonie s’éveille…C’est vrai, on ne tient qu’un rythme mais tous ensemble ! ! !. C’est déjà ça…
On traverse le cours Julien, les regards, la foule, les sourires, les photos…
Le défilé débutera vers 14h30. Il nous semblera, pour certains interminable. Je passe mon temps à faire des aller retour, à guetter si untel est là, si l’autre suit, si aucun enfant ne pourrait quitter le groupe. Cours Julien, rue d’Aubagne, place Notre dame du Mont, rue Bussy l’indien, rue des trois rois,rue Crudère et on repart sur le cours julien, à droite !!! .
Il ne s’arrête jamais ce Monsieur Lartiguemasse.
En remontant la rue, les couleurs sont mélangées, la troupe ne fait qu’une, chacun trouve sa place à coté de qui il veut…
De la fatigue, de la fierté, la découverte pour une partie, une première expérience, une confirmation pour d’autres.
Petit goûter dans la rue, photo de groupe avec les espagnols. Elle sera belle et immortalisera cette aventure musicale…et humaine.
Retour en métro, malgré la fatigue, une pensée pour les parents, une fois dans le métro, un dernier petit show, les gens rigolent, tapent dans leurs mains, des jeunes dansent sur le quai. On nous reconnaît, au sens propre comme au sens figuré.
La montée de Sainte Marguerite est moins éclatante mais il y a encore quelques passionnés qui jouent.
On se pose à nouveau sur la placette, on discute, petit à petit les langues se libèrent. une maman improvise un cours d’espagnol, les jeunes écoutent, répètent, ils sont sous un arbre, sous un banc, il y a du soleil.
Des jeunes espagnols demandent à visiter l’institution, les serres, les fleurs, épatés par le chalet et les photos des enfants, l’internat des filles. Ils trouvent que les photos sont géniales. Ils reconnaissent des filles toutes jeunes sur les photos…Ils m’épatent par leurs observations, leur chaleur et la fraternité qui se dégagent de toutes leurs questions, leurs demandes et leurs sourires.
A mon retour, sur la place, certains sont partis. Ils restent les jeunes du Week end, qui ont profité au maximum de l’événement. Les éducateurs espagnols jouent de la guitare, ça danse, ça tape dans les mains, des airs de flamenco.
Une partie de foot s’improvise, O.M-Barcelone, elle durera plus d’une heure.
La parole est libérée, les questions libres, il n’y a plus de barrières…
Une éducatrice et moi même, les accompagnons pour faire la fête au plateau, petit repas kebab ou pizza.
A table, le mélange est encore d’actualité, ils forment un groupe. Il n’y a pas dans ce moment précis, d’éducateurs ou d’éduqués, ils sont dans le partage, l’écoute de l’autre… toujours pas de stress, aucune pression.
Vers 22 heures, on se dirige vers une petite scène, on y attend « le complexe du renard », groupe de chanson française rock, ils ne s’arrêtent pas, ils entraînent tout le monde, dans la foule, des marseillais, des espagnols, des jeunes…Ils dansent, ils rient, ils dansent… mais ils s’arrêtent jamais les espagnols ou quoi ?
Ils profitent au maximum de leur tout petit séjour à Marseille. C’est court vendredi minuit et retour prévu dimanche en début d’après midi.
Ce séjour, ils l’ont auto-financé, ce petit groupe d’éducateurs. Ils ont fait des concerts avec « la casa de la música popular », ils sont là à Marseille avec les adultes de la fondation, il n’y a pas de primes, pas de récup, juste du bonheur et un moment unique à savourer jusqu’au bout de la nuit.
La fatigue opère, il est temps de rentrer, une éducatrice les dirige sur le chemin de l’IME. Nous nous quittons sur le parking dans le rire car il exige un petit déjeuner à 6 heures. Je leur explique qu’ils trouveront du pain frais juste en face de l’IME ! ! !
Dimanche 12h00
Je les retrouve au petit déjeuner. Certains se lèvent, d’autres sortent de la douche, les prénoms commencent à s’imprimer, Gabriel, Antonia, Yolanda, Marti, Carme, Eloi, Anna, Joan… On échange sur les projets futurs, on parle de « La Fabrik », d’une rencontre sportive, de notre venue à Mataró, on échange des références, des disques, des livres, du savon de Marseille, des spécialités espagnoles, du saucisson…
Dernière discussion dans la cuisine. Avec la fatigue, les rires et l’émotion se mêlent, à peine la rencontre opérée, il faut partir.
C’est ce qui nous poussera à organiser des futures rencontres, on a plein de choses à se dire.
Cette rencontre s’imagine avec des intérêts multiples, rencontres musicales, rencontres culturelles et humaines pour tous les protagonistes de l’histoire, rencontre professionnelle.
C’est une petite leçon d’engagement que m’a offert, cette troupe, dans sa manière d’aborder la relation avec les adultes qu’elle encadre. L’attention portée pendant ces 3 jours, la concrétisation du projet, la qualité de l’écoute, et le partage des regards et des étonnements.
Je vous invite à surfer sur leur site Internet…Sur leurs carnets de la maison, petit journal de vie et des réflexions, des critiques de livres, des coups de gueules, des écrits d’adultes, des récits d’initiatives. (en catalan…)
Ce n’est que le commencement de cet échange. C’est bien notre travail d’éducateurs d’offrir des moments et des expériences comme celle-ci. C’est un enrichissement pour tout le monde : enfants, adolescents, familles, éducateurs et familles.
Elle est porteuse de dynamique, de souvenirs à partager, à renouveler, d’envie de dépasser le cadre traditionnel. Elle rompt avec le quotidien institutionnel… Utilisons même des grands mots : c’est thérapeutique !
Alors, désormais nous avons un peu de temps pour préparer les autres évènements de « la Batucassa del Sol » de Vert pré, Forum du Handicap, Carnaval 2007, Fête de la Musique en Arles, Concert à Mataró et d’autres événements à venir.
Il nous faudra prévoir des rencontres pour échanger sur le parcours individuel de chaque jeune au sein de cette aventure, réfléchir sur la participation des familles, imaginer une feuille de route, pour chacun individualisé, pour ne pas figer le projet et le maintenir en tension, l’ouvrir encore à d’autres enfants ou adolescents.
Partir à Mataró sera une aventure nouvelle à concevoir et à partager, alors soyons réalistes, exigeons l’impossible…
Katia Jeudy
Chef de service éducatif