"L'inconscient, c'est le social", affirme Jacques Lacan vers la fin de sa vie.
Déjà Freud nous avait mis la puce à l'oreille, qui, dans Psychologie des foules et analyse du moi , posait que "L'opposition entre la psychologie individuelle et la psychologie sociale {...} perd beaucoup de son acuité si on l'examine à fond." (Essais de psychanalyse, Trad. nouvelle, Paris, Payot, 1981, p. 123)
Prendre au sérieux la dimension de l'inconscient dans le travail social, c'est en mesurer l'incidence aussi bien dans la rencontre clinique au cas par cas de chaque sujet, que dans les rapports des sujets entre eux, à savoir le lien social.
Il n'y a pas comme l'affirment certains, sans doute pour se débarrasser d'une question qui les embarrasse, le sujet d'un coté et le social de l'autre.
Les travailleurs sociaux n'ont pas vraiment pris la mesure de cette double évidence : l'homme est un être parlant et c'est dans un espace de langage que se fait toute rencontre. Bombardés en formation et sur le terrain par des masses de savoirs de plus en plus éclatés, les praticiens sociaux ne savent plus où se repérer. L'exigence éthique veut qu'au delà des savoirs accumulés, chacun se questionne sur ce qu'il compte en faire au regard des personnes que le service social lui demande de prendre en charge. Du savoir il y en a à la pelle à ne plus savoir qu'en faire, c'est bien le drame. Du coup les acteurs du social ne savent plus à quel saint se vouer.
Sur ce site, nous voulons mettre à l'épreuve cette idée que la psychanalyse représente un savoir spécifique qui interroge non seulement les divers champs des savoirs et de savoir-faire, mais aussi le désir qui pousse chacun à s'y engager. L'éthique de la psychanalyse pousse les travailleurs sociaux à se questionner en permanence sur la place qu'ils occupent dans l'espace social. Le discours analytique représente de fait une tentative pour affronter le malaise social, non pour l'évacuer, mais pour en situer plus précisément les contours, afin d'engager des actes en connaissance de cause.
En tant qu'acteurs sociaux, les professionnels de l'action sociale, ont le devoir de donner forme à ce qu'ils agissent auprès de populations opprimées de plus en plus nombreuses. Autrement dit, comme le précise Lacan dans "La science et la vérité"( Ecrits ),: "De notre position de sujet, nous sommes toujours responsables." Dans cette tentative la psychanalyse est un point d'appui solide, non seulement pour les concepts opératoires que l'on peut y emprunter, mais surtout pour l'attitude sans cesse questionnante qu'elle exige des intervenants sociaux, dans l'espace de la clinique mais aussi dans les relations inter-profesionnelles .
Cet axe de réflexion proposé autant aux psychanalystes qu'aux travailleurs sociaux, n'est pas entièrement nouveau. Mais l'écho en est réveillé par l'exigence éthique actuelle de résister dans nos sociétés modernes à ce qui se constitue comme mort du sujet. Les pratiques sociales constituent de fait un des lieux de cette résistance active. Comme la cure analytique, à un autre niveau.
Ce site est animé par Joseph Rouzel , éducateur,formateur de travailleurs sociaux, écrivain et psychanalyste.