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Un lieu pour dire
Trente ans de clinique institutionnelle à Guénouvry
ENSP
31/12/2005

Le centre de Guénouvry en Loire-Atlantique reçoit des enfants autistes et psychotiques. Les fondateurs de ce centre sont des anciens (ou s’y référent) de l’Ecole expérimentale de Bonneuil où Maud Mannoni en son temps inaugura une clinique du travail social inspirée de la psychanalyse. A l’occasion du trentième anniversaire du centre, une journée a réuni les professionnels de l’établissement (éducateurs, instituteurs, assistantes familiales, directeur, médecin psychiatre), mais aussi les partenaires et des invités de marque dont : Jean-Pierre Lebrun, psychanalyste à Namur et auteur du désormais célèbre Un monde sans limite (érès) et Bernard Durand, Président de la Fédération des Croix-Marine, qui fut longtemps le fer de lance du renouvellement de la psychiatrie et de la promotion de la psychothérapie institutionnelle. Dans sa préface Pierre Delion insiste sur le fait que le livre prolonge « la pensée à plusieurs autour des grandes questions de prise en charge des enfants autistes et psychotiques ». De la même façon cette journée prolongeait le travail du quotidien. On voit bien au fond comment chacun dans une institution se soutient de ce maillage incessant entre travail théorique et invention clinique. Seule cette relance permanente des concepts, seule une praxis de précision où la pratique quotidienne s’en trouve labourée, permettent à un collectif d’intervenants sociaux et de soignants, de faire équipe. Cette journée, comme cet ouvrage qui s’en fait l’écho, produit de l’institution. Du coup, au-delà des témoignages de tout un chacun, des broderies des intervenants sur tel ou tel thème, c’est bien d’une mise en acte d’« un lieu pour dire » que participe ce bel (cette belle) ouvrage. Guy Rousseau dans l’avant-propos a bien raison alors de préciser qu’« en deçà d’une éthique du sujet, le travail de Guénouvry relève d’une éthique de la subjectivation. » Qu’est-ce à dire ? Si ce n’est que chacun met la main à la pâte. Enfants accueillis, comme adultes accueillants. Trente années d’un travail acharné, sans lâcher jamais la main courante de ce principe, produit, dans les reflets moirés de cet ouvrage petit par la taille, mais grand par le cœur, une sorte de théâtre forain, où chaque intervenant y va de sa parole, alors que passent dans l’obscur du fond de scène les ombres errantes des grands anciens : François Tosquelles, Jean Oury, Maud Mannoni et quelques autres. C’est bien de transmission qu’il s’agit et de filiation. « Passe à ton voisin ! » comme disent les enfants. L’affaire est ancrée dans une solide généalogie. On se questionne alors à partir de ce « fond de sauce » sur la loi 2002-2 que l’on revisite à hauteur de la clinique du quotidien. Jean-Pierre Lebrun de son côté fait une belle ouverture sur les mutations actuelles du lien social, qui modifient l’approche de jeunes sujets, nés dans un monde secoué par la stupeur et le tremblement du discours scientiste. Les questions d’évaluation qui font l’objet d’un échange très riche prennent alors tout leur sens : que faire savoir de cet obscur labeur auprès d’enfants que l’on dit un peu trop rapidement démunis, et qui témoignent souvent de capacités d’invention pas ordinaires, dans ces bricolages (bris et collages tout à la fois) que l’on nomme symptômes ? Que faire savoir du savoir-faire souvent insu des équipes de terrain ? Car il faut que cela se sache, que dans de tels endroits une position clinique, institutionnelle et politique est fermement tenue. Pierre Delion souligne qu’il s’agit là de la mise en œuvre d’une « culture de la singularité » - justement ce que le discours scientiste dans ses retombées technologiques les plus funestes (normes ISO, démarche qualité etc) tente d’abolir, - et donc, ajouterai-je, une culture de la résistance. Tout est encore à inventer. Encore faut-il en avoir le souffle. Guénouvry et ses travailleurs, ses « trouvailleurs soucieux », pourrait-on oser dire, n’en manquent pas. Les enfants accueillis et leurs parents savent qu’ils peuvent compter sur eux, qu’ils trouvent et trouveront à qui parler.

Joseph Rouzel, Directeur de l’Institut Européen Psychanalyse et Travail Social.

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